Catherine Poulain : « Brûler encore, brûler jusqu’au bout »


Entretien inédit | Ballast | Série « Littérature du travail »

Le suc­cès d’un pre­mier roman publié en 2016 a fait connaître et recon­naître Catherine Poulain comme écri­vaine. Le Grand marin évoque l’a­ven­ture et le tra­vail obs­ti­nés d’une femme qui s’embarque sur un bateau de pêche en Alaska. Catherine Poulain a elle-même pas­sé dix ans à exer­cer le métier de pêcheuse dans cette région, avant de se faire expul­ser faute de papiers en règle. Pêcheuse, mais aus­si ouvrière, sai­son­nière agri­cole, voya­geuse, barou­deuse et ber­gère, Catherine Poulain a tou­jours exer­cé, en mou­ve­ment, des métiers qui l’ont tenue loin du monde intel­lec­tuel et lit­té­raire. Mais elle a tou­jours écrit. Son deuxième roman, Le Cœur blanc, paru en 2018, rend hom­mage aux sai­son­niers et aux sai­son­nières agri­coles de France, ce « peuple de l’ombre qui cherche de la lumière ». Évoquer des hommes et des femmes côtoyés dans le tra­vail, les recom­po­ser en de grands per­son­nages, écrire des mondes par­fois tenus aux marges, racon­ter cer­taines formes para­doxales du labeur dans les­quelles la fatigue se conquiert et le corps dou­lou­reu­se­ment se libère : voi­là ce qu’en­gage cette écri­ture assez directe, concrète, char­nelle. Aujourd’hui, Catherine Poulain réside dans le Médoc, où elle tra­vaille une par­celle de vigne et vient d’a­che­ver l’é­cri­ture d’un nou­veau texte qui paraî­tra dans quelques mois. Elle nous accueille chez elle, dans la petite mai­son rouge « dont per­sonne ne vou­lait » dans le vil­lage — et qu’elle a refaite de ses mains. Cinquième volet de notre série « Littérature du travail ».


[lire le qua­trième volet : « Les pauvres du monde entier — le jour­nal de Françoise Ega »]


Peut-être faut-il com­men­cer par évo­quer les dif­fé­rents métiers que vous avez exer­cés dans votre vie. Ont-ils été autant de contraintes ou, au contraire, autant de choix ?

Quand j’a­vais 15 ans, nous vivions dans une cité. Je regar­dais les jeunes par la fenêtre. Ma mère, voyant que j’avais envie de les rejoindre, me disait : « Tu appar­tiens à une famille d’intellectuels, tu ne pour­ras jamais en sor­tir. » Mon père était pas­teur et, elle, avant d’avoir cinq enfants, pro­fes­seure. Je me suis dit : « Non, je ne veux pas être intel­lec­tuelle, je veux tra­vailler, être dans la vie réelle et la sen­tir. » Mes sœurs ont étu­dié, moi j’ai pas vou­lu, et rapi­de­ment j’ai tra­vaillé. On me disait quand j’a­vais 20 ans que j’avais des mains de pia­niste. À 30 ans, j’avais enfin mes mains de tra­vailleuse. Je les regar­dais avec fier­té en pen­sant « C’est moi qui ai choi­si ma vie ». Mes mains en sont la preuve. J’ai tou­jours aimé les tra­vaux très phy­siques, tout ce qui pas­sait par l’ef­fort, sen­tir de tout mon corps ce que je fai­sais. J’ai pen­sé que tra­vailler dans la méca­nique agri­cole serait for­mi­dable. Je vou­lais me confron­ter aux grosses bêtes, et ces grosses machines me sem­blaient être de grosses bêtes. Ça ne s’est pas fait mais j’ai trou­vé un emploi d’apprentie menui­sière dans une fabrique de meubles, sur les grosses tou­pies. Je me disais que je serai menui­sière. Je suis tom­bée malade et il a fal­lu que j’arrête. J’aurais aimé, dans l’idéal, être garde fores­tier ou com­pa­gnon char­pen­tier, construire des bateaux, tra­vailler le bois. Ça ne s’est pas fait. En ce temps-là on ne pre­nait pas de femmes dans ces métiers.

