Osons Causer : « On est à la fin de la vague néolibérale »


Entretien inédit pour le site de Ballast

« La poli­tique, c’est chiant. C’est chiant parce qu’on ne parle que de trucs com­pli­qués que per­sonne ne com­prend », expliquent les trois jeunes hommes du vidéo­blog Osons Causer. Ils décident donc, en juin 2015, de la rendre aimable, voire dési­rable ; le sup­port est acces­sible (la vidéo), le lan­gage concret et le ton ludique : la poli­tique entre amis, autour d’une table ou d’un verre. La gauche cri­tique, estiment-ils, a pas­sé trop de temps à se regar­der le nom­bril dans ses essais et ses col­loques éli­tistes — lais­sant par la même occa­sion les cou­rants natio­na­listes prendre leurs aises aux quatre coins de la toile. Bilan pro­vi­soire : une ving­taine de vidéos, plus d’un mil­lion de vues et des thé­ma­tiques abor­dées aus­si diverses que la crise grecque, le jiha­disme, la répres­sion des syn­di­cats et la loi El Khomri. Nous croi­sons par hasard Ludo (il y tient : per­sonne ne l’appelle Ludovic), Stéphane et Xavier lors de la Nuit Debout, place de la République, à Paris ; curieux d’en savoir davan­tage sur le pro­jet poli­tique que porte le trio, nous leur pro­po­sons un entre­tien. C’est sitôt chose faite, dans un café (une pré­ci­sion : l’ou­vrage #OnVautMieuxQueCa, auquel ils ont par­ti­ci­pé, n’é­tait alors pas paru).


oc1 Vous pro­po­sez une lec­ture, une ana­lyse et un décor­ti­cage de l’actualité. D’autres Youtubeurs donnent à entendre des alter­na­tives poli­tiques. Est-ce une direc­tion qui vous inté­resse également ?

Stéphane : On réflé­chit à l’idée d’une Assemblée consti­tuante, dans une pers­pec­tive citoyenne. On a même un bou­quin qui était en cours d’écriture avant #OnVautMieuxQueCa. Le moment d’en par­ler ne s’est pas encore présenté.

Ludo : Dans tous les domaines — agri­cul­ture, éle­vage, éner­gie, macroé­co­no­mie, mon­naie, urba­nisme, école —, des pen­seurs et des acteurs ont déjà des solu­tions pour pro­po­ser des alter­na­tives pour demain. Il manque juste une stra­té­gie ration­nelle. Il nous faut un peu de croyance col­lec­tive, un élan par­ta­gé dans une même séquence d’action.

Stéphane : C’est d’autant plus dif­fi­cile que nous sommes dans une période de pro­fond dégoût du poli­tique. Ce dégoût touche aus­si bien ceux qui s’y sont inves­tis mais ont été déçus que ceux qui n’ont pas essayé. Selon nous, une stra­té­gie poli­tique trop « bour­rine » n’entraîne pas les gens. On en cherche une qui soit capable d’in­clure le plus de per­sonnes pos­sible — plu­tôt qu’une stra­té­gie plus pous­sée en terme de forme, plus pure, plus parfaite.

« Partir des places publiques fait donc sens. Les gens se font face, alors, et agissent ensemble. »

Ludo : Il y a déjà des cen­taines de solu­tions sur les bonnes échelles de déci­sion, l’inclusion de la France dans le monde, la pla­nète, l’écologie… Ce qui compte, c’est com­ment mettre en branle nos rêves et nos dési­rs pour faire face à nos peurs. Ayant assez d’indétermination et de charge réelle, la Constituante nous paraît être la bonne échelle pour chan­ger les règles et prendre en consi­dé­ra­tion toutes ces solu­tions latentes. La Constitution per­met de refaire peuple : tout en se mon­trant très pré­cise quant aux droits, elle n’empêche pas l’indétermination. À titre d’exemple, on peut citer la consti­tu­tion véné­zué­lienne de Chávez, ver­sion 1, qui com­por­tait notam­ment l’accès au droit à la san­té et à l’éducation pour tous. Mais ce qui compte, c’est l’é­lan col­lec­tif. En tant qu’hégé­lien, je suis convain­cu que toute déter­mi­na­tion est néga­tion. Il faut res­ter indé­ter­mi­né, inclu­sif, bien­veillant ; il faut mon­trer que la recon­quête col­lec­tive nous semble être une bonne issue — tout en étant pen­sé dans une logique stratégique.

