Texte inédit | Ballast
Après cinq mois de préparation, un important week-end de mobilisation s’est tenu dans plusieurs vallées des Pyrénées, les 10 et 11 octobre dernier. À l’initiative ? le collectif Touche pas à ma forêt. 2 500 personnes se sont ainsi rassemblées — avec pour épicentre la commune de Lannemezan, lieu prévu pour l’implantation d’une méga-scierie du groupe industriel italien Florian. En s’opposant à ce projet, c’est une alternative à l’exploitation productiviste qui se dessine aussi. Reportage, entre marches dans la forêt, conférences, débats et concerts. ☰ Par Loez
La pluie fine et drue n’aura pas découragé les soutiens. 1 300 marcheur·ses venu·es des cinq départements pyrénéens, ainsi que quelques Catalans, sont partis dimanche matin du village de Capvern, en Occitanie. Ponchos sur la tête et parapluies déployés, ils se retrouvent sur un pré herbeux de la zone industrielle de Lannemezan, près du site qui prévoit d’accueillir un projet de méga-scierie. Béret vissé sur la tête et verbe acéré, Pascal Lachaud, maire-adjoint PCF de Capvern, et l’un des porte-parole du collectif Touche pas à ma forêt, les accueille avec ces mots : « Hêtres des forêts de l’Ortet, de Benquet, d’Esparros, hêtres très vieux des forêts du Baget, de la Soule, mes amis hêtres du Couserans, de Castillon, d’Audressein, hêtres tumultueux et noueux du Comminges, d’Encausse, amis du Salat et de Tarascon, de la Chalabre, des Gaves, des vallées de Campains et d’Aure, je vous salue. » Il poursuit : « Amis hêtres du monde et citoyens de la Terre, vous avez répondu présent pour appeler à vivre dignes dans une société qui ne veut plus de nous. » La veille, près de 1 200 personnes ont rejoint les marches organisées, de Saint-Girons à Bagnère-de-Bigorre, en passant par Aspet. Là, Daniel, forestier retraité et syndicaliste du SNUPFEN1, syndicat majoritaire de l’Office national des forêts et membre de l’Union syndicale Solidaires, raconte la forêt au fil de la déambulation : une lecture sensible où s’entremêlent activités humaines, animales et végétales, temporalités des arbres et des hommes.
« La mobilisation a été pour beaucoup de citoyens une occasion de reprendre une place, de reprendre notre pouvoir de décision. »
Piloté par la Communauté de communes du plateau de Lannemezan (CCPL), le projet TRIESTE a pour but l’installation sur le territoire d’une usine du groupe italien Florian, multinationale de la filière bois. Celle-ci devrait produire 50 000 m3 par an de bois d’œuvre, destiné à l’ameublement ou à la construction, pendant 10 à 15 ans. À l’origine de cette entreprise, on trouve Bernard Plano, président de la CCPL et maire de la ville ; en 2018, il a créé l’association Bois Occitanie afin d’initier des projets industriels. En décembre 2019, il présente TRIESTE à la commission économique du Conseil communautaire « sans aucune concertation ni débat avec les élus« , comme le rappelleront plusieurs intervenant·es au cours du week-end. Le même mois, une charte d’engagement est signée entre bailleurs de fonds publics, fournisseurs de bois et décideurs politiques, parmi lesquels la région Occitanie et le CCPL. Parallèlement à la scierie envisagée, la société Lannemezan Bois Énergie remporte en 2019 un appel d’offres pour construire une centrale biomasse, qui serait alimentée par les bois non utilisés par la scierie et ses déchets. 30 000 m3 par an de bois seraient nécessaires chaque année pour produire 2,5 MW2 d’électricité et 7 MW de chaleur. Les défenseurs du projet mettent en avant une supposée sous-exploitation des forêts pyrénéennes, ainsi que la création d’emplois induite par l’implantation de l’industriel. Un discours qui s’inscrit dans la lignée du Programme national de la forêt et du bois3, dans lequel on apprend que « la forêt est une manne économique importante », qu’elle est « actuellement sous-utilisée » et qu’il faut « l’adapter aux besoins du marché ». Des arguments que ne partagent pas les opposants à l’installation de Florian.