J’ai voya­gé et lorsque je suis ren­trée en France, je suis deve­nue sai­son­nière agri­cole. J’errais un petit peu mais j’ai décou­vert une vie magni­fique dans la nature, mon corps res­sen­tait le froid, la cha­leur, comme une corde qu’on ten­drait jus­qu’à sa presque rup­ture. Mais ça ne rompt pas, un corps c’est plus solide que ça. J’ai voya­gé encore et j’ai trou­vé toutes sortes d’emplois sai­son­niers sur ma route, de ménage, sur des chan­tiers navals, avec des ani­maux. J’ai aus­si tra­vaillé dans des usines de pro­duits chi­miques à Marseille : c’était infect. En ce temps-là, on ne nous don­nait pas de masques. Je ne vou­lais pas res­ter à l’u­sine, mais même ces tra­vaux ali­men­taires, c’était impor­tant, je me disais qu’ils devaient m’ap­prendre quelque chose. C’était décou­vrir le monde phy­sique, sa réa­li­té. Je me sou­viens de femmes qui avaient pas­sé toute leur vie en usine, cer­taines racon­taient leurs expé­riences, à la farine par exemple, qui vous bouche les pou­mons. Il y avait chez elles une espèce d’or­gueil à avoir souf­fert. Je me suis dit : sur­tout ne pas tom­ber là-dedans — sur­tout pas. Quand il ne vous reste plus rien d’autre que la fier­té d’être une vic­time, c’est ter­rible. Alors j’ai accom­pli ces tra­vaux ali­men­taires dans l’i­dée que c’était pour aller vers autre chose, pas pour accep­ter d’y res­ter. J’ai même aimé y être obli­gée. Cette pré­ca­ri­té fai­sait par­tie du fait d’être seule, indé­pen­dante, vivante, de décou­vrir le monde. 

Travailler était donc une manière de se jeter dans la vie, plu­tôt qu’une manière de la gagner ?

« Ce sont les bases qu’il faut chan­ger, les souf­frances psy­cho­lo­giques ou la répé­ti­tion de la tâche qui font qu’à 60 ans une per­sonne est com­plè­te­ment usée, esquintée. »

Oui. Mais j’ai une notion du tra­vail très per­son­nelle… J’ai beau­coup été sur les che­mins. Quand les gens parlent de leur vie pro­fes­sion­nelle, c’est sou­vent une autre his­toire : ils occupent un emploi qu’ils n’ont par­fois pas choi­si ou qu’ils n’osent pas quit­ter, coin­cés entre des rails. Ça peut deve­nir pour eux une véri­table malé­dic­tion et cau­ser des sui­cides, même chez les plus jeunes. J’ai connu pas mal de gens qui, par­tis à la retraite après qua­rante ans pas­sés à tra­vailler dans la même boîte, sont tom­bés dans l’alcool parce qu’ils s’étaient oubliés toute leur vie et ne savaient plus com­ment vivre par eux-mêmes. D’autres qui ont fait des burn out en tra­vaillant dans l’ad­mi­nis­tra­tion parce que des col­lègues leur ren­daient la vie impos­sible. Ce sont les bases qu’il faut chan­ger, les souf­frances psy­cho­lo­giques ou la répé­ti­tion de la tâche qui font qu’à 60 ans une per­sonne est com­plè­te­ment usée, esquin­tée. J’ai eu cette chance de tra­vailler dif­fé­rem­ment, de tra­vailler dur, mais ça a été pour apprendre, pour aller « à la ren­contre de ». Simone Weil a écrit, à pro­pos de son expé­rience du tra­vail en usine, qu’elle a cher­ché à « s’ex­po­ser pour décou­vrir la véri­té. Car la véri­té n’est pas seule­ment le fruit d’une pen­sée pure, elle est véri­té de quelque chose d’ex­pé­ri­men­tal, contact direct avec la réa­li­té. » Je me disais : plus c’est dur et plus je par­vien­drai à trou­ver ma propre liber­té. Dans la pêche, par exemple. Une sai­son de sau­mon, ça dure bien trois mois, on tra­vaille 18 heures par jour, par­fois plus, et c’est un peu comme l’armée — pour la sécu­ri­té il faut qu’il y ait un capi­taine, sans ça on n’y arri­ve­rait pas, on est tel­le­ment épui­sés. Ce qui pou­vait sem­bler un asser­vis­se­ment était deve­nu pour moi un affran­chis­se­ment : trou­ver ma liber­té « au-delà » de. En moi ?

Une année, je me suis dit : « Mais qu’est-ce qui me prend ? J’ai hor­reur de tout ce qui est mili­taire, de la dis­ci­pline et chaque fois je rem­pile ! » Mais j’é­tais deve­nue bonne mate­lot. Certains patrons étaient vrai­ment des peaux de vache, cette année-là j’é­tais en fureur contre mon skip­per et je lui ai dit : « Dès qu’on rentre en ville, je me casse. » Mais je l’ai pas fait parce que ma fier­té c’était de tenir jusqu’au bout, ten­ter de deve­nir irrem­pla­çable. À tra­vers ça je trou­vais une liber­té, pas dans la contrainte mais par la contrainte. Quand je ren­trais à terre, je me tenais droite et je mar­chais la tête haute, j’avais une voix qui se fai­sait entendre, du souffle, la fier­té d’être. Je savais que j’avais don­né toutes mes forces, tout ce que j’avais en moi, donc j’étais à éga­li­té avec les autres (et on était tous un peu fous, ça aidait). J’avais défen­du mon hon­neur et j’étais vivante. Une impres­sion de plé­ni­tude. Mais je savais que ça, il fal­lait le payer cher. Pour atteindre cette fier­té d’être en vie, et ce bon­heur du par­tage, aus­si. Car il y a une idée de par­tage dans le travail.