Stéphane : L’inclusion doit se faire en amont et en aval, avec le peuple à la base de cet élan. C’est la condi­tion déci­sive pour redon­ner aux gens l’envie de prendre le temps, comme en 2005 [année du réfé­ren­dum sur le Traité consti­tu­tion­nel euro­péen, ndlr], de se sai­sir de la poli­tique et du pro­ces­sus consti­tuant. Partir des places publiques fait donc sens. Les gens se font face alors et agissent ensemble. Les actes de soli­da­ri­té active y sont pri­mor­diaux car il faut d’abord gérer la misère que crée la ville. La copré­sence, sur place, per­met de mon­trer que les gens peuvent. Par le face à face avec l’autre et avec le concret, elle per­met aus­si de s’op­po­ser de manière moins vio­lente lors­qu’on dis­cute de « grands débats » comme, par exemple, le reve­nu de base ou le salaire à vie. La co-action doit pri­mer et cela peut se faire à tra­vers un pro­ces­sus constituant.

Mais vou­loir réécrire la Constitution, n’est-ce pas en soi clivant ?

« Des signi­fiants comme « droite » ou « gauche » sont à dépas­ser car la dif­fé­rence n’est, aujourd’­hui, plus très claire. »

Ludo : Il faut réflé­chir à la manière de mettre en place des affects et des signi­fiants comme « la démo­cra­tie », « l’intérêt géné­ral », « la jus­tice », qui sont déjà construits et assez forts pour mobi­li­ser. Bernard Friot évoque sou­vent le déjà-là pour par­ler de nos ins­ti­tu­tions de pro­tec­tion sociale et du sala­riat, mais il y a aus­si un déjà-là d’ordre sym­bo­lique. C’est ce que dit Bourdieu dans ses cours « Sur l’État » et dans sa confé­rence « Un fon­de­ment para­doxal de la morale » : on peut uti­li­ser des signi­fiants répu­bli­cains contre cette République que l’on cri­tique. Par exemple, Liberté, Égalité, Fraternité. Ou le « Peuple sou­ve­rain ». On peut uti­li­ser ces signi­fiants pour pié­ger les domi­nants à leur propre jeu et pour per­mettre de rame­ner à une pers­pec­tive d’émancipation des gens qui s’en sont éloi­gnés. Les habi­tudes socio-élec­to­rales ont la vie dure. On vote sou­vent comme le fai­saient nos parents. Des signi­fiants comme « droite » ou « gauche » sont à dépas­ser car la dif­fé­rence n’est, aujourd’­hui, plus très claire. Si on osait une bou­tade, on pour­rait dire qu’il y a une part de véri­té dans les délires de Bayrou ou de Macron. L’idée est de contour­ner ces signi­fiants dévoyés en reve­nant aux signi­fiants abs­traits anté­rieurs (liber­té, éga­li­té…) avec les­quels tout le monde est d’ac­cord. L’enjeu est alors de se ser­vir de ces signi­fiants pour pro­po­ser une voie concrète — fon­dée sur les vécus et les situa­tions réelles des gens — qui ait l’air rai­son­nable et jolie. Selon nous, c’est un pari qui peut mar­cher. Ces consi­dé­ra­tions stra­té­giques et idéo­lo­giques pro­posent une issue mêlant prin­cipes et affects. Mais comme tout ce qui relève des croyances col­lec­tives, c’est plein « d’ir­ra­tion­nel ». C’est un pari qui peut tout à fait échouer. Mais ça nous semble être une autre manière de pen­ser une alter­na­tive que celle pro­po­sée par les logi­ciels clas­siques « droite » et « gauche », qui ne font plus grand sens.

C’est une stra­té­gie à la Pablo Iglesias, de Podemos, non ?

Ludo : Un chouïa, mais adap­tée à la France car la gauche fran­çaise a bien plus de réseaux ins­ti­tu­tion­nels et d’organisations. La République est plus sclé­ro­sée par le régime pré­si­den­tiel mais elle per­met, para­doxa­le­ment, de mettre en place un pro­ces­sus consti­tuant plus aisé, avec la pos­si­bi­li­té de gou­ver­ner par décrets. Mais je ne connais rien du tout au logi­ciel théo­rique de Podemos — j’ai dû, dans ma vie, lire deux articles sur eux. Je n’ai jamais lu Laclau [l’un des réfé­rents intel­lec­tuels de Podemos, connu, notam­ment, pour sa réha­bi­li­ta­tion du popu­lisme, ndlr]. Mes fré­quen­ta­tions intel­lec­tuelles sont Marx, Bourdieu, Rancière, Lacan, Hegel, Spinoza, Lordon et Slavoj Žižek.

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Stéphane et Ludo, par Stéphane Burlot

En matière de dif­fu­sion des idées, sur Internet, la gauche a pris un grand retard sur l’extrême droite. Ce constat vous a‑t-il conduit à agir en conséquence ?