Capitaux contre écosystème
Depuis que Pascal Lachaud a le premier lancé l’alerte, la petite commune de Capvern est à la pointe du combat. Pour le week-end de mobilisation, le maire a autorisé l’usage du gymnase municipal et du parking afin d’accueillir les centaines de soutiens venus de tous les Pyrénées. 44 associations, professionnels de la forêt, syndicats, partis politiques se sont fédérés au sein du collectif Touche pas à ma forêt, fondé en février 2020 pour lutter contre le projet du groupe Florian. À quoi il faut ajouter nombre de « simples citoyens », comme le souligne Mathilde, jeune femme d’une trentaine d’années qui les représente parmi les quatre porte-parole désignés par le collectif — deux femmes et deux hommes. À côté d’elle se trouvent Pascal Lachaud, Christine Monlezun, maire de Fréchandet, et Dominique Dall’Armi, syndicaliste forestier du SNUPFEN. Pour Mathilde, la lutte est aussi bien sociale qu’écologique : « Je fais partie d’une génération qui doit se construire dans ce monde qui ne nous fait pas rêver, dans lequel c’est difficile de se projeter. Le constat est grave, la planète s’enflamme, les hommes souffrent, les droits sociaux disparaissent, la nature se révolte. » Et d’insister durant sa prise de parole, à la fin de la marche : « Dans ce contexte compliqué, la mobilisation a été pour beaucoup de citoyens une occasion de reprendre une place, de reprendre notre pouvoir de décision. On se dit décidons et refusons ce qui nous révolte et nous détruit
. C’est l’occasion de nous engager dans un combat qui nous dépasse, celui des capitaux contre l’écosystème. C’est l’occasion aussi de nous rassembler, de créer du lien, de nous sentir soutenus, surtout dans ces périodes de distanciation sociale. »
D’emblée, Touche pas à ma forêt cherche à installer la lutte dans la durée, et à rassembler le plus de monde possible autour de celle-ci. Le groupe s’appuie sur un fonctionnement démocratique — à l’inverse de la façon dont le projet a été présenté, sans consultation citoyenne à la CPPL. Le dimanche après-midi, un débat a lieu à Capvern pour permettre à tout un·e chacun⋅e de prendre la parole, et d’avancer les alternatives possibles. L’affluence au sein d’un public varié témoigne ici de l’intérêt porté au débat ; les opinions diverses s’expriment sans retenue. Tous les âges sont présents, ainsi que de nombreuses sensibilités politiques. Le combat rassemble les habitant·es de plusieurs vallées : un fait peu commun. S’attaquer aux forêts, c’est toucher une conscience populaire largement partagée sur l’importance des arbres, aussi bien pour l’environnement que pour les humains. C’est aussi faire vibrer un attachement profond des Pyrénéen·nes à leur massif et à la nature. Mathilde le souligne en reprenant un slogan désormais fameux : « On ne défend pas la nature, c’est la nature qui se défend. » Le combat s’inscrit dans une temporalité des luttes marquée par les expériences passées, dont celle de la ZAD de Sivens, à un moment où la réalité du dérèglement climatique devient de plus en plus sensible, après des mouvements sociaux forts. Les pratiques d’assemblées citoyennes, comme celles des gilets jaunes, rencontrent les capacités organisationnelles de militant·es chevronné·es du PCF et le professionnalisme des syndicalistes forestiers. Une des grandes forces du collectif vient de l’articulation de diverses cultures militantes avec celle des travailleurs de la forêt : en résulte un discours riche et étayé, qui prend en compte à la fois les dimensions écologiques, politiques, syndicales, sociales de la mobilisation en cours. Des analyses détaillées de l’impact du projet ont ainsi été exposées au public lors des différentes conférences du week-end.