[Jean Morin, Le Port de Nantes, sans date]

Au sujet de la cama­ra­de­rie qui se crée avec les autres dans le moment du tra­vail, sans doute est-ce dif­fé­rent selon qu’on est sur un bateau, dans un champ, dans une fabrique… Quelles formes ont pris les liens de travail ?

Que ce soit dans la pêche ou les sai­sons, j’ai ren­con­tré une grande soli­da­ri­té. L’été, il y avait des femmes par­mi nous. Peu res­taient l’hiver, je bos­sais avec les gars. J’ai par­fois été obli­gée d’en venir aux mains pour me défendre quand ils avaient trop bu. Mais c’était une vraie fra­ter­ni­té. Comme sur le bateau, on n’a­vait pas beau­coup de repli, ça créait une uni­té. Même si on s’engueulait — on peut se dire des hor­reurs sur les bateaux. J’ai aimé ça, pou­voir dire « Fuck you » à mon patron, s’ex­pri­mer ensemble, ce sen­ti­ment d’u­ni­té qu’on trouve dif­fi­ci­le­ment ailleurs. Lorsqu’on vit à fond le tra­vail phy­sique, les mots ne sont plus mesu­rés, on peut davan­tage faire exul­ter ses pas­sions, ses colères. Le tra­vail des hommes à la pêche m’a sem­blé être un grand jeu sau­vage. Et que ça soit réser­vé aux hommes ne me sem­blait pas juste. Moi aus­si je vou­lais entrer dans le jeu. Il n’é­tait pas ques­tion de prou­ver quelque chose en tant que femme, je vou­lais sim­ple­ment y avoir ma place comme eux. « Jeu », ça veut aus­si dire qu’on n’est pas obli­gé de se le col­ti­ner toute sa vie. J’ai eu la chance d’être une sai­son­nière chan­geant de tra­vail très sou­vent, et une pêcheuse qui a connu de nom­breux embar­que­ments. À chaque fois, repar­tir à l’aventure avec un nou­vel équi­page, un nou­veau skip­per qui a une manière dif­fé­rente de mener le bateau.

Vous avez affir­mé à pro­pos du tra­vail en mer : « On récu­père son genre quand on pose un pied sur la terre, avant ça, on est frères et sœurs. » En tant que femme, avez-vous dû conqué­rir cette fraternité ? 

Je ne sau­rais pas dire pour les autres femmes mais, moi, je n’ai jamais vou­lu écou­ter mon genre. Je sais bien que je suis une femme mais si j’en avais tenu compte, je ne serais peut-être pas par­tie pêcher, n’aurais pas fait d’auto-stop par­tout dans le monde. J’ai mis ça de côté. Et j’ai presque tou­jours tra­vaillé avec des hommes. En mer, la fra­ter­ni­té c’est obli­gé. Si on ne sup­porte pas cette pro­mis­cui­té, on débarque. La seule chose qui compte, c’est l’urgence de la sécu­ri­té, et le tra­vail, le tra­vail, le tra­vail. On n’a pas le temps de pen­ser au reste. Pour les sai­sons, je pense que cer­taines femmes n’auraient pas accep­té ou sup­por­té les condi­tions dans les­quelles j’ai vécu par­fois. Mais d’autres l’ont fait aus­si. Des fois, les gars pou­vaient être un peu vio­lents. Bon, je savais me défendre, dépas­ser les choses, pas tou­jours les prendre au pre­mier degré. Il faut aimer : c’était comme une famille.

Vous avez aus­si exer­cé des métiers soli­taires, comme celui de ber­gère en haute mon­tagne. L’expérience du tra­vail est alors, on ima­gine, radi­ca­le­ment différente…

« Oui, le tra­vail fait mal au dos, on est pliée en deux, mais la vigne c’est du vivant et cha­cun de ses bour­geons est important. »