Stéphane : Il y a dix ans, après avoir vu des vidéos d’Alain Soral, je me suis dit qu’il avait trou­vé une posi­tion de parole convain­cante pour tou­cher un grand nombre de gens. Il a une manière effi­cace de par­ler de poli­tique : il faut donc faire contre­poids. Osons Causer a trois veines ori­gi­nelles, toutes issues de nos expé­riences propres : la las­si­tude de ces gens qui vou­laient une réflexion cri­tique, avec des alter­na­tives, sur la lec­ture du monde ; le pro­jet de Xavier d’une chaîne de vul­ga­ri­sa­tion des sciences sociales ; la réflexion de Ludo sur une stra­té­gie constituante.

« L’extrême droite avait un coup d’avance sur la gauche, qui se limi­tait à faire des tracts et des jour­naux, qui res­tait dans des sché­mas d’actions très classiques. »

Ludo : L’extrême droite mène une stra­té­gie d’occupation idéo­lo­gique du Web et de contour­ne­ment des médias tra­di­tion­nels, qui la black-lis­taient et étaient détes­tés par son public. Il y a un double « effet Kiss Cool » dans ce contour­ne­ment : il lui per­met de dénon­cer les médias, de deve­nir bouc émis­saire et de construire patiem­ment un endroit où la concur­rence n’existe que peu. L’extrême droite avait un coup d’avance sur la gauche « nor­male » ou « cri­tique », qui se limi­tait à faire des tracts et des jour­naux, qui res­tait dans des sché­mas d’actions très clas­siques. La gauche, à cause de ses iner­ties, avait per­du le pari du Web. C’est une bonne vieille hys­té­ré­sis [dans la socio­lo­gie bour­dieu­sienne : main­tien des habi­tudes et dis­po­si­tions en dépit d’un chan­ge­ment de sta­tut, ndlr]. Alors que l’en­jeu gram­scien d’une bataille cultu­relle dans les idées était soli­de­ment par­ta­gé à gauche, depuis 25 ou 30 ans, la gauche de la gauche n’a pas bou­gé : elle est res­tée dans le jour­nal, le tract, Mermet et le bou­quin. Cette stra­té­gie cultu­relle pou­vait fonc­tion­ner lorsque la gauche avait la main sur les média­tions tra­di­tion­nelles que repré­sen­taient les sec­tions des par­tis poli­tiques, les syn­di­cats ou les asso­cia­tions. Elle a cepen­dant pris du plomb dans l’aile quand a com­men­cé le grand détri­co­tage social — sha­lom, Mitterrand ! Sans ces média­tions, le logi­ciel ancien n’avait plus accès aux esprits. À ce moment, l’extrême droite a été plus maligne.

Stéphane : Mais c’est aus­si un effet de posi­tion. N’ayant pas accès aux médias clas­siques, l’ex­trême droite avait d’autant plus inté­rêt à se sai­sir de ces nou­veaux outils.

Ludo : De notre côté, le cor­pus de cri­tique et de réin­for­ma­tion est ali­men­té depuis long­temps par chaque ini­tia­teur de #OnVautMieuxQueCa. Mais rêvons un peu : bien sûr que, dans plein de têtes, on pense à un pôle com­mun hié­rar­chi­sant l’information avec un site et des appli­ca­tions qui coor­donnent tous les flux de radio, télé, jour­na­lisme indé­pen­dant… D’autant plus que le modèle éco­no­mique d’Internet, du gra­tuit au payant, est à inven­ter. Monter un tel pôle de coor­di­na­tion sous-entend des frais colos­saux, une com­plexi­té extrême de coor­di­na­tion et de gou­ver­nance entre les acteurs et le besoin d’équilibrer sa ges­tion. D’ailleurs, Rezo et Bastamag sont des por­tails de réin­for­ma­tion à par­tir de la presse cri­tique et indé­pen­dante en ligne, par thèmes et par jour. On pour­rait ima­gi­ner ce type de hié­rar­chi­sa­tion de conte­nu pour des pod­casts radios, vidéos, docu­men­taires et évé­ne­ments. Les esprits sont prêts, mais il faut encore du temps que tous les acteurs se reniflent le cul et que la confiance soit là pour une mise en œuvre.

On assiste tout de même une droi­ti­sa­tion glo­bale de la France, non ?

