Texte paru sur Roarmag et traduit pour le site de Ballast
De l’invasion, un visage — parmi tant d’autres — restera. Hevrin Khalaf, 34 ans, a été exécutée aux premiers temps de l’offensive menée contre le Rojava par les armées turques et rebelles. Ingénieure de formation, elle avait encadré le ministère de l’Économie de l’Administration autonome et militait, comme secrétaire générale, pour le FSP, le Parti de la Syrie future : se réclamant du courant progressiste, il appelle, fort d’une direction arabo-kurde, à une Syrie « démocratique, pluraliste et décentralisée ». La militante féministe et anticapitaliste Azize Aslan, qui étudie les liens entre les mouvements zapatistes et kurdes, l’avait rencontrée et interviewée en 2018. Nous traduisons l’hommage qu’elle vient de rendre à celle qui aspirait à une double révolution : féminine et sociale.
« Je m’appelle Hevrin, de Dêrik, une ville du Rojava. J’y ai étudié et vécu, mais je travaille désormais à Qamişlo. J’ai étudié le génie civil à Alep durant cinq ans et j’ai terminé mes études en 2009. Après avoir travaillé pour le gouvernement pendant un an, la révolution a commencé. C’était en 2011. C’est à ma famille que revient le mérite de ma participation à la révolution du Rojava : elle est patriote et s’organise depuis des années. Elle m’a toujours emmenée aux réunions et aux mobilisations sociales. Disons que je ne me suis jamais trouvée bien loin de l’organisation politique et que j’ai toujours eu de solides racines au sein de notre société. C’est peut-être le cas partout au Moyen-Orient, mais, au Rojava, il a toujours existé une unité et une solidarité fortes parmi notre peuple. Vivre ensemble — ou ce que nous appelons la vie en communauté
— est, de nos jours, encore vivant et courant. Je fais partie intégrante de cette société communautaire. »
« Elle a été arrachée de sa voiture puis tuée de sang froid sur la route. »
Ce sont là les paroles d’Hevrin Khalaf, lorsque je l’ai rencontrée au printemps 2018. Le 12 octobre 2019, trois jours après que la Turquie a lancé son offensive militaire dans le nord de la Syrie, elle a été brutalement assassinée. Selon les rapports de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, elle a été arrachée de sa voiture puis tuée de sang froid sur la route. Son autopsie révèle qu’on lui a tiré dessus, qu’on l’a battue avec des objets lourds et qu’elle a été traînée par les cheveux jusqu’à ce que la peau de son cuir chevelu se détache. J’ignore combien de fois j’ai réécouté les enregistrements de notre entretien depuis que j’ai appris la nouvelle terrible de sa mort. Hevrin décrit le Rojava et sa lutte avec tant de fierté. Je voulais entendre à nouveau ces paroles emplies d’honneur car elles expliquent aussi bien des raisons de la guerre menée contre le Rojava et les Kurdes. Cet entretien tente de rendre justice au courageux travail qu’Hevrin Khalaf a accompli pour son peuple ainsi que pour l’ensemble des habitants du Rojava1.
J’ai, ce printemps, rencontré Hevrin Khalaf (Hevrîn Xelef, en kurde) alors qu’elle coprésidait le ministère de l’Économie de l’Administration autonome de la Syrie du Nord et de l’Est — mieux connue sous le nom de « Rojava ». La veille, elle avait perdu son camarade Gerdo, aux côtés de qui elle avait lutté de nombreuses années durant ; elle revenait de son domicile, à Tirbespî2 ; je me souviens de ce moment où elle m’a appelé pour me dire qu’elle s’excusait pour son retard et qu’elle était en route.