On m’a plu­sieurs fois trai­tée de maso­chiste parce que je parle sou­vent de com­bat. Mais j’aime cette notion de lutte, de dépas­se­ment, d’accomplissement. Peut-être que l’accomplissement ne peut pas naître dans la dou­ceur ? Je ne sais pas. Bon, j’ai aus­si été auxi­liaire de vie et, là, je n’étais ni com­bat­tante, ni vio­lente ! Au contraire. Mais le com­bat, ce n’est pas se détruire, c’est plu­tôt se don­ner à fond, sen­tir son corps tel­le­ment vivant, tel­le­ment puis­sant… Comme je le dis pour la pêche, après le deuxième souffle il y en a un troi­sième, puis un qua­trième, puis un cin­quième… On est presque invin­cible. Jusqu’au jour où ça casse. Quand on est ber­gère, on n’est pas seule, on est avec toute une famille. Il y a le trou­peau, ce sont des enfants, des enfants et des enfants… Qu’il ne leur arrive rien sur­tout ! À la fin de la sai­son, on se sent avec les bêtes, un lien s’est créé, qui est beau. J’ai gar­dé long­temps dans les Alpes-de-Haute-Provence, ma cabane était à 2 400 mètres d’altitude. Solitude. Ce que j’aimais et redou­tais, c’était la mon­tagne elle-même. C’est vrai qu’avant de par­tir, je n’étais pas jolie à voir. Je me deman­dais : « Est-ce que je revien­drai ? » C’était comme par­tir au bout du monde. Pas de réseau télé­pho­nique en cas de pépin… Il y avait des chutes de pierres sans arrêt, j’avais la charge de toutes ces bêtes, de toutes ces filles, des chiens aus­si. À la fin de ma for­ma­tion de ber­gère, je gar­dais un trou­peau de 700 ou 800 bêtes. Pour ma der­nière mon­tagne, j’en avais 1 300. Parfois on se dit qu’on n’au­ra pas la force, qu’on n’y arri­ve­ra jamais, il y a des bre­bis qui s’é­loignent, d’autres qui filent dans les barres rocheuses. Alors on les suit en cou­rant, en râlant, en pleu­rant. Ce qui était beau là-dedans ? Comme pour le retour de pêche, c’était de se dire « Je l’ai fait, les bêtes sont en bonne san­té ». On est pas­sés par toutes ces épreuves et on retourne vers le monde des Terriens. On a l’impression de reve­nir de si loin, et qu’on a gagné quelque chose, avec et grâce à notre corps.

Et en ce moment, quel tra­vail exercez-vous ?

Je tra­vaille un petit hec­tare de vigne, ces der­niers mois. Le same­di ou le dimanche, même sous la pluie, j’y suis. Les gens du vil­lage, quand ils passent, doivent se dire que je n’ai pas d’amis, mais quel bon­heur ! Qu’est-ce que j’y suis bien ! Je par­lais au chien par­fois et je lui disais « Regarde comme il fait beau le chien ! », alors qu’il pleu­vait à tor­rent. Mais j’avais l’impression d’être dans quelque chose de très beau et très fluide. Le fait d’être dehors. J’avais aus­si des écrits à tra­vailler. Le tra­vail peut être sem­blable à une médi­ta­tion, les mains étant occu­pées par une tâche bien pré­cise qui fait cir­cu­ler le « flux ». Oui, le tra­vail fait mal au dos, on est pliée en deux, mais la vigne c’est du vivant et cha­cun de ses bour­geons est impor­tant. Au moment de la taille, le sar­ment qu’on va gar­der va influer sur la direc­tion de la pousse. Je me disais c’est comme l’écriture, tout se rejoint. C’est ce qui est libé­ra­teur. L’éditeur a eu beau me dire « Catherine, l’i­déal est de se col­ler devant son bureau, huit heures par jour ou plus, il en sor­ti­ra bien quelque chose… », j’ai beau avoir essayé, non, par­fois il n’en sor­tait rien à part un entas­se­ment de mots qui pour finir étaient morts, figés. Il faut ce flux vital que l’ac­tion crée par­fois, sur­tout quand on tra­vaille dehors, quand le corps est occu­pé la tête peut pen­ser libre­ment. J’ai eu des années dif­fi­ciles avant la com­mande de ce der­nier texte. Je tra­vaillais des écrits devant l’ordi mais je n’avais plus confiance en mes mots, trop enfer­mée en moi. Il faut sor­tir de soi, parce qu’on est sa propre pri­son, la tête fait mal, il y a toutes ces choses qui tournent, qui tournent, il faut les déli­vrer. On a beau dire que la parole se libère en écri­vant, si on est trop coin­cée elle veut pas se libé­rer. Il faut trou­ver son exu­toire. Pour moi c’est la vigne.

[René Quillivic, La Vague, sans date]

Les tem­po­ra­li­tés du tra­vail et de l’écriture sont donc pour vous enche­vê­trées et pas for­cé­ment dis­tinctes. Est-ce que vous pre­nez des notes, dans ce « flux » ?