Ludo : Pour ce qui est de l’hégémonie cultu­relle, il y a plein de choses qui sentent bon actuel­le­ment. On est à la fin de la vague idéo­lo­gique immense qu’a repré­sen­tée le tsu­na­mi néo­li­bé­ral des années 1970. Ce logi­ciel se basait sur des oppo­si­tions très effi­caces, comme les couples anta­go­niques modernité/archaïsme, mondialisation/local, ouverture/fermeture ; il a abon­dam­ment uti­li­sé les mathé­ma­tiques et les chiffres comme outils de légi­ti­ma­tion. Parmi les grands moments de cette séquence, on peut citer Reagan, le règne de la finance, puis l’OMC, l’Union euro­péenne… Selon nous, on assiste à la fin de cette vague, mal­gré le mini sou­bre­saut de 2001 des fau­cons néo­con­ser­va­teurs — avec le eux/nous du choc des civi­li­sa­tions et les nar­ra­tifs civi­li­sa­tion­nels… On est dans une fin de vague. Pour vous en convaincre, allons sur un ter­rain inat­ten­du. Tout ce qui est qua­li­fié de « bobo » — le green­wa­shing — peut être vu comme le germe d’une contre-hégé­mo­nie nais­sante : McDonald’s et Monsanto vont sur notre ter­rain pour vendre. Le Do It Yourself et les fab labs des bobos de Brooklyn sont la réac­tua­li­sa­tion d’une pra­tique ouvrière de bri­co­lage et de bon sens. Tout cela est pro­mu par une veine cultu­relle plus large. #OnVautMieuxQueCa, Osons Causer et plein d’autres élé­ments sont des dis­po­si­tifs contre-hégé­mo­niques qui arrivent. Il ne faut pas voir le verre trop vide.

Justement : quel est votre res­sen­ti par rap­port à Nuit Debout ?

« Nuit Debout, c’est une petite fenêtre qui s’ouvre dans une lignée d’autres petites fenêtres ouvertes depuis peu. »

Ludo : On parle en notre nom, comme expres­sion modeste de ce qu’on y voit, sans ima­gi­ner exer­cer un magis­tère sur quelque chose d’aussi hori­zon­tal et spon­ta­né. D’abord, c’est une petite fenêtre qui s’ouvre dans une lignée d’autres petites fenêtres ouvertes depuis peu : loi Travail, grosse manif’ lan­cée par des citoyens le 9 mars, #OnVautMieuxQueCa met­tant au cœur la légi­ti­mi­té de nos vies. La place n’est pas un « espace pri­vé » dans lequel on compte le nombre de visi­teurs — poke à Hidalgo ! Mais comp­tons à la louche, allez : il doit bien y avoir des dizaines de mil­liers de per­sonnes qui y sont pas­sées, ain­si que 300 000 per­sonnes qui suivent sur Périscope l’i­mage et le son moi­sis d’une AG dont il est dif­fi­cile de sai­sir pour­quoi et de quoi cha­cun parle. Des gens veulent voir ça, et sont contents que ça existe ; ils approuvent la réap­pro­pria­tion de l’espace public et défendent la place. Pour nous, l’enjeu prin­ci­pal est de conti­nuer à tenir cette place. On peut cher­cher à accé­lé­rer l’é­vo­lu­tion du mou­ve­ment et s’inquiéter des débou­chés, sur­tout après des années d’atonie et de déses­poir. C’est très com­pré­hen­sible. Mais regar­dons déjà ce qui se pro­duit sur la place : une envie de se connec­ter, de don­ner des coups de main, de par­ti­ci­per à des com­mis­sions ou de venir aux AG, de réflé­chir ensemble. Il faut lais­ser le temps à ces connexions de faire émer­ger des pro­po­si­tions et des débou­chés. Imaginez qu’on n’est même pas ins­tal­lés en per­ma­nence à République à Paris. Les autres Nuits Debout com­mencent seule­ment à faire les pre­miers nœuds de connexion, au départ du noyau dur qui va main­te­nir le phé­no­mène et le faire grandir.

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Stéphane et Ludo, par Stéphane Burlot

Qui sommes-nous pour exi­ger qu’elles portent déjà des reven­di­ca­tions ? Quand il y aura par­tout des Nuits Debout tenues ; quand, à République, il y aura un camp en per­ma­nence depuis plu­sieurs semaines ; quand il y sera mis en place un vrai sui­vi des com­mis­sions, un vrai tra­vail de com­pi­la­tion, avec un site qui coor­donne tout ça, là, on pour­ra à peu près voir ce qui a pu être dit, por­té, fait. Mais que peut-il en sor­tir de rai­son­nable main­te­nant ? Un sau­veur, un pro­gramme com­mun, une pri­maire ? Ce n’est pas de cela dont il s’a­git. Là, on doit recréer nous-mêmes quelque chose de nou­veau entre citoyens — et sans orga­ni­sa­tions, sans éti­quettes, sans élé­ments tra­di­tion­nels ou qui, à l’in­verse, effraient. C’est nou­veau, ce qui se passe. Laissons le temps à cette nou­veau­té. Occupons nos places ! Solidifions cette affaire parce que les connexions et les idées fusent. Ça va se mas­si­fier. On peut déplo­rer que ce soit pas mal blanc, culti­vé, mas­cu­lin — et encore, il y a de plus en plus de nanas ! —, bobo et plu­tôt mili­tant… mais c’est de moins en moins vrai à mesure qu’on tient la place ! Laissons-nous le temps de nous décou­vrir, de nous ren­con­trer, d’inventer. Fixer un objec­tif est pré­ma­tu­ré. Quand on fera la somme de toutes les idées, réflexions et actions, on se ren­dra compte de ce qu’on a gagné.