Un miroir aux alouettes
« S’attaquer aux forêts, c’est toucher une conscience populaire largement partagée sur l’importance des arbres, aussi bien pour l’environnement que pour les humains. »
Touche pas à ma forêt dénonce d’abord la surexploitation annoncée des forêts pyrénéennes, incapables de produire la quantité de bois exigée par Florian sur 10 ans. Le hêtre est un bois fragile, sensible à la chaleur : s’il n’est pas coupé à la bonne période de l’année, il peut se fendre. Seulement 20 % environ du hêtre coupé est apte à devenir du bois d’œuvre de qualité A et B (sur une échelle allant jusqu’à D). Or Florian ne s’intéresse qu’aux deux premières. Ainsi, pour produire 50 000 m3 par an, il faudrait au bas mot couper cinq fois plus de volume — près de 250 000 m3 par an, et ce sur une durée de 10 ans. Un chiffre colossal, explique Dominique Dall’armi, au regard des 8 000 m3 de hêtres coupés en 2018 dans les forêts pyrénéennes. Si nombre de professionnels de la filière bois s’accordent à dire que ce volume pourrait être supérieur, tous estiment que la forêt ne sera pas en mesure de fournir les volumes nécessaires. Dominique Dall’armi l’indique : 80 % de la forêt française a moins de 150 ans. La forêt pyrénéenne, née sur le charbonnage, compte seulement 4 % de vieille forêt4. Le gros bois, c’est-à-dire les vieux arbres, ceux qui intéressent les scieurs, y sont déjà exploités et en quantité limitée.
Élargissant la perspective, il rappelle que la forêt est un lieu vivant, abritant des milliers d’espèces. Leur survie est étroitement liée au bois et notamment au bois mort qui, en se décomposant, forme l’humus et permet le développement des insectes et champignons — lesquels représentent près d’un quart de la biodiversité en forêt. La survie de celle-ci dépend donc de la quantité de bois mort et de gros bois, celui-là même que Florian veut transformer en planches. Idéalement, il en faudrait près de 50 m3 par hectare — la moyenne française est à 15 m3. De même, si on ne laisse pas suffisamment de gros arbres en forêt, le nombre d’espèces qui y vivent s’en trouve fortement réduit. En coupant des arbres vieux de 100 à 150 ans, Florian viendrait déséquilibrer un fragile écosystème. Véritables puits de carbone, les forêts jouent également un rôle important contre le réchauffement climatique. L’une des manières d’y faire face serait de laisser un quart des forêts françaises en libre-évolution5. Or en France, aujourd’hui, seules 1,7 % des surfaces forestières sont protégées. Pour les militant·es, il faut donc laisser le temps aux arbres de vieillir. Le syndicaliste forestier dénonce le « miroir aux alouettes » du projet Florian : une fois le bois coupé, la ressource disparaît, et il faudra attendre très longtemps pour la reconstituer, le hêtre ayant un cycle de vie de 400 ans. D’où la nécessité de se montrer plus respectueux à l’endroit de ce que peut fournir la forêt pour s’inscrire dans la durée. Pour Jean, habitant du coin d’une quarantaine d’années venu soutenir la lutte, « une fois le bois coupé, Florian s’en va avec les profits et il nous laisse quoi ? ». Et, en cas de défaut d’approvisionnement, il est même prévu que l’entreprise aille chercher du bois jusque dans le Massif central.
Qu’est-il censé advenir des 75 % de bois coupé inutilisé, destiné à l’industrie ? Une partie alimenterait une centrale biomasse adossée au projet de scierie, qui produirait chaleur et électricité en brûlant près de 30 000 m3 de bois par an. Fait loin d’être anodin : le maire Bernard Plano est également président d’une des sociétés qui seraient actionnaires de cette usine. Si l’Union européenne met en avant le bois comme source d’énergie soi-disant peu polluante, de nombreuses ONG et scientifiques remettent en question sa prétendue « neutralité carbone ». La combustion du bois pourrait dans certains cas s’avérer plus polluante que certaines énergies fossiles, si l’on prend en compte le rejet de CO2, les nuisances entraînées par les émissions de particules fines et les poussières… D’autant qu’une fois le bois épuisé autour de la centrale, il faut le faire venir d’ailleurs, occasionnant de fait un coût environnemental plus important. Bien qu’aucun lien n’ait pu être démontré, certain⋅es murmurent aussi que Fibre Excellence, gros industriel de la papeterie à la tête d’une usine à Saint-Gaudens, dans la Haute-Garonne, serait dans l’ombre du projet. L’activité de l’usine n’a dû son salut, à l’aube des années 2000, qu’aux violentes tempêtes qui ont mis à terre grand nombre d’arbres ; il lui faut désormais importer du bois d’Amérique du Sud pour sa production. Il serait beaucoup plus rentable pour le groupe d’avoir à disposition un gros volume local de bois d’industrie, lui permettant ainsi d’afficher une étiquette verte…
« Fait loin d’être anodin : le maire Bernard Plano est également président d’une des sociétés qui seraient actionnaires de cette usine. »
L’exploitation d’un tel volume de bois demande en sus la construction de routes forestières. L’arbre coupé devient une grume6, qu’il faut débarder puis transporter jusqu’à la scierie. Or, d’après une étude de l’ONF, plus de 60 % du bois convoité est pour l’instant inaccessible aux engins forestiers. Une fois ces routes construites, elles sont rarement refermées. Et il est peu probable que l’ONF, dont le gouvernement accélère la privatisation, ait les moyens de s’en occuper. Ce sont plus de 10 000 camions par an qui circuleraient sur les routes des vallées pour transporter les grumes, ce qui occasionnera un surcoût d’entretien puisqu’elles ne sont pas prévues pour accueillir autant de circulation, et des embouteillages en perspective pour les valléen⋅nes.
Touche pas à mes forêts dénonce également le faible impact économique d’un projet dont le coût de 11 millions d’euros serait financé à 60 % par de l’argent public, pour seulement 25 emplois directs créés dans l’usine, et environ 90 emplois indirects de scieurs, débardeurs, chauffeurs… Florian se chargerait de fournir les machines. La centrale biomasse adossée à l’usine coûterait quant à elle 9 millions d’euros pour 18 emplois. Pierre Vertu, du SNUPFEN, relève non sans humour : « C’est moins que la charcuterie Bares & fils », en référence à une entreprise familiale bien connue de la région. Selon le collectif, au-delà du faible nombre d’emplois générés, ces projections ne prennent pas en compte la réalité du secteur, déjà fortement précarisé : main d’œuvre venant du Maghreb, du Portugal, des pays de l’Est, faibles salaires et dangerosité des métiers (18 morts au travail l’an passé). Sans revalorisation, on peut douter que davantage d’emplois recourant à la main d’œuvre locale soient créés. Par ailleurs, les petites entreprises locales ne pourront rivaliser avec un géant comme Florian : le risque de voir leur travailleurs·es débauché·es et de perdre leur clientèle est bien réel. Quant aux propriétaires des forêts, dont les deux tiers sont des communes, difficile pour le collectif de croire qu’ils pourront négocier un bon prix pour leur bois face à une multinationale en quête de profits rapides.
Des métiers, pas des emplois
Le collectif défend pour sa part une approche multi-usage de la forêt. Son aspect sensible et esthétique n’est pas oublié ; la forêt apaise, procure un sentiment de bien-être qu’on ne peut balayer d’un revers de main. Se promener en forêt, aller cueillir des champignons, ramasser des châtaignes sont des activités humaines inscrites dans l’imaginaire et les pratiques collectifs. Jean-Baptiste Vidalou, auteur de Êtres forêts, a eu l’occasion de l’expliquer dans nos colonnes : « La forêt est aussi ce qu’on y fait, ce qu’on y bricole, dans le sens d’une composition commune de gestes. C’est d’abord cette composition commune et située qu’on défend : l’idée d’ancrage. Au regard de la crise généralisée de la présence en Occident, où le sentiment d’un ancrage au réel tend à disparaître, il y a des lieux qui produisent encore ce sentiment à la fois affectif et éminemment politique d’être là
. » Une analyse qui expliquerait en partie l’engouement suscité par la lutte pour la sauvegarde de la hêtraie pyrénéenne.