J’essaie de com­men­cer très tôt le matin. La nuit est très impor­tante parce que le cer­veau tra­vaille sans cesse. Au réveil on a une dis­tance par rap­port aux choses humaines, on peut être dans quelque chose de plus propre. Parfois il me faut pour­tant aller à la vigne. Mais écrire très tôt me per­met de retrou­ver, pour­suivre mon fil. Pour l’essai que je viens de rendre [qui fera l’objet d’une publi­ca­tion dans quelques mois, ndlr], c’est à la vigne que, tout d’un coup, depuis l’extérieur, me par­ve­naient des choses. Le retour des grues cen­drées par exemple. Quand elles passent, il y a cette espèce de décro­che­ment du cœur et on repense à tous les oiseaux qu’il y a eu dans notre vie. Tout d’un coup, d’infimes petits liens se nouent, se dénouent. Je pense qu’il faut tou­jours sor­tir de soi, c’est en nous que se construit l’é­crit. J’ai essayé de m’enfermer des jour­nées entières devant l’ordi, c’était épou­van­table. J’en pleu­rais. Je fumais, je fumais… Ce besoin, cette urgence vitale du dehors ! Après la paru­tion du Cœur blanc, j’avais une de ces gueules ! À cause de l’enfermement, ce tour­ment de la lutte entre le corps et la tête. J’ai la chance d’avoir la vigne, et de la tra­vailler seule. Elle m’a per­mis d’écrire un nou­veau texte. Enfin je n’étais pas seule, j’étais avec le chien, mais il n’y avait pas d’humains, pas de dis­cours. C’était une grande, belle soli­tude, avec uni­que­ment les bruits de la nature, le vent, le ciel ouvert…

Est-ce que le moment de l’é­cri­ture s’apparente pour vous à un labeur ? À une peine ?

Moi je trouve ça très dur et très dou­lou­reux. Mais quand il y a le flux, la vague vous porte. Le maté­riau, les images m’arrivent. Il faut que je les sente. Il y a des moments extra­or­di­naires où on est dedans. Et le grand bon­heur, quand on tra­vaille un texte pen­dant long­temps, c’est lors­qu’il com­mence à exis­ter, qu’il se détache peu à peu de vous. On se dit : « Tiens, c’est un peu éton­nant, il a pris une autre direc­tion. » On n’est pas maître de tout, on est par­fois éton­né de là où il vous mène. Ça, c’est le moment magique qui donne énor­mé­ment de joie. Puis c’est comme un effet boule de neige : le texte va de mieux en mieux se faire parce qu’il se libère de vous. Puis le texte existe, il est entre nos mains, on le polit. Je joue avec les vir­gules, la ponc­tua­tion, le rythme quoi. Je récite beau­coup, j’aime la voix. Parfois je suis hors d’haleine, je m’amuse à chan­ger un détail et c’est le sens de la phrase toute entière qui se trouve modi­fié. Mais oui, que de peine pour peut-être y par­ve­nir, à ce jeu, cet état, ce sen­ti­ment… d’ac­com­plis­se­ment ? De rien peut-être. Si ça se trouve c’est nul. On est si seul dans sa tête qu’il n’y a pas de recette, pour rien. On est si seul.

Pour vos deux romans et même avant ça, de quelle manière avez-vous écrit ?

« À 20 ans, j’avais déci­dé d’ar­rê­ter de lire. C’est moi qui ferais les livres. Surtout, j’avais peur de vivre par pro­cu­ra­tion, tel­le­ment la lit­té­ra­ture c’est puissant. »

Depuis toute petite, j’aime écrire et racon­ter. Mon pre­mier manus­crit, je devais avoir 18 ans. Je dor­mais dehors, en voyage au Sri Lanka, et on me l’a piqué. J’ai essayé de le refaire, je l’aimais bien. Après, j’en ai com­men­cé beau­coup d’autres que je n’ai pas ache­vés. C’était pour moi des moments de liber­té. Quand j’avais fini une sai­son, que j’étais enfin tran­quille, sou­vent je m’isolais dans la vieille mai­son de famille du Médoc, j’avais une machine à écrire et je tapais, je tapais dans la mai­son gla­cée. C’était mon bon­heur, je n’espérais pas que ce soit édi­té, jamais. Je me disais que si ça arri­vait, je per­drais sans doute ma liber­té, je devrais entrer dans le monde…

« Je n’ai pas envie de par­ler d’idées mais de sen­sa­tions », dites-vous. Il y a ces traces maté­rielles, ces cahiers dans les­quels vous pui­sez, mais au-delà d’eux, com­ment tra­vaillez-vous avec les sen­sa­tions dans l’écriture ?