« Laissons-nous le temps de nous décou­vrir, de nous ren­con­trer, d’inventer. Fixer un objec­tif est prématuré. »

Stéphane : La rai­son même pour laquelle les per­sonnes sont scep­tiques découle de leur sen­ti­ment de dépos­ses­sion de leur pou­voir démo­cra­tique. Quand on ne savait pas quoi faire, on don­nait le pou­voir de pen­ser et d’agir aux intel­lec­tuels et aux hommes poli­tiques qui façon­naient des solu­tions avec leurs enjeux de par­tis. Ce qui est nou­veau, c’est que ce sont des citoyens, pou­vant être d’anciens mili­tants, venant comme tels, qui s’approprient direc­te­ment ce taf de manière col­lec­tive. Pour nous, c’est cela le sens poli­tique le plus fort de ce que l’on est en train de vivre sur cette place.

Ça a des airs d’auto-ins­ti­tu­tion de la socié­té, telle que décrite par le phi­lo­sophe Castoriadis

Stéphane : Exactement. C’est de l’auto-institution popu­laire à petite échelle.

Ludo : Il faut quand même noter la ten­ta­tive qui existe avec le M6R et la pla­te­forme de Mélenchon. Lui, il essayait de pro­mou­voir des pro­po­si­tions et d’impliquer les gens dans le débat, numé­ri­que­ment. Mais le pro­blème, c’est que c’est flé­ché et que les gens ne se ren­contrent pas. Les pro­ba­bi­li­tés d’inter-compréhension, d’échanges et même d’émergence spon­ta­née de thé­ma­tiques non pré­vues sont donc plus faibles. Ce qui est pro­po­sé avec l’auto-institution de Castoriadis est beau­coup plus vrai, fort et pro­fond. C’est l’a­van­tage des échanges en pré­sen­tiel, sur la place.

C’est une approche de bas en haut ? 

Ludo : Exactement. Après, il y aura tou­jours des enjeux sur ceux qui parlent davan­tage et qui amènent le plus de capi­tal cultu­rel. Prenez la grève géné­rale : c’est une super idée que plein d’intellos et de mili­tants connaissent. On peut dire : « Là, main­te­nant, c’est ça qu’il faut. » Mais n’importe qui — la per­sonne qui passe dans la rue, sans bagage intel­lec­tuel ni mili­tant —peut appor­ter, s’il entend une dis­cus­sion à ce sujet, d’autres pro­blé­ma­tiques : « Comment je fais après pour payer mon loyer, pour man­ger ? » Le mec intel­lo va lui répondre : « Moratoire pour le loyer, c’est ça qu’on va gagner. » Le pas­sant répond : « Mais attends, si on ne gagne pas, moi, je fais com­ment ? » Comment assure-t-on la caisse de grève ? Les idées les plus intel­los ont besoin du réel des gens, en matière de péda­go­gie et de réa­li­sa­tion pra­tique. Et ça, c’est un truc qui passe lar­ge­ment mieux en place publique que sur un forum numé­rique où tu te fais inon­der par quelqu’un. En place publique, tu peux avoir une inter­ac­tion directe avec d’autres formes de ver­ba­li­sa­tion pour empê­cher les effets de vio­lence sym­bo­lique qui existent mal­gré tout. Les intel­los y ont des res­sources, mais les non-intel­los aussi.

« Nous, on essaie de faire un truc encore plus grand public. Les gens com­mencent à cap­ter que leur parole est légitime. »

Stéphane : Il faut aus­si dégon­fler cette dif­fé­rence intello/pas intel­lo. On voit émer­ger, de plus en plus, l’i­dée que tout le monde devient intel­lo. Si tu n’as pas fait d’études, ou presque pas, il y a certes des petits cli­vages socio­lo­giques, mais on est de plus en plus nom­breux à pou­voir, si on le veut, aller se ren­sei­gner sur X, Y et Z, via Internet. Les canaux dif­fé­rents se déve­loppent. Tu as les canaux les plus légi­times aux yeux des intel­los et ceux plus « grand public ». Nous, on essaie de faire un truc encore plus grand public. Les gens com­mencent à cap­ter que leur parole est légi­time lors­qu’ils prennent leur vie en compte et la façon dont ils vivent leurs vies. Légitimes dans leurs réflexions. Et sans attendre qu’un mec leur dise quoi pen­ser, d’en haut.

