Zoopolis — penser une société sans exploitation animale

20 octobre 2018


Entretien inédit pour le site de Ballast

Les effets de la consom­ma­tion de viande sur la san­té et l’environnement sont bien connus : l’é­le­vage est l’une des pre­mières causes du réchauf­fe­ment cli­ma­tique1 et le GIEC le mar­tèle : il n’est pas de futur viable sans réduc­tion dras­tique de la pro­duc­tion car­née et lai­tière. Parallèlement, la lutte contre l’ex­ploi­ta­tion ani­male se ren­force chaque mois un peu plus, par-delà les impor­tantes diver­gences stra­té­giques qui la frac­tionnent — entre cou­rants réfor­mistes et illé­ga­listes. S’il est aisé de cer­ner les contours de cette lutte, il s’a­vère plus dif­fi­cile d’i­ma­gi­ner l’après : à quoi res­sem­ble­raient nos socié­tés une fois ladite exploi­ta­tion abo­lie ? Les phi­lo­sophes cana­diens Sue Donaldson et Will Kymlicka ont ten­té d’y répondre avec le désor­mais clas­sique Zoopolis — Une théo­rie poli­tique des droits des ani­maux : ils pro­posent d’ac­cor­der un ensemble de droits dif­fé­ren­ciés aux ani­maux selon trois caté­go­ries : une forme de citoyen­ne­té pour les ani­maux domes­tiques, la sou­ve­rai­ne­té pour les ani­maux sau­vages sur leurs ter­ri­toires, un sta­tut de résident pour les ani­maux limi­naires2. Nous les avons inter­ro­gés sur cette « zoopolitique ».


« Le mou­ve­ment de défense des ani­maux est dans l’impasse » sont les pre­miers mots de votre ouvrage. Sept ans après, tirez-vous le même constat ?

Oui. Nous ferions la même ana­lyse. Nous avons été agréa­ble­ment sur­pris par l’accroissement rapide du véga­nisme, qui est véri­ta­ble­ment « mains­tream » dans cer­tains pays. Il y a donc eu des chan­ge­ments signi­fi­ca­tifs au niveau des choix indi­vi­duels des consom­ma­teurs, grâce, sur­tout, à la mobi­li­sa­tion autour de la cause ani­male. Mais au niveau des lois et des poli­tiques publiques — qui forment notre objec­tif prin­ci­pal —, nous ne consta­tons pas de chan­ge­ment pro­fond. Les éco­no­mies occi­den­tales reposent encore lar­ge­ment sur l’exploitation des ani­maux. Il n’y a pas eu de ten­ta­tive sérieuse des gou­ver­ne­ments pour repen­ser le « com­plexe ani­ma­lier-indus­triel », bien que les coûts sani­taires, envi­ron­ne­men­taux et la souf­france ani­male soient chaque jour plus évi­dents. L’expansion de l’élevage figure encore par­mi leurs objec­tifs affi­chés et les orga­ni­sa­tions inter­na­tio­nales sou­tiennent encore la dif­fu­sion de cet éle­vage inten­sif dans les pays en déve­lop­pe­ment. Les modèles de déve­lop­pe­ment dans le monde entier conti­nuent de détruire les habi­tats des ani­maux sau­vages et accroissent l’extinction des espèces. Les cam­pagnes pour la cause ani­male dont l’objectif était de chan­ger ces poli­tiques d’État ont lar­ge­ment échoué : elle se sont mon­trées inef­fi­caces dans le com­bat contre les struc­tures de base de l’oppression et de l’exploitation ani­male, qui conti­nue à croître et à s’intensifier.

Appliquer vos pro­po­si­tions néces­si­te­rait un chan­ge­ment légis­la­tif pro­fond. Vous affir­miez pour­tant dans un entretien3 que « la loi, elle, est tou­jours à la traîne ». Comment avan­cer, alors ?

« Les cam­pagnes pour la cause ani­male dont l’objectif était de chan­ger ces poli­tiques d’État ont lar­ge­ment échoué : elle se sont mon­trées inefficaces. »

Il y a ici deux pro­blèmes dif­fé­rents. L’un est que la loi est en retard sur l’opinion publique pour ce qui est de l’amélioration des normes de bien-être ani­mal : la plu­part des son­dages montrent que la majo­ri­té veut une plus forte pro­tec­tion du bien-être ani­mal que celle qui existe actuel­le­ment. C’est par­ti­cu­liè­re­ment frap­pant dans notre pays, au Canada, où le gouffre entre l’opinion publique et les normes juri­diques est consi­dé­rable. Mais même si nous réglions cette ques­tion, cela ne régle­rait pas le pro­blème plus pro­fond que nos socié­tés et nos éco­no­mies sont construites sur l’exploitation des ani­maux. Et ce n’est pas — ou pas seule­ment — une ques­tion légale. Il s’agit fon­da­men­ta­le­ment d’un manque d’imagination : la plu­part des citoyens ne peuvent pas ima­gi­ner un monde dans lequel notre nour­ri­ture, nos habits, la recherche et les diver­tis­se­ments ne se fassent pas sur le dos des ani­maux. On doit mon­trer aux gens que nous pou­vons nous nour­rir et nous habiller sans faire de mal aux ani­maux, et en même temps mon­trer que nous pou­vons avoir d’importantes rela­tions avec les ani­maux qui n’impliquent pas leur exploi­ta­tion. Le mou­ve­ment des droits des ani­maux a très bien mis en évi­dence le fait que le sta­tu quo nuit aux ani­maux, mais nous devons faire mieux en ima­gi­nant l’avenir et en le par­ta­geant avec le grand public.

Sans ce chan­ge­ment cultu­rel plus large, le chan­ge­ment juri­dique est peu sus­cep­tible de conduire à une trans­for­ma­tion. La recon­nais­sance par l’Union euro­péenne des ani­maux en tant qu’êtres sen­tients est un bon exemple. Puisque, les gens ne peuvent ima­gi­ner un monde qui ne dépende pas de l’exploitation ani­male, la recon­nais­sance des ani­maux comme êtres sen­tients est sim­ple­ment deve­nue une vitrine der­rière laquelle tout conti­nue comme avant. Cela sert à main­te­nir les idéo­lo­gies exis­tantes de l’« uti­li­sa­tion humaine » des ani­maux, plu­tôt que d’amener les gens à remettre en ques­tion ces idéo­lo­gies. Que se pas­se­rait-il si quelque chose condui­sait à un chan­ge­ment cultu­rel véri­ta­ble­ment trans­for­ma­teur ? Pour être francs, nous ne sommes pas par­ti­cu­liè­re­ment opti­mistes. Les réa­li­tés du chan­ge­ment cli­ma­tique exigent clai­re­ment que nous aban­don­nions ou rédui­sions radi­ca­le­ment l’élevage, mais à ce jour les indi­ca­teurs laissent à pen­ser que peu de gens sont prêts à recon­naître ces réa­li­tés. Cela sug­gère qu’en tant que socié­té, nous sommes dépen­dants de l’exploitation ani­male, à tel point qu’elle est imper­méable aux argu­ments ration­nels. D’un autre côté, les ten­dances concer­nant le véga­nisme sont encou­ra­geantes, et il y a des pro­jets enthou­sias­mants qui explorent de nou­veaux types de rela­tions inter-espèces. Donc à côté de notre pro­fonde dépen­dance à l’exploitation ani­male, nous voyons aus­si une immense soif de trou­ver de nou­velles façons d’interagir avec les ani­maux. Nous n’avons pas de for­mule magique pour résoudre le pre­mier pro­blème, mais nous espé­rons que notre propre tra­vail peut aider à nour­rir ce dernier.

(Pentti Sammallahti)

Certaines voix avancent que les pro­ces­sus de domes­ti­ca­tion ont aus­si béné­fi­cié aux ani­maux, ce que vous qua­li­fiez de mythe. Pourquoi est-ce faux ?

Le pro­ces­sus his­to­rique de domes­ti­ca­tion est fon­da­men­ta­le­ment celui d’une ins­tru­men­ta­li­sa­tion des ani­maux. Même si l’on recon­naît que les ani­maux ont acti­ve­ment pris part à ce pro­ces­sus, l’intention (et l’ac­tion effec­tive) des humains sont allées dans le sens d’une réclu­sion, d’une vio­lence et d’une mani­pu­la­tion de la repro­duc­tion sélec­tive des ani­maux tou­jours plus grandes, de manière à les rendre plus utiles pour nous. Dans de nom­breux cas, cela implique de sélec­tion­ner pour l’é­le­vage des carac­té­ris­tiques nocives pour les ani­maux eux-mêmes — c’est le cas des pou­lets à griller qui gran­dissent si vite qu’ils ne peuvent pas tenir sur leurs propres pattes. Mais même quand la repro­duc­tion sélec­tive ne cause pas de dom­mages phy­siques, elle est liée à une idéo­lo­gie humaine supré­ma­ciste de l’usage : la domes­ti­ca­tion est fon­dée sur l’idée que les ani­maux sont une caste qui existe pour nous ser­vir, et qui peut être mode­lée pour nous ser­vir mieux. Il n’y a rien de mutuel ou de réci­proque : per­sonne ne pense que les humains devraient être éle­vés sélec­ti­ve­ment pour mieux ser­vir les ani­maux. La domes­ti­ca­tion a donc été un pilier cen­tral de toute l’infrastructure de l’oppression ani­male. Par exemple, la dési­gna­tion des ani­maux comme des « pro­prié­tés » dans la loi est liée à la domes­ti­ca­tion. La repro­duc­tion sélec­tive, le sta­tut de pro­prié­té et l’instrumentalisation sont des dimen­sions inti­me­ment liées de la domes­ti­ca­tion, et elles sont toutes oppres­sives pour les animaux.

Votre concep­tion des droits des ani­maux est « une exten­sion logique de la doc­trine des droits de l’homme », dites-vous. Quel est donc votre rap­port à la phi­lo­so­phie humaniste ?

« La domes­ti­ca­tion est fon­dée sur l’idée que les ani­maux sont une caste qui existe pour nous ser­vir, et qui peut être mode­lée pour nous ser­vir mieux. »

Il y a un débat inté­res­sant aujourd’hui par­mi les huma­nistes sur la manière de com­prendre le fon­de­ment des droits humains. Par le pas­sé, les droits humains étaient sou­vent défen­dus comme une façon de res­pec­ter la ratio­na­li­té et l’autonomie humaine — nous pour­rions appe­ler cela « l’humanisme ratio­na­liste ». Mais depuis les années 1980, beau­coup de gens dans le mou­ve­ment pour les droits humains ont contes­té cette vision pour pro­po­ser ce qui est fré­quem­ment appe­lé « l’humanisme cor­po­rel ». Dans cette pers­pec­tive, la rai­son pour laquelle les humains ont besoin de droits n’est ni notre ratio­na­li­té ni notre auto­no­mie, c’est plu­tôt notre vul­né­ra­bi­li­té cor­po­relle, c’est-à-dire le fait que nous sommes des êtres incar­nés avec des besoins phy­siques et sociaux qui exigent des types par­ti­cu­liers de rela­tions sociales. L’extension des droits humains aux per­sonnes ayant des défi­ciences cog­ni­tives ou aux enfants est dif­fi­cile à défendre en termes d’humanisme ratio­na­liste. En termes d’humanisme cor­po­rel, cela prend tout son sens. Selon nous, le tour­nant vers cet huma­nisme per­met de mon­trer pour­quoi les droits humains et les droits des ani­maux vont de pair. Si la base des droits humains est la vul­né­ra­bi­li­té cor­po­relle, alors les ani­maux par­tagent évi­dem­ment cette caractéristique.

Fonder les droits sur une vul­né­ra­bi­li­té par­ta­gée nous aide, qui plus est, à expli­ci­ter la signi­fi­ca­tion de la liste des droits humains. Selon l’humanisme ratio­na­liste, les droits humains doivent sans cesse œuvrer à nous sépa­rer du reste des ani­maux ; ils doivent par consé­quent se concen­trer sur les carac­té­ris­tiques qui nous dis­tinguent des ani­maux. Mais en réa­li­té, le régime des droits humains se concentre sur­tout sur la pro­tec­tion des besoins et des inté­rêts que nous par­ta­geons avec d’autres ani­maux. L’humanisme ratio­na­liste n’a jamais été en mesure de par­ti­cu­liè­re­ment bien défendre ces droits humains-là. Cet huma­nisme n’est donc pas seule­ment médiocre pour les droits des ani­maux, c’est aus­si une mau­vaise défense des droits humains. L’humanisme cor­po­rel, en revanche, offre une défense plus com­plète des droits humains et invite simul­ta­né­ment à leur exten­sion aux autres ani­maux. Cependant, la tran­si­tion de l’humanisme ratio­na­liste au cor­po­rel n’est cer­tai­ne­ment pas com­plète, et elle est sujette à des contes­ta­tions et des contre­coups dans la com­mu­nau­té des droits humains. Un des points de dis­corde tient, jus­te­ment, dans le fait que l’humanisme cor­po­rel n’est pas en mesure d’expliquer pour­quoi les droits ne sont pas éten­dus aux ani­maux. Certaines théo­ries des droits humains et leurs pro­mo­teurs s’accrochent à l’humanisme ratio­na­liste non pas parce qu’il offre une expo­si­tion convain­cante des droits humains, mais sim­ple­ment parce qu’il donne une bonne rai­son pour ne pas inclure les ani­maux. Ce type d’exceptionnalisme humain et de supré­ma­cisme est pro­fon­dé­ment ancré dans cer­tains milieux de défense des droits humains. Sur le long terme, nous espé­rons, et nous nous atten­dons à ce que l’humanisme cor­po­rel devienne l’approche domi­nante pour les droits humains. Si c’est le cas, les pers­pec­tives d’alliances avec les droits des ani­maux vont croître.

(Pentti Sammallahti)

Selon vous, l’approche par la citoyen­ne­té serait la plus à même de nouer des alliances poli­tiques, à la fois avec des éco­lo­gistes sou­cieux de pré­ser­ver les éco­sys­tèmes (qui ne se pré­oc­cupent pas du sort indi­vi­duel des bêtes) et avec les « amis des ani­maux » (qui se sou­cient d’un cer­tain bien-être ani­mal sans remettre en cause leur exploi­ta­tion). Une théo­rie morale doit-elle en par­tie être gui­dée par la stratégie ?

En tant que phi­lo­sophes poli­tiques, les argu­ments moraux doivent être d’abord et avant tout tes­tés sur la soli­di­té ration­nelle de leurs pré­misses et de leurs conclu­sions, plu­tôt que sur leur valeur stra­té­gique. Quand nous embras­sons le modèle citoyen­niste, c’est avant tout parce que nous consi­dé­rons qu’il per­met de sai­sir les exi­gences réelles de jus­tice dans notre rela­tion avec les ani­maux domes­ti­qués. Nous l’adopterions même s’il y avait moins de pos­si­bi­li­tés d’alliances. Ceci dit, quand nous avons écrit Zoopolis, nous avons été frap­pés par le fait que les théo­ries exis­tantes des droits ani­maux avaient lamen­ta­ble­ment échoué à obte­nir un sou­tien, même par­mi les éco­lo­gistes et les « amis des ani­maux », dont on pour­rait pen­ser qu’ils sont des alliés natu­rels de la cause ani­male. Nous avons donc beau­coup réflé­chi pour com­prendre si les éco­lo­gistes et les amis des ani­maux avaient sai­si cer­tains pans de la jus­tice que les théo­ries stan­dards des droits des ani­maux auraient ratés. C’est pré­ci­sé­ment ce à quoi nous sommes arri­vés : les éco­lo­gistes avaient rai­son quand ils disaient que la théo­rie tra­di­tion­nelle des droits des ani­maux avait négli­gé une large varié­té de torts que nous infli­geons aux ani­maux sau­vages. Et les « amis des ani­maux » avaient rai­son quand ils disaient que cette théo­rie lais­sait de côté cer­taines valeurs impor­tantes des rela­tions humains/animaux. Nous avons donc incor­po­ré ces torts et ces valeurs dans notre théo­rie, non pas comme une conces­sion pour par­ve­nir à des alliances, mais parce que nous les avons recon­nues comme de véri­tables consi­dé­ra­tions morales. Bien enten­du, les mili­tants et les pra­ti­ciens sur le ter­rain doivent sou­vent adap­ter les théo­ries — dont la nôtre — pour éta­blir des alliances locales sur des ques­tions par­ti­cu­lières. Nous ne sommes pas des puristes quand il s’agit de mili­tan­tisme. Mais, en tant que cher­cheurs, notre but lorsque nous avons écrit le livre était de ten­ter d’identifier au mieux ce que la jus­tice exige réellement.

Donner la citoyen­ne­té aux ani­maux domes­tiques, consi­dé­rés comme membres de nos socié­tés, repose sur trois piliers : la rési­dence (les ani­maux sont chez eux), l’intégration (prise en compte de leurs inté­rêts) et l’agentivité (par­ti­ci­pa­tion à l’élaboration de règles coopé­ra­tives). Ce que font les sanc­tuaires — qui recueillent des ani­maux aban­don­nés, sau­vés d’abattoirs ou de labo­ra­toires — est-il une mise en œuvre de ces principes ?

« Quand nous embras­sons le modèle citoyen­niste, c’est parce qu’il per­met de sai­sir les exi­gences réelles de jus­tice dans notre rela­tion avec les ani­maux domestiqués. »

La plu­part des sanc­tuaires pour ani­maux font du sau­ve­tage d’urgence et ne fonc­tionnent pas comme des modèles de socié­té inter-espèces. Dans les hor­ribles condi­tions actuelles de l’exploitation ani­male, ils arrivent à sau­ver des cen­taines d’individus, à sub­ve­nir à leurs besoins essen­tiels, et dans une cer­taine mesure à assu­rer leur sécu­ri­té de rési­dence. C’est une entre­prise extrê­me­ment utile, et les per­sonnes (prin­ci­pa­le­ment des femmes) qui s’engagent dans les sanc­tuaires accom­plissent des miracles dans des cir­cons­tances dif­fi­ciles. Cependant, beau­coup d’entre eux affirment assez clai­re­ment que leur objec­tif est de dépas­ser cela. Ils consi­dèrent leur tra­vail comme un moindre mal dans un monde en guerre avec les ani­maux. Leur but est de mettre fin à la guerre, pas de tra­vailler en détail sur la façon dont une socié­té inter-espèces équi­table pour­rait fonc­tion­ner. Bien que les inté­rêts des ani­maux soient sans aucun doute pris en compte dans la plu­part des sanc­tuaires, ces inté­rêts sont régu­liè­re­ment dépas­sés par les exi­gences de la guerre.

Par exemple, de nom­breux sanc­tuaires ont pour objec­tif d’éduquer le public aux hor­reurs de l’élevage, et orga­nisent donc des visites gui­dées et des pro­grammes pour les visi­teurs. La ges­tion de ces pro­grammes a de nom­breuses impli­ca­tions sur la struc­ture d’un sanc­tuaire et sur la vie des ani­maux — où et com­ment ils vivent, leurs rou­tines quo­ti­diennes, com­ment ils se côtoient —, des choix qui ne sont pas faits dans l’intérêt des ani­maux rési­dents, mais dans ceux de l’éducation au public et la col­lecte de fonds. Imaginez si vous viviez dans une com­mu­nau­té qui n’était pas faite pour répondre à vos besoins mais pour per­mettre un flux constant de visi­teurs qui veulent vous voir, prendre des pho­tos de vous, faire du yoga avec vous, ou orga­ni­ser leur mariage dans votre mai­son. Les ani­maux des sanc­tuaires ne sont pas consul­tés ni inclus dans l’élaboration des règles coopé­ra­tives, et leurs inté­rêts, bien que pris en compte dans une cer­taine mesure (en par­ti­cu­lier concer­nant le bien-être de base), sont dépas­sés par la prio­ri­té don­née au plai­doyer et à la col­lecte de fond. Il y a cepen­dant quelques sanc­tuaires avec une phi­lo­so­phie dif­fé­rente, ayant pour but d’ex­plo­rer dif­fé­rents modèles de socié­tés inter-espèces. Nous les appe­lons par­fois des « com­mu­nau­tés inten­tion­nelles », dis­tinctes des sanc­tuaires tra­di­tion­nels, puis­qu’elles ne visent pas seule­ment à four­nir un refuge sûr, mais aus­si à explo­rer de nou­velles façons de vivre ensemble. Nous créons actuel­le­ment un pro­jet de recherche pour apprendre de ces socié­tés inter-espèces inten­tion­nelles, qui s’en­gagent à créer une rela­tion qui se rap­proche beau­coup plus de la co-citoyenneté.

L’utilisation de pro­duits d’o­ri­gine ani­male ne relè­ve­rait pas obli­ga­toi­re­ment de l’exploitation : selon vous, la prin­ci­pale cause fai­sant pas­ser de l’une à l’autre est la com­mer­cia­li­sa­tion. Une uti­li­sa­tion de ces pro­duits dans une zoo­po­li­tique res­pec­tant le sta­tut et les droits des ani­maux res­te­rait donc une pra­tique marginale ?

Oui. Tout comme l’utilisation de pro­duits d’origine humaine est assez mar­gi­nale, et sou­mise à un exa­men accru. Quand nous lais­sons nos che­veux cou­pés au salon de coif­fure, cela ne semble pas pro­blé­ma­tique si quelqu’un décide de les col­lec­ter pour en faire des per­ruques, du rem­bour­rage de mate­las, ou des nids d’oisillons. De la même façon, si nos eaux-usées sont réuti­li­sés comme engrais, cela appa­raît comme une uti­li­sa­tion bénigne des pro­duits du corps humain. Quand il s’agit d’ovules, de sperme, de sang, de lait mater­nel ou de cel­lules souches, nous exi­geons habi­tuel­le­ment un exa­men plus appro­fon­di. De nom­breuses per­sonnes ne sont à l’aise avec l’utilisation ou le don de ces « pro­duits » qu’à la condi­tion qu’il y ait un consen­te­ment éclai­ré, et uni­que­ment s’il n’y a pas d’incitations finan­cières. Pour les autres ani­maux, nous pour­rions donc opé­rer une dis­tinc­tion simi­laire entre les pro­duits de leurs corps qu’ils perdent auto­ma­ti­que­ment et aban­donnent (poils, excré­ments), et ceux qui ne peuvent être récu­pé­rés que par une ingé­rence sur leurs corps, néces­si­tant coopé­ra­tion et consen­te­ment (par exemple pour obte­nir du lait ou du sperme). De nom­breux théo­ri­ciens tra­vaillent sur la ques­tion du consen­te­ment ani­mal, et sur le fait de savoir si nous pou­vons créer (ou devrions même essayer de créer) les condi­tions dans les­quelles les ani­maux pour­raient consen­tir et coopé­rer, dans un pro­ces­sus de don de leur lait, œufs ou laine inutiles et non sou­hai­tés. Des ques­tions connexes émergent quant à savoir si les ani­maux peuvent consen­tir à cer­taines formes de tra­vail. Ce sont des pro­blèmes com­plexes, que nous ne pou­vons régler qu’en four­nis­sant aux ani­maux des moyens signi­fi­ca­tifs pour par­ti­ci­per, contes­ter et contrô­ler la nature de leurs rela­tions avec nous.

(Pentti Sammallahti)

« Rien ne nous per­met de savoir si les ani­maux domes­tiques sou­hai­te­ront tou­jours for­mer une com­mu­nau­té mixte avec nous », énon­cez-vous. Est-ce à dire qu’é­lar­gir la notion de citoyen­ne­té aux ani­maux domes­tiques relève d’une forme de pari ?

En par­lant des ima­gi­naires poli­tiques d’un ave­nir meilleur, Kathi Weeks a pré­ve­nu que nous ne devrions pas essayer « d’en savoir trop, trop tôt ». C’est un bon conseil. La pen­sée uto­pique clas­sique a sou­vent une nature sta­tique et oppres­sive parce qu’elle est trop pres­crip­tive, cela impose un modèle plu­tôt que d’inviter les gens à construire ensemble une vision de l’avenir. Si nous pre­nons au sérieux la citoyen­ne­té des ani­maux domes­tiques, cela signi­fie que l’avenir ne dépend pas uni­que­ment des humains. L’avenir est quelque chose que nous co-écri­rons avec les ani­maux domes­tiques. Et cela inclut la ques­tion même de savoir si ils veulent res­ter avec nous dans une socié­té mixte. Les humains et les ani­maux domes­tiques par­tagent la capa­ci­té remar­quable de socia­bi­li­té inter-espèces — avoir des rela­tions sociales entre les espèces — et nous pen­sons que cette capa­ci­té rend entiè­re­ment pos­sible de nou­velles formes d’épanouissement, et peut énor­mé­ment contri­buer à la qua­li­té de vie de tous les membres de la socié­té, humains ou ani­maux. Donc, si les ani­maux domes­tiques ont le pou­voir de façon­ner les règles de notre socié­té mixte, nous espé­rons et nous nous atten­dons à ce que nombre d’entre eux choi­sissent de vivre et de tra­vailler avec nous. Mais comme vous dites, c’est un pari, et cela néces­si­te­ra beau­coup de tra­vail de notre part pour gagner la confiance des ani­maux domes­tiques afin d’ex­plo­rer ce futur ensemble. Et si cer­tains d’entre eux trouvent qu’en fin de compte les contraintes pour vivre avec nous dans une socié­té mixte sont into­lé­rables, qu’ils partent peu à peu et retournent dans la nature, c’est tout aus­si accep­table. Le but est de savoir quels types de rela­tions, le cas échéant, les ani­maux domes­tiques veulent en réa­li­té avoir avec nous.

Reconnaître la sou­ve­rai­ne­té d’une com­mu­nau­té d’animaux sau­vages ne signi­fie pas avoir le droit de la gou­ver­ner. Mais cela n’im­plique pas non plus une absence d’interactions. Ainsi, on irait dans leurs ter­ri­toires en tant que visi­teurs. Cela pose la ques­tion des fron­tières : doit-on ima­gi­ner de nou­velles déli­mi­ta­tions entre notre com­mu­nau­té et celle des ani­maux sauvages ?

« Nous sommes au cœur d’un déclin dévas­ta­teur et d’une extinc­tion des popu­la­tions d’animaux sau­vages. Nous devons fixer des limites à l’expansion des acti­vi­tés humaines pour mettre un terme à ce désastre. »

Nous sommes au cœur d’un déclin dévas­ta­teur et d’une extinc­tion des popu­la­tions d’animaux sau­vages. Nous devons fixer des limites à l’expansion des acti­vi­tés humaines pour mettre un terme à ce désastre, et cela signi­fie sans aucun doute des fron­tières, des régu­la­tions, et des limites à la crois­sance de la popu­la­tion mon­diale. E.O. Wilson a pro­po­sé que nous réser­vions sim­ple­ment la moi­tié du monde pour la faune sau­vage, où les ins­tal­la­tions humaines et l’activité seraient consi­dé­ra­ble­ment limi­tées. Ce n’est pas aus­si simple que de tra­cer une ligne sur une carte. Les humains par­ta­ge­ront tou­jours la terre et les res­sources avec d’autres ani­maux, et nous devons donc trou­ver des façons de vivre bien plus sou­te­nables, pas sim­ple­ment nous enle­ver de l’équation. Mais l’idée que les humains pour­raient se reti­rer d’une grande par­tie de la terre n’est pas folle. Il y a des façons assez évi­dentes de le faire. Les éco­no­mies capi­ta­listes reposent sur des cycles de crois­sance per­pé­tuelle de la pro­duc­tion et de la consom­ma­tion qui dépassent lar­ge­ment nos besoins, tout en entrai­nant la des­truc­tion des ani­maux et de leurs mondes. Nous n’avons pas besoin de vivre de cette façon. L’exemple le plus frap­pant est peut-être l’explosion de l’élevage lors du siècle der­nier, avec ses coûts éthiques et envi­ron­ne­men­taux dévas­ta­teurs. Nous devons inver­ser cette ten­dance. En adop­tant une ali­men­ta­tion végé­tale, nous pour­rions tou­jours nour­rir les humains, tout en libé­rant d’immenses zones de culture et de pâtu­rage pour les remettre à l’é­tat de nature. Cela assu­re­rait un espace pour les ani­maux sau­vages, crée­rait des forêts pour atté­nuer le chan­ge­ment cli­ma­tique, tout en met­tant fin au violent assu­jet­tis­se­ment des ani­maux d’élevage. Les pro­blèmes et les solu­tions sont étroi­te­ment liés.

Vous éta­blis­sez un paral­lèle : la sou­ve­rai­ne­té des ani­maux sau­vages serait com­pa­rable à celle des peuples humains (où chaque peuple est sou­ve­rain ou devrait pou­voir l’être). Mais il existe de nom­breux peuples, avec des formes de sou­ve­rai­ne­té et des inté­rêts dif­fé­rents. Pourquoi consi­dé­rer « les ani­maux sau­vages » comme un seul ensemble homogène ?

En fait, l’une des rai­sons pour les­quelles nous fai­sons appel à l’idée de sou­ve­rai­ne­té, c’est pré­ci­sé­ment parce qu’elle per­met une hété­ro­gé­néi­té. Il n’est pas néces­saire que tous les ani­maux sau­vages par­tagent un même mode de vie, ou que tous les ani­maux sau­vages d’un habi­tat par­ti­cu­lier vivent en har­mo­nie. Nous recon