Parfois l’image me vient d’un coup, par le res­sen­ti jus­te­ment. Pour Le Cœur blanc, un soir, dans la mai­son, j’avais tra­vaillé tout le jour, j’étais fati­guée, je fumais devant la che­mi­née, il fai­sait froid. Et il y a eu l’orage dehors et l’image m’est appa­rue. Celle du per­son­nage Césario qui marche dans la mon­tagne : Mounia est en train de déchar­ger la remorque de lavande, elle voit la plaine, le ciel qui s’obscurcit, cette ombre clau­di­cante. Des fois c’est comme si les choses étaient endor­mies quelque part et elles sur­gissent, ou plu­tôt elles se dévoilent. Alors j’ai écrit cette scène. Assez sou­vent l’image me vient comme ça : une vision de la scène. Par un son, des odeurs bien sûr, l’u­ni­vers sen­sible, sen­si­tif. Le retour des grues cen­drées l’autre jour, j’en ai eu les larmes aux yeux et j’ai pu l’é­crire au soir tant il réson­nait dans moi. Pas mal de mes écrits sont liés à des choses de ma vie. C’est une base mais il faut en faire autre chose. Parler de plus que sa propre vie. À 20 ans, j’avais déci­dé d’ar­rê­ter de lire. C’est moi qui ferais les livres. Surtout, j’avais peur de vivre par pro­cu­ra­tion, tel­le­ment la lit­té­ra­ture c’est puis­sant. Et puis je me suis dit encore, si j’ai pas le temps, eh bien c’est ma vie qui sera le livre. Quand je suis arri­vée à Kodiak [plus grande île de l’Alaska, ndlr] et que j’ai com­men­cé à pêcher, je me suis dit : « Je suis dans le livre. » Ces his­toires que je raconte font par­tie d’un livre qui est ma vie, mais j’ai­me­rais qu’elles aient une signi­fi­ca­tion plus grande. J’ai eu la chance de connaître tant de choses. Enfin, on connaît tous tant de choses ! J’ai connu des choses ter­ribles, très tristes aus­si, et je me dis qu’il fal­lait en par­ler. Parce que c’est grave. En même temps, je sais que ça n’a aucune impor­tance devant les siècles ou devant les étoiles. C’est ce que j’aime. Comme j’aime le mot « écri­vain ». Ce sont des « écrits vains » : au final le vent les empor­te­ra. Mais il y a ce bon­heur éphé­mère de sen­tir qu’on a fait revivre un ins­tant des gens dont on ne parle pas. On a fait par­ler des sans-voix. Ou du moins essayé. Et ten­té de dire un peu de la beau­té du monde ?

[Jean Morin, Les Sardiniers, Quiberon, sans date]

Dans vos romans, il vous tient donc à cœur de faire une place à ces gens que vous avez côtoyés dans le tra­vail, que ce soit les pêcheurs en Alaska ou les sai­son­niers agri­coles en France. Comment recon­vo­quez-vous les figures de per­sonnes rencontrées ?

Ce sont, d’une cer­taine manière, des per­son­nages que j’ai croi­sés ou qui leur res­semblent par leur côté extrê­me­ment tou­chant. Ils sont dans une espèce de chute, qui pour­rait par­fois sem­bler comique ou déri­soire, poi­gnante. Tragique et poé­tique, un peu comme du Beckett. Alors oui, j’ai envie de par­ler d’eux. Mais je ne veux pas être dans l’idée, il y a énor­mé­ment de manières d’exprimer les choses. Ne pas se perdre dans les mots. À un moment, pour Le Grand Marin, j’étais seule dans ma cam­pagne, j’avais un peu de mal à finir. Je suis allée à Manosque, j’avais un chan­ge­ment à la gare Saint-Charles à Marseille. Je vois un homme, peut-être à la rue. Ses narines fré­mis­saient quand il res­pi­rait. Il fixait la mer, il avait quelque chose de brû­lant dans ses yeux, qui venait de si loin. Tout d’un coup je me suis dit : « Évidemment, c’est lui le grand marin ! » Une autre année, c’était Lucia, le per­son­nage de la louve noire. Je l’ai vue à Marseille aus­si, sur le parvis. 

À pro­pos des gens que vous avez connus et qui ont don­né nais­sance à vos per­son­nages, vous avez dit « ne pas leur faire de cadeau » dans les livres. C’est-à-dire qu’ils ne sont pas, selon vous, des « vic­times ». Des mar­gi­naux, des déra­ci­nés, des fous, peut-être, des gens qui se brûlent par­fois dans l’alcool — mais pas des victimes. 

Quand j’étais sai­son­nière, il y avait une impres­sion de liber­té parce qu’on était des mar­gi­naux. On était « hors » des normes, des rails, oui. Et la liber­té ça a un prix : c’est par­fois mou­rir sans nom et sans voix au bord du che­min. On peut se cas­ser la figure, on peut se trom­per. La liber­té c’est jus­te­ment ça aus­si, quand c’est ouvert. L’excès, dans le tra­vail ou dans l’alcool, il tente de répondre, de com­bler un manque, un grand vide. Rosalinde le dit dans Le Cœur blanc : on cherche un com­bat mais on n’a plus de com­bat qui nous appar­tienne. Alors on uti­lise ceux qui sont venus avant. Je pense qu’on manque d’accomplissement, et une bête en nous est furieuse. Le grand pro­blème exis­ten­tiel de l’être humain ? Un sen­ti­ment d’absurde. Avant, le tra­vail c’était davan­tage la sur­vie, on ne pou­vait pas trop se poser la ques­tion, c’était ça ou cre­ver. Je sais pas… Mais tant de siècles pour qu’on soit encore en train de cher­cher, c’est bizarre. Est-ce qu’on va finir par trou­ver ? À la cam­pagne, ici, je me sens mar­gi­nale, c’est vrai. J’ai une voi­sine que j’aime beau­coup, qui a tra­vaillé à la vigne depuis ses 14 ans. Mes his­toires de livres, le fait d’être pas­sée dans le jour­nal, je sens que ça la dérange parce que pour elle, je suis un peu une far­ceuse. Une va-nu-pieds ? Le tra­vail ne signi­fie pas la même chose pour elle et moi.