Ludo : En AG, toute pro­po­si­tion théo­rique devrait avoir un ver­sant pra­tique. C’est ce pro­blème de coor­di­na­tion qui manque pour avoir un conte­nu poli­tique. D’où l’idée d’amener une veine stra­té­gique : on s’en fout des pro­po­si­tions abs­traites. En AG, on a un truc impor­tant qu’on aime­rait faire pas­ser mais on a jugé que ce n’était pas oppor­tun de nous impli­quer à fond dans la Commission Démocratie — afin de pou­voir avoir un autre rôle sur cette place. En clair : on pense que ce serait bien que l’AG ne se déter­mine pas trop. Voter des trucs, sur­tout en amont, cela nous parait trop tôt — et même excluant. Il y a des pro­cé­dés pour ça ; il y a des tech­niques d’AG qui ont été expé­ri­men­tées à Occupy (qui, au lieu de vali­der a prio­ri, cen­surent a pos­te­rio­ri). Chaque com­mis­sion rend compte de ce qu’elle a fait tous les trois jours. Des gens s’opposent. S’il y a une « croix » (oppo­si­tion radi­cale) dans l’Assemblée, on com­mence à dis­cu­ter ; s’il y en a plein, on fait dix minutes de tour de parole. Ainsi, on garde le foi­son­ne­ment des ini­tia­tives. Et c’est plus libre, plus opé­ra­tion­nel ; ça évite les tunnels.

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Xavier, Stéphane et Ludo, par Stéphane Burlot

Stéphane : Et ça per­met aux gens de dis­cu­ter en avance, et pas en méga grande AG où c’est hyper chaud de prendre la parole — car ça fait peur. Discutons et ten­tons des trucs en amont, dans des petits groupes. Il faut orga­ni­ser la place et les moda­li­tés démo­cra­tiques, mais s’il y a de plus en plus de gens qui viennent et se disent « Moi, j’ai envie de dis­cu­ter de ça », puis qui se posent avec trois potes, mettent une petite pan­carte et com­mencent à dis­cu­ter, c’est génial ! Si Nuit Debout doit s’auto-instituer, et qu’on est tous légi­times pour réflé­chir, c’est ce qu’il faut faire. Ça ne va rien chan­ger de sta­tuer « Est-ce que l’AG de Nuit Debout veut le reve­nu de base ? ».

Ludo : Il nous semble qu’en Espagne, aux États-Unis, en Turquie, dans les occu­pa­tions de places, ils sont allés vers cette voie. Avec plu­sieurs espaces d’expression per­ma­nente. Pour cela, il faut tenir le camp et répondre à des enjeux. Il faut prendre du temps.

« Si on veut pou­voir un jour démo­cra­ti­que­ment chan­ger les choses, il va fal­loir qu’on dis­cute et qu’on puisse se convaincre. »

Stéphane : On pense aus­si qu’on devrait, sur la place, accueillir des gens avec qui la majo­ri­té n’est pas d’accord. On n’en a rien à foutre qu’il y ait des conspi­ra­tion­nistes et des confu­sion­nistes ; de quoi on a peur ? Est-ce que les gens sont débiles ? Si on veut pou­voir un jour démo­cra­ti­que­ment chan­ger les choses, il va fal­loir qu’on dis­cute et qu’on puisse se convaincre.

Ludo : Donc, res­tons doux. À plu­sieurs, notre force col­lec­tive de convic­tion — si on est joyeux, accueillants, bien­veillants — est plus puis­sante que pas mal d’oppositions et de révoltes vio­lentes. Nos copains d’#OnVautMieuxQueCa et de Hacking social ont bien par­lé de la pen­sée pré­ten­du­ment « Bisounours » : c’est-à-dire com­ment le monde néo­li­bé­ral (« il faut être ferme ») a construit un dis­cré­dit du « Bisounours », du « bien­veillant ». Nous tom­bons nous-mêmes dans ce piège dès que nous dis­qua­li­fions, trop faci­le­ment, l’attitude « bien­veillante » et « naïve » en trai­tant l’autre de « bobo », en par­lant de « ker­messe » à pro­pos de Nuit Debout. Il y a là comme un reste de l’hégémonie de nos enne­mis : res­tons sympas.

Revenons un ins­tant aux adver­saires poli­tiques qui viennent à Nuit Debout : pour­quoi ne pas les exclure ?

Stéphane : En res­tant ouverts, en débat­tant, on a beau­coup plus de chances de gagner idéologiquement.