« Le projet de méga-scierie symbolise un fonctionnement qui appartient au passé, avec la surexploitation des humains et des forêts. »
Mais Touche pas à ma forêt va plus loin qu’une simple demande d’abandon du projet : le collectif entend bien proposer un autre modèle que celui qui domine actuellement l’économie du bois, comparable à l’agriculture intensive. « Le projet de méga-scierie symbolise un fonctionnement qui appartient au passé, avec la surexploitation des humains et des forêts, avec des exportations, des projets à court terme et des destructions. À l’inverse, on souhaite symboliser un changement d’échelle, relocaliser la production et la vente, prendre soin des travailleurs et de la biodiversité, réaliser un travail commun et à l’échelle de tous les citoyens. Pour cela, on développe un projet alternatif, une ambition alternative », explique Mathilde. Cela ne peut se faire sans une revalorisation de la filière bois des Pyrénées, construite avec la participation d’un maximum d’habitant⋅es, comme l’explique Pascal Lachaud : « On a besoin du débat pour se nourrir face à l’adversité, pour construire une alternative sociale et écologique. » À leurs yeux, pas de solution sans prendre en compte le fait que les questions environnementales et sociales sont étroitement liées. Jacques, lui aussi syndicaliste forestier, explique que la filière bois des Pyrénées est organisée de manière hétérogène : quelques PME et des petits scieurs ne peuvent rivaliser en puissance avec une multinationale comme Florian. Cette hétérogénéité la rend difficile à organiser, même si l’Union régionale occitane de la Fédération nationale du bois a refusé le projet Florian. Parmi les PME, seules trois travaillent le hêtre — un bois qui se vend généralement mal. Si, un temps, le marché a connu une embellie grâce aux exportations vers l’Asie, les principaux acheteurs de hêtre pyrénéen sont actuellement espagnols, italiens ou portugais. À l’inverse de Florian qui projette d’exporter son bois à l’international, il faut, selon le collectif, réhabiliter l’usage du hêtre comme bois d’œuvre et favoriser sa transformation locale en aidant les entreprises à acquérir le matériel nécessaire à son exploitation, notamment pour le séchage du bois. « On doit pouvoir trouver du bois local au Bricomarché du coin ! », lance Pascal Lachaud.
Les métiers du bois et les parcours de formation doivent également être revalorisés. « Aujourd’hui on parle d’emplois, et pas de métiers », poursuit Pascal. « Nous on veut des métiers. Le savoir-faire se négocie, pas la force de travail, il y a des millions de chômeurs à Pôle emploi. » Pour les Pyrénéen·nes mobilisé·es, la revalorisation de la filière bois passe par la révision des conventions collectives et des conditions de travail, et ce « afin que la jeunesse ne soit pas précarisée ». Un constat que confirme un jeune homme dans l’assemblée. Malgré son expérience dans l’exploitation forestière, impossible pour lui de trouver du travail, faute de diplômes exigés par les employeurs et des programmes de formation déconnectés du terrain. Alors que le secteur est fortement masculin, « il faut aussi travailler à une féminisation du métier » ajoute une jeune femme, applaudie. Développer la filière bois, c’est aussi diversifier l’économie des vallées qui repose aujourd’hui majoritairement sur le tourisme : une activité dont on ne peut garantir la pérennité, notamment avec la diminution de l’enneigement due au réchauffement climatique.
Le bruit médiatique autour du projet et l’élargissement des soutiens à ses opposant·es semble inquiéter le groupe Florian. Alors qu’il refusait jusque là de s’exprimer, l’industriel s’est fendu d’un communiqué de presse deux jours avant le week-end de mobilisation : il y confirme son implication dans le projet et ajoute que « le groupe Florian n’effectue pas d’opérations mettant en péril l’environnement et la durabilité écologique des forêts ». Pourtant, en juillet, il affirmait à Reporterre « qu’aucun projet industriel n’est actuellement planifié à Lannemezan ». Le même jour, la présidente de la région Occitanie, Carole Delga, publiait une déclaration ressemblant à un rétropédalage. Elle y déclarait que « la Région se montre toutefois vigilante depuis plusieurs mois sur l’impact qu’il pourra avoir sur le tissu économique local ainsi que sur son empreinte écologique », et appelle à une « phase d’étude et de concertation indispensable ». Des députés PCF et France insoumise, venus rencontrer le collectif, vont porter la question à l’Assemblée nationale en interpellant la ministre de l’Écologie. Le succès du week-end de mobilisation n’a fait que renforcer la détermination du collectif, prêt à se mettre autour de la table avec Bernard Plano en vue de discuter d’un projet alternatif — mais certainement pas de négocier le chiffre des 50 000 m3 de bois. Et Mathilde de conclure : « On peut tout changer. »
Pétition à signer pour soutenir la lutte de Touche pas à ma forêt
Photographies de bannière et de vignette : Loez | Ballast
- Syndical national unifié des personnels des forêts et de l’espace naturel.[↩]
- Mégawatts.[↩]
- Introduit par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014.[↩]
- Forêts où l’influence humaine est négligeable.[↩]
- Voir le rapport de l’association Canopée : « Pour sauver le climat, laisser vieillir les arbres ou exploiter davantage les forêts ? ».[↩]
- Pièce de bois formée d’une portion de tronc conservant encore son écorce, avant que celle-ci ne soit retirée.[↩]
REBONDS
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