Pourquoi la clé, alors, ne serait pas de mener un com­bat col­lec­tif, poli­tique, en alliant toutes ces forces indi­vi­duelles qui par­fois s’épuisent en res­tant seules ? 

« Oui, un com­bat com­mun, accom­plir quelque chose ensemble. Je crois qu’on en est loin, que la conscience poli­tique est déli­tée mais oui, il faut se battre. »

J’ai eu la chance de gran­dir dans une famille qui était de tous les com­bats : syn­di­ca­listes, luttes éco­los, pour les tra­vailleurs immi­grés, « 9 heures par jour c’est trop », com­bats poli­tiques, contre Franco, Pinochet… Je me sou­viens, on allait dans les grandes rues la nuit. Que c’était beau ! Il y avait cette femme sur le podium, une Américaine, qui hur­lait « Solidarité ! » Et aus­si le Larzac, avec mes sœurs, mes parents. Et ces grandes affiches de l’usine Lip à la mai­son. Quand on est par­tis vivre dans le Sud, vers Martigues, je me suis ren­du compte qu’il n’y avait pas cette conscience poli­tique par­tout. Quand je disais à mes copines d’école que j’allais en manif contre les raton­nades à Marseille, elles me disaient : « Mais tu es com­plè­te­ment folle ! » Je pense qu’il est vital de se battre pour bien davan­tage que soi-même, ses petits avan­tages. Sinon ça ne mène qu’à consom­mer la vie, la nôtre et celle des autres. Oui, un com­bat com­mun, accom­plir quelque chose ensemble. Je crois qu’on en est loin, que la conscience poli­tique est déli­tée mais oui, il faut se battre.

L’écrivain Joseph Ponthus disait, à pro­pos de son livre À la ligne : « L’usine a enle­vé tout le gras de mes textes. » Dans les vôtres, peut-être parce qu’ils décrivent des tra­vaux qui se font dehors, sous le ciel ou sur la mer, on a l’impression de textes en chair, de textes pleins. Mais vos romans ont en com­mun avec l’écriture de Ponthus une cer­taine âpre­té, quelque chose de direct. 

Quand j’ai écrit Le Grand Marin, j’étais encore plon­gée dans les États-Unis. J’ai pêché pen­dant dix ans à Kodiak. J’empruntais des livres à la biblio­thèque. J’aimais la lit­té­ra­ture amé­ri­caine parce que je la trou­vais phy­sique, dans l’urgence. J’ai lu beau­coup, romans, essais, poé­sie, des nou­velles écrites par des Amérindiens. À la fin j’écrivais mes car­nets en anglais — enfin, en amé­ri­cain. C’est une langue du direct, comme sen­tir la vie tout de suite. Pour Le Cœur blanc, j’é­tais ren­trée en France depuis long­temps donc cette influence du lan­gage s’était éloi­gnée. Quand j’ai eu la chance d’avoir le contrat pour Le Grand Marin, je me suis dit que j’allais peut-être perdre ma liber­té. J’ai accep­té, me disant que si le livre mar­chait rien qu’un peu, je pour­rais en écrire d’autres. Mais un suc­cès pareil ! Que veux-tu faire après ça ? L’éditeur m’a confié un jour son inquié­tude « Certains disent qu’il ne pour­ra y avoir d’autres livres de vous après celui-là. » À quoi j’ai répon­du « Écoutez — il savait que j’étais un peu extrême —, si, à cause du Grand Marin, je ne peux plus écrire, je me tue tout de suite et c’est réglé ! » Bref, il fal­lait abso­lu­ment arri­ver à faire le deuxième livre. J’ai eu du mal, je savais qu’on m’attendait au tour­nant. « Surtout, il faut que ce soit dans le même style. » Comment écrire de manière nor­male lors­qu’on exige de vous, ou espère, une ligne d’é­cri­ture ? Je suis contente d’a­voir réus­si à faire Le Cœur blanc. Le style n’est pas tout à fait le même, certes.

[René Quillivic, La Vague, 1929]

Quel est votre rap­port à l’éditeur, jus­te­ment ? C’est un patron ? 