Un combat perpétuel
Tandis que j’attendais Hevrin dans le jardin du ministère de l’Économie, assise à l’ombre d’un arbre, je discutais et fumais avec la femme en charge des Asayişa Jin, les forces de sécurité féminines du Rojava. Elle semblait à ce point forte et autonome qu’il me faut bien avouer, à la vue de son alliance, avoir été un peu surprise ; je lui ai demandé si elle était mariée : « Je suis mariée, mais mon mari travaille pour les forces de sécurité communautaires dans une autre partie du Rojava », a-t-elle dit. Un peu gênée, elle m’a avoué en riant : « On a oublié qu’on était mariés, une fois la révolution arrivée. »
Au Rojava, les femmes ont toujours cherché à transformer la révolution — que tout le monde connaît aujourd’hui comme « la Révolution des femmes » — en une révolution sociale. Toute sa vie, Hevrin a lutté pour cela. Et a été assassinée alors qu’elle se battait pour cela. J’avais déjà entendu parler de sa beauté et de sa dignité ; lorsqu’elle est arrivée, sa peine et ses yeux gonflés d’avoir pleuré Gerdo n’ont pu, en effet, dissimuler sa beauté. Pas plus que sa fatigue n’entrava son hospitalité. En me saluant, elle a immédiatement demandé si j’avais faim et si j’avais de quoi manger. Lors de mon séjour au Rojava, je n’ai d’ailleurs jamais eu affaire à l’argent : tous les jours, je mangeais et buvais du thé dans les cuisines communes de l’une des nombreuses institutions locales ou des maisons civiles que je rencontrais le long du chemin. Là-bas, il est évident que l’argent ne domine pas l’ensemble des relations sociales. Les gens me charriaient parfois : ils plaisantaient en disant que si j’étais venue durant la guerre et l’embargo, ils m’auraient seulement donné de la soupe.
Une société d’assemblées et de communes
« Le Rojava n’est pas seulement un territoire qui voit se réaliser une révolution, c’est un territoire où l’idée même de révolution se redéfinit. »
Parallèlement à la révolution, c’est une économie sociale qui s’est organisée au Rojava. Lorsque je l’ai rencontrée, cela faisait plus de deux ans qu’Hevrin était la porte-parole et la coprésidente de ce ministère. « L’organisation d’une économie sociale repose sur trois piliers importants [m’avait-elle dit]. Le premier, c’est l’économie des besoins sociaux — qui, contrairement à l’économie capitaliste, n’est pas axée sur la maximisation du profit. Le deuxième, c’est l’écologie et la production écologiquement responsable des besoins de la société. Le troisième, c’est la création et le contrôle d’un marché équitable. Ces trois piliers sont très importants pour l’économie sociale, et nous voulons qu’ils deviennent réalité. »
Le Rojava n’est pas seulement un territoire qui voit se réaliser une révolution, c’est un territoire où l’idée même de révolution se redéfinit. Un lieu où s’instaure une révolution sociale, où la notion de « révolution classique » — fondée sur l’idée de transformer la société par la prise du pouvoir — est rejetée. Le mouvement kurde au Rojava refuse de prendre le pouvoir ; bien au contraire : il revêt la forme organisationnelle d’un réseau d’assemblées, lequel permet au peuple de devenir sujet de ses processus décisionnaires et, grâce à l’idée d’autodétermination, œuvre à l’autonomie générale. En somme, les Kurdes y rejettent un élément fondamental de l’État : son pouvoir de prendre et d’appliquer des décisions du sommet vers la base.
[…] La première chose qui fut entreprise au Rojava, puis dans l’ensemble de la région du Nord et de l’Est de la Syrie une fois délivrée de Daech, a été la création, avec les populations locales, d’assemblées cantonales régionales : les gens ont ainsi eu le pouvoir de décider eux-mêmes. Le Contrat social du Rojava et du Nord de la Syrie a interdit aux forces armées de sanctionner ou de prendre part aux assemblées. L’objectif de ce système populaire basé sur les assemblées est d’organiser un modèle anticapitaliste et autonome : une société sans État, antipatriarcale et écologique. L‘autonomie démocratique3, qui se structure autour de la commune, n’est pas une formation politique ni un gouvernement — bien qu’elle reconnaisse les partis politiques. Les communes et les assemblées populaires, organes principaux de l’organisation de la société, forment un auto-gouvernement.
La nation démocratique
« Si vous n’avez pas d’alternative, ce que vous avez détruit pourrait se transformer en quelque chose de pire encore. »
Contrairement aux conflits ethniques et religieux qui ont transformé le Moyen-Orient en une zone de guerre, les communes offrent l’autonomie démocratique à toutes les institutions de l’auto-gouvernement, avec pour socle la nation démocratique4. Il était manifeste, au ton de sa voix, qu’Hevrin avait saisi en profondeur l’esprit de la nation démocratique, à l’instar de son camarade assyrien Gerdo : « Depuis que le mouvement s’est organisé, [les militants révolutionnaires kurdes] délivrent la solution [de l’autonomie démocratique], sur la base des écrits de prison d’Öcalan [cofondateur du PKK et théoricien révolutionnaire, ndlr]. Une solution pour l’ensemble du Moyen-Orient et du Rojava. La solution politique est donc déjà là : il suffit de la mettre en œuvre. Raison pour laquelle, si le système est renversé, il faut remplacer ce qui existait par une vision alternative. Si vous n’avez pas d’alternative, ce que vous avez détruit pourrait se transformer en quelque chose de pire encore. En d’autres termes, lorsque la révolution a commencé et que l’État s’en est allé avec toutes ses institutions — il n’est resté qu’à quelques endroits —, si nous n’avions pas eu notre système alternatif et si notre peuple n’avait pas été prêt, il nous aurait été impossible d’accéder à une authentique libération par la simple création d’institutions.
Pour construire ce système alternatif, nous avons commencé par les Mala Gel [maisons du peuple] et les Mala Jin [maisons des femmes]. Toutes les institutions de la société ont été créées séparément. Si notre société est reconnue, elle l’est surtout pour ses organisations féminines. Quand les gens parlent de la révolution du Rojava, ils l’appellent la Şoreşa Jin
[la Révolution des femmes]. Les femmes ont commencé par construire les maisons des femmes pour organiser le mouvement féminin. On les a formées pour bâtir une vision commune et s’affranchir de la condition à laquelle elles sont bien souvent réduites : une condition sinistre, défavorisée. Pour qu’elles deviennent des dirigeantes de la révolution sociale, aussi. Car nous savons que lorsqu’une femme devient dirigeante, c’est la société tout entière qui s’empare de la direction et se transforme elle-même. La liberté des femmes et de la société sont interdépendantes. Lorsque j’ai rallié la révolution, ma première place a été à l’académie de Nurî Dersîm : c’est ici que la formation politique de la société a eu lieu. J’y ai travaillé durant un certain temps. Le gouvernement autonome avait été promulgué. Avant cela, mes camarades m’avaient suggéré d’y participer. Après cette promulgation, je suis donc devenue coprésidente du ministère de l’Énergie.
Durant trois mois, nous avons travaillé avec le professeur Gerdo, que nous avons perdu hier. Nous travaillions avec heval [« camarade » en kurde, ndlr] Gerdo depuis le premier jour du gouvernement autonome. Il disait souvent : Nous avons commencé la lutte ensemble, nous la finirons ensemble.
C’était notre ami, un Assyrien. Une très bonne personne, sur le plan de la moralité humaine. Lorsque nous discutions des modalités de la nation démocratique, je lui disais toujours : Tu as été le premier de nos amis à comprendre ce qu’est la nation démocratique, alors qu’elle ne faisait pas encore explicitement partie de notre programme politique.
Il l’avait comprise, réalisée ; cela faisait partie de son caractère. Il venait de Tirbespî : les gens vivaient ensemble dans cette ville, en paix. J’observais son caractère à travers les relations qu’il avait avec les Arabes et les Kurdes, les musulmans et les Assyriens. Il a répété à plusieurs reprises : Serok [surnom d’Öcalan, ndlr] nous a fait prendre conscience de tout ça : nous sommes donc très à l’aise vis-à-vis de lui. En tant qu’Assyriens, nous ne savions pas que nous pouvions prétendre à de tels droits. Nous l’avions oublié. Maintenant, avec ses écrits de prison, nous connaissons nos droits culturels et politiques.
Gerdo a toujours estimé qu’il fallait défendre le projet de l’autonomie démocratique. Il l’a fait dans le plus grand calme. Durant plus de quatre ans, nous avons travaillé ensemble dans l’esprit d’une nation démocratique. Il le possédait véritablement, cet état d’esprit. Si ce gouvernement autonome possède au moins une qualité, c’est l’unité du peuple. Un Assyrien travaille avec les Kurdes, un Kurde avec les Arabes. Ce n’était pas quelque chose d’aisément réalisable. Rien que ça, c’est une révolution. »
Transformer les relations de genre
« Un Assyrien travaille avec les Kurdes, un Kurde avec les Arabes. Ce n’était pas quelque chose d’aisément réalisable. Rien que ça, c’est une révolution. »
Hevrin avait appris de sa mère à être forte et révolutionnaire. C’est ainsi qu’elle a rejoint la résistance dès le début de la révolution et occupé différentes fonctions. Lorsque nous parlions ensemble d’économie sociale, elle me disait qu’elle ne serait bientôt plus impliquée dans le champ économique du mouvement. Après la libération des régions telles que Raqqa et Deir ez-Zor, on lui a proposé de devenir la coprésidente du Parti de la Syrie future (FSP) : il entend instaurer un consensus social en faveur de la paix et éliminer l’hostilité que le régime baathiste [des Assad, ndlr] a toujours engendrée entre Kurdes et Arabes. Elle me l’avait dit de façon spontanée ; j’avais saisi qu’elle ne souhaitait pas quitter son emploi d’organisatrice de l’économie sociale du Rojava et qu’elle n’aspirait pas à participer au FSP, mais qu’elle ne refuserait pas l’offre de ses camarades. Elle avait ajouté qu’elle s’était liée aux personnes qui travaillaient dans le champ économique et que, ensemble, elles étaient parvenues à résoudre quantité de problèmes concrets. Mais comme de nombreuses tribus arabes n’avaient pas accepté le système de coprésidence, elle savait qu’il était de son devoir de s’engager dans ce parti pour lutter jusqu’à ce qu’un tel système soit accepté par tout le monde.
Par la pratique — avoir un·e coprésident·e ou un·e porte-parole —, ce système octroie aux femmes et aux hommes des droits égaux en matière d’expression et de prise de décision. Il est à l’œuvre dans chaque institution et structure organisationnelle du mouvement de libération kurde ; il remonte à une décision prise par une organisation féminine kurde dans les années 1990. C’est, de par le monde, une pratique inédite au sein des mouvements de libération. Hevrin a fait savoir que l’adoption de ce système n’était pas chose aisée. Qu’il s’agissait d’une lutte permanente. « Une fois le gouvernement autonome promulgué, le travail des femmes est devenu de plus en plus important. Si toutes les institutions de l’Administration autonome accordent une attention particulière aux questions relatives aux femmes, il en est une, toujours, qui est exclusivement centrée sur elles… Nous n’encourageons pas le fait que les questions féminines prennent le pas sur les questions d’ordre général, mais nous insistons pour que celles-ci soient prises en compte dans chaque institution.
Afin de rallumer le feu éteint de l’histoire des femmes, nous devons intervenir et soutenir les organisations féminines par tous les moyens possibles. Jusqu’à quand ? Jusqu’à ce que les femmes et les hommes puissent travailler ensemble sur un pied d’égalité. Le système de coprésidence n’est pas accepté dans bien des régions : il n’a pas été suffisamment intériorisé, y compris dans les nombreuses institutions que nous avons créées depuis le début de la révolution. Se considérer comme coprésident·e·s, savoir que les décisions doivent être prises ensemble et à égalité, voilà une idée et une pratique qui n’ont pas encore été totalement mises en œuvre dans notre culture. Cela fonctionne très bien dans certains endroits, mais rappelez-vous qu’il n’est pas possible de changer une mentalité millénaire en seulement deux ans ! Par exemple, quand on parle des coprésident·e·s, on nous dit aussitôt que ce droit n’est qu’un droit octroyé aux femmes. Le système de coprésidence n’existe pourtant pas seulement pour elles. Lorsque nous parlons de coprésidence dans les régions nouvellement libérées [de Daech, ndlr], on a l’impression que nous faisons quelque chose pour les femmes, mais ce n’est pas le cas : la coprésidence concerne aussi les hommes. Il est vrai que la décision d’appliquer partout le système de coprésidence a été conçu dans les espaces et les actions organisationnelles féminins, mais, dès le début, nous avons reconnu que ce système serait bénéfique non seulement pour les femmes, mais aussi pour tous les habitants du nord de la Syrie. Ainsi, chacun a le droit d’agir avec son camarade.
« Rappelez-vous qu’il n’est pas possible de changer une mentalité millénaire en seulement deux ans ! »
Parfois, je suis très surprise lorsque, par exemple, mes amis masculins me disent : Okay, ne discutons pas trop : il y a un système de coprésidence et nos amies ici présentes ne doivent pas être offensées.
Lorsque j’ai entendu ceci, j’ai répondu : Ce n’est pas pour ne pas offenser les femmes que nous devons accepter ce système, c’est pour que les voix des hommes ne disparaissent pas dans la société.
La coprésidence ne signifie pas détruire les hommes, mais transformer les relations de genre au sein de nos institutions et de la société. Dans les systèmes à présidence unique, le président peut être un homme ou une femme. Dès lors, pour parvenir à une véritable transformation du gouvernement autonome, il était nécessaire d’instaurer le système de coprésidence. Lorsque le gouvernement autonome a été promulgué, tous les ministères étaient dotés d’un système présidentiel : un président·e et deux vice-président·e·s — il y a désormais deux coprésident·e·s et trois vice-président·e·s. Dans les ministères, mais également dans toutes les institutions.
La coprésidence a d’abord commencé dans le canton de Cizîr5, puis à Kobanê6. Ce système a désormais cours à Afrîn également — même si l’assemblée cantonale d’Afrîn avait de facto mis en place le système de coprésidence. Je m’explique, car c’était bizarre : le premier président du canton de Cizîr était un homme7 ; de même à Kobanê8 ; mais à Afrîn, c’était une femme9. Cette dernière avait à ses côtés un coprésident, alors même que le gouvernement autonome n’avait pas encore instauré le système de coprésidence. Mais puisqu’elle était une femme, le système de coprésidence avait été adopté de facto… alors qu’il n’était pas officiellement à l’œuvre à cette époque. En clair : si le président était un homme, on pouvait continuer avec le système présidentiel ; si le président était une femme, elle n’avait pas le droit de le rester sans un coprésident masculin à ses côtés ! »
J’ai ri, et elle aussi — à ce moment-là, j’ai vu le beau sourire d’Hevrin. Sans nul doute, celles et ceux qui l’ont vu le gardent en mémoire.
Même après sa mort, l’importance de sa lutte a une fois de plus été soulignée : Hevrin n’a pas été reconnue comme coprésidente de la direction du Parti de la Syrie future mais comme secrétaire générale. Elle ne l’était pas moins dans sa pratique quotidienne, coprésidente. Je n’ai aucun doute quant au fait qu’elle a poursuivi sa lutte, dans ce même esprit de résistance, jusqu’au jour de son assassinat. Hevrin Khalaf avait souri face à moi : c’était à n’en pas douter le sourire de la victoire, celui que j’ai vu dans les yeux et sur le visage de toutes les femmes du Rojava. Ce sourire honorable qui a détruit le patriarcat. Défendre le Rojava, oui, c’est défendre l’honneur de ce sourire !
Traduit de l’anglais par la rédaction de Ballast | « Hevrin Khalaf and the spirit of the democratic nation », 24 octobre 2019, Roarmag.
Toutes les photographies sont de Loez.
- En 2018, la population administrée par l’Administration autonome du Rojava compte environ 6 millions d’habitants — près de 60 % d’entre eux sont kurdes. Le Contrat social du Rojava, né de la révolution, s’énonçait ainsi : « Nous, peuple des régions autonomes démocratiques d’Afrîn, de Jazîra et Kobanê, confédération de Kurdes, Arabes, Assyriens, Chaldéens, Araméens, Turkmènes, Arméniens et Tchétchènes, déclarons et établissons librement et solennellement cette charte rédigée conformément aux principes de l’autonomie démocratique. » Toutes les notes sont de la rédaction.[↩]
- Petite ville du nord-est de la Syrie — Al-Qahtaniya, en arabe.[↩]
- Il s’agit de l’un des concepts essentiels du confédéralisme démocratique. Cette théorie politique a été formulée par Abdullah Öcalan après qu’il a tourné la page de l’indépendantisme léniniste et découvert les travaux du penseur écologiste et communiste libertaire Murray Bookchin. Ce corpus idéologique est promu par l’ensemble des mouvements révolutionnaires kurdes qui gravitent autour du Koma Civakên Kurdistan (KCK) — en Turquie, en Syrie, en Iran et en Irak.[↩]
- Il s’agit là d’un autre concept développé par Öcalan dans le cadre du confédéralisme démocratique.[↩]
- Dans le sud-est de la Turquie.[↩]
- Aïn al-Arab, en arabe.[↩]
- Abdulkerim Saruhan.[↩]
- Enver Muslim.[↩]
- Hevi Mustafa.[↩]
REBONDS
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