Ludo : Si tu veux convaincre et empor­ter l’adhé­sion, il faut par­tir de ce sur quoi la per­sonne qui se trouve en face de toi est déjà d’accord. C’est tou­jours comme ça que com­mence une dis­cus­sion. Si tu ouvre sur le désac­cord, tu construis du clash et, à la fin, cha­cun va dire « équipe rouge / équipe bleu », « Real / Atlético Madrid ». Ok, super… Si on veut une dis­cus­sion et créer une concorde col­lec­tive, il faut par­tir de nos accords. Par rap­port aux conspi­ra­tion­nistes, il faut dire : « Mais tu es là, tu es avec nous, c’est déjà bien ; tu es dans l’erreur mon frère, viens. » Dans la pers­pec­tive qu’on apporte, il y a un truc un peu « évan­gé­liste ». C’est une impul­sion très reli­gieuse dans l’attitude, par rap­port à la conflic­tua­li­té, à la lutte des classes, à la construc­tion conflic­tuelle de notre démo­cra­tie repré­sen­ta­tive. C’est une approche du monde d’avant 1789, plus inclu­sif, plus reli­gieux. Ça parait bizarre, mais c’est très vrai : il n’y a aucune dis­cus­sion qui ne se règle en com­men­çant par la dis­corde — sauf si les gens sont sen­sibles à « la force intrin­sèque de l’idée vraie », pour faire du Spinoza. Les espaces de dis­cus­sion pure­ment argu­men­taires n’existent qua­si­ment jamais — Habermas se goure. Nuit Debout, c’est un labo­ra­toire et un moment d’apprentissage. On ne peut pas exi­ger de gens qui ne se sont jamais par­lés (et qui ont ou non des affi­ni­tés intel­lec­tuelles et mili­tantes au préa­lable) qu’ils se retrouvent ensemble dans une confi­gu­ra­tion nou­velle. Et que tout fonc­tionne bien tout de suite. Il y aura évi­dem­ment des diver­gences, mais, avec le temps, des idées d’équilibre vont cir­cu­ler. Il faut avoir des attentes rai­son­nables : ce sera long et il y aura des couacs. On va conti­nuer à tenir cette place, avec des toi­lettes sèches bien gérées pour les meufs, une can­tine bien gérée, de la bouffe bien gérée. Progressivement, on va ren­for­cer la Commission Logistique (qui galère), créer un site Internet de coor­di­na­tion et d’in­for­ma­tion — avec une cura­tion de qua­li­té. Les gens ont un énorme désir que tout ce « bor­del » conti­nue ; on va sur­mon­ter les difficultés.

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Stéphane et Ludo, par Stéphane Burlot

Stéphane : Quelle que soit la façon dont ça va évo­luer, on a déjà gagné. Le fait que ça ait exis­té pen­dant le temps où ça a exis­té, que les gens soient venus et se soient ren­con­trés, qu’ils aient fait tout ce qui a déjà été fait, c’est déjà très bien. On est déjà très contents, même si ça devait s’arrêter demain.

« Il se pas­se­ra for­cé­ment plein de choses. Quand les gens se ren­con­tre­ront, plus tard, ils auront vécu Nuit Debout. »

Ludo : Il se pas­se­ra for­cé­ment plein de choses. Quand les gens se ren­con­tre­ront, plus tard, ils auront vécu Nuit Debout. C’est un lieu com­mun de la gauche et des mou­ve­ments de lutte que de dire que la lutte forme. Il y a une auto­trans­for­ma­tion et une autoé­man­ci­pa­tion de soi dans la lutte. Imaginons le futur de trois copains qui se sont ren­con­trés dans une com­mis­sion à Nuit Debout : il y en a un qui va par­tir dans un par­ti et il se fera cri­ti­quer par les deux autres, sur la base de leur action com­mune. Imagine les galé­riens qui tentent ça à Montluçon : ils se rever­ront au ciné mais ces connexions ne sont jamais per­dues et sont déjà construc­tives. On a vu des gens trac­ter pour une lutte dans un hôpi­tal, avec des tracts CGT, cha­suble et auto­col­lants. On est allés les voir pour leur dire que « c’est cool, mais c’est un espace où il y a un rela­tif consen­sus pour qu’il n’y ait pas de logos ». Le mec nous sort l’argumentaire syn­di­cal et on com­mence à le convaincre. Son chef arrive et res­sort l’argumentaire syn­di­cal, pen­dant que le pre­mier retire sa cha­suble déchire les logos CGT dans le coin de tous les tracts pour pou­voir conti­nuer de les dis­tri­buer. Ça donne de l’espoir dans le pou­voir de la bien­veillance ! Tout le monde peut se com­prendre. Il faut pen­ser au poten­tiel excluant des logos ou des vieux signi­fiants qui iden­ti­fie­raient cet espace citoyen et en bri­se­raient le carac­tère nou­veau et inclu­sif. C’est en train de se mettre en place ; ça a fonc­tion­né à petite échelle.

Stéphane : Sur la place, il y a déjà un mil­liard de gens qui pos­sèdent des éti­quettes mais la laissent à l’extérieur.

Ludo : Sauf Jean Lassalle, qui vient quand même dire « votez pour moi ». Il m’a fait rire : il cherche des voix dans le Béarn. Il n’a pas compris.

Et que pen­sez-vous du rôle des « lea­ders » comme signi­fiants, comme sources de ras­sem­ble­ment, quand les dra­peaux et les slo­gans ne marchent plus ? 

Ludo : C’est une contra­dic­tion majeure et inex­tri­cable. Toute parole est in fine incar­née et réfé­rée à un auteur. Même Nicolas Bourbaki et les tra­di­tions d’écriture sans auteur. Même le Comité invi­sible devient le groupe de Tarnac. C’est consub­stan­tiel à la prise de parole. L’analyse qui nous rend scep­tiques envers l’incarnation est celle des effets de cha­risme, au sens socio­lo­gique, avec le pou­voir, la légi­ti­mi­té, le cré­dit sym­bo­lique. Cet effet de cha­risme brise le pari démo­cra­tique de Rancière sur l’égalité des intel­li­gences et du pou­voir. Notre scep­ti­cisme est tout à fait nor­mal, mais, en même temps, il n’y a pas de dis­cours ni d’actions sociales sans figure, sans situa­tion incar­née. Il faut essayer de jouer et c’est une corde raide ; il faut arri­ver à être trans­pa­rent. Depuis que je suis deve­nu un petit « per­son­nage public », je suis confron­té à cette contra­dic­tion ; il faut tâcher de res­ter « nor­mal ». Il faut essayer d’expliciter au maxi­mum les stra­té­gies de com­mu­ni­ca­tion, ne jamais se payer de mots. J’utilise le lexique de l’ennemi — le bran­ding, le mar­ke­ting, la com­mu­ni­ca­tion — pour savoir ce que je fais, pour me pro­té­ger de moi-même. Par exemple, #OnVautMieuxQueCa est pour moi un bran­ding, un label, une marque qu’il faut conti­nuer à gon­fler. L’hésitation entre les labels « Nuit Debout » et « Convergence des luttes » est à pen­ser en termes de com­mu­ni­ca­tion, au sens des com­mu­ni­cants, des publi­ci­taires. Je parle de com­mu­ni­ca­tion en des termes extrê­me­ment cras­seux, ceux des de gens de droite, pour ne pas y croire, pour ne pas avoir l’impression que c’est spon­ta­né ! C’est pareil pour toutes ces contra­dic­tions « cha­ris­ma­tiques ». Je fais chier mes col­lègues car je parle extrê­me­ment néga­ti­ve­ment de notre dis­po­si­tif, en disant qu’on fourbe sur une écri­ture. Dès que tu écris pour un public, tu changes un peu pour que ce soit plus com­pré­hen­sible : je n’arrive pas à ne pas le voir comme une four­be­rie. Ces stra­té­gies que j’ap­plique pour limi­ter les effets « gri­sants » du cha­risme sont éven­tuel­le­ment généralisables.

Ce serait même valable pour une figure d’un par­ti, à vos yeux ?

« Il faut expli­ci­ter les recettes. Il n’y a pas mieux que la trans­pa­rence. Pour un enfoi­ré, expli­ci­ter sa recette, c’est fatal. »

Ludo : Oui. Par exemple, une manière hon­nête pour Mélenchon d’être lui-même serait de s’auto-critiquer en per­ma­nence, de savoir quand il se paie de mots, ce qu’il repré­sente et ce qu’il dit car il incarne tel ou tel espoir, d’ex­pli­ci­ter pour­quoi il fait le choix de dire ceci ou cela par rap­port à ce qu’il est lui-même, par rap­port à la posi­tion d’ac­teur qu’il occupe. Il faut expli­ci­ter les recettes. Il n’y a pas mieux que la trans­pa­rence. Pour un enfoi­ré, expli­ci­ter sa recette, c’est fatal ; pour quelqu’un qui va vers le bien, c’est fan­tas­tique — comme un bou­cher qui te met la tra­ça­bi­li­té de sa viande. Il y aura tou­jours des figures.

Au fait : com­ment vous êtes-vous politisés ?

Stéphane : Cela fai­sait très long­temps qu’on s’intéressait à la poli­tique. Dès 14 ans, je lisais Le Monde diplo­ma­tique et étais tout content d’aller voir le film sur Bourdieu, La socio­lo­gie est un sport de com­bat. Ludo, ça fait mille ans.

Ludo : Selon ma mère (et ce n’est pas une source fiable), à un ou deux ans, dès que j’ai pu par­ler, j’ai deman­dé si Mitterrand était de gauche ou de droite. Elle m’a dit : « De gauche. » Et là, j’ai chia­lé pen­dant une demi-heure parce qu’on m’avait dit que j’étais droi­tier ! Mes parents ne sont pas du tout mili­tants. Pour com­prendre la pro­fon­deur du délire, ima­gi­nez qu’en CE2 j’ai vou­lu faire un expo­sé sur la réforme de la Sécurité sociale de 1995 !

Xavier : Moi, c’est plus tar­dif. Vers 17 ans. Ça a été beau­coup par l’écologie poli­tique et la décrois­sance. En 2011, j’étais à l’opération « Indignés » à La Défense, qui avait duré deux semaines.


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