Anne Vallaeys était venue me voir pour l’écriture d’un livre sur le retour du loup. Elle a envoyé quelques feuillets d’un pro­jet de synop­sis que j’avais à une mai­son d’é­di­tion. J’étais une ber­gère vieillis­sante qui fai­sait plus pitié qu’envie, déso­cia­li­sée, j’avais peur du monde humain, une sorte de fier­té à vivre en dehors. On vivait en cara­vane avec mon com­pa­gnon. Et tout d’un coup ce contrat me tombe des­sus ! Il a fal­lu aller à Paris, ren­con­trer des jour­na­listes, la télé, l’hor­reur quoi. Mais après, il m’est venu une forme de recon­nais­sance incroyable pour l’é­di­teur. Je dis par­fois qu’il était deve­nu Dieu le père pour moi ! (rires) Le pro­blème, c’est que ça m’a foi­rée pen­dant des années, attendre un signe de l’éditeur en essayant d’écrire, pour lui… Ça me dérange d’appartenir. L’écriture, c’est être libre. Et ça a été très mau­vais cette espèce d’asservissement dans lequel je me suis empê­trée. Lui n’y est pour rien bien sûr. J’arrivais plus à rien faire. Heureusement, quelque chose semble s’al­lé­ger en moi avec ce nou­veau livre. Je pense qu’il ne faut pas que l’éditeur ait trop de poids sur vous, à moins qu’on ne craigne pas ce milieu. Mais je m’y sens étrangère. 

Il y a ces motifs qui reviennent beau­coup dans vos romans : le feu, la brû­lure que pro­voque ou qu’ac­com­pagne le tra­vail. Dans son livre Pompières et pyro­manes, Martine Delvaux écrit ceci : « Chercher toutes les fois où ça a brû­lé devant, à côté, tout près ou très loin ou à l’intérieur de moi. Dans mon cœur, dans mon ventre, dans ma tête. […] Éteindre les feux qui consument, qui étouffent. Souffler dou­ce­ment sur ceux qui ali­mentent pour les aider à res­pi­rer. Et par­fois, se pla­cer au centre de l’âtre, bien droite sur le bûcher. » Pour vous, est-ce que tra­vailler et écrire sont des manières de « se pla­cer au centre de l’âtre » ? 

J’aime cette image, oui. L’été, dans les tra­vaux, je res­sen­tais cette ivresse de la brû­lure par l’ex­té­nue­ment. Brûler encore, brû­ler jusqu’au bout, dans la flamme du monde — se consu­mer uni­que­ment pour soi-même est une tor­ture. Mais être dans le feu, oui. Il y a tou­jours cette quête de l’u­ni­té. On peut la cher­cher dans la paix ou la médi­ta­tion, ou dans une espèce d’extase. Comme je l’é­cris dans Le Cœur blanc, « L’été est là qui me lacère de par­tout avec ses langues de feu »… J’ai l’impression que c’est ça l’été. Parfois quand je marche sur la route dans une ter­rible cha­leur d’été, je crois entendre et sen­tir le bra­sier, et moi dedans. Il y a quelque chose de ter­ri­fiant et de sub­ju­guant. Quand je vois la lumière ardente, les lézards sur la pierre chaude, j’aimerais être une cou­leuvre qui arrête de cou­rir et enfin se brûle au soleil. Enfant, j’étais très mys­tique. Ça m’est res­té. Mais il faut que ce soit le corps qui vive la pas­sion. La tête, j’ai pas trop confiance. Il y a peut-être quelque chose d’ex­ces­sif dans mon approche du monde, mais c’est pour atteindre l’inaccessible, la splen­deur, le bon­heur d’être et de sen­tir. Sans doute un fan­tasme de l’unité per­due, une volon­té de me confondre avec, être ce que je fais, sor­tir des laby­rinthes de l’esprit, du bocal. Pour cer­tains, la pri­son c’est le corps. Pour moi c’est la tête. Quand j’étais très jeune, que je com­men­çais à voya­ger, j’aimais Tagore. L’amour, aimer le monde et l’étreindre. Vouloir faire un avec lui. Il y avait déjà cette ques­tion de la fusion impos­sible ! Il faut se créer un peu d’ultime, notre vie en manque. J’aime le tra­vail phy­sique, je suis hyper­ac­tive, et quand on est hyper­ac­tif c’est aus­si dans la tête, tout jaillit sans cesse et veut explo­ser. Le corps libère. Comme dit Lili dans Le Grand Marin, « Pour nous la volup­té de l’exténuement »… Redevenir enfin une seule créa­ture, la tête et le corps réconciliés.


[Lire le sixième et der­nier volet | Gérard Lemaire : les deux vies d’un poète ouvrier]


Illustration de ban­nière : Henri Amédée-Wetter, Creuse, ber­gère et ses mou­tons, 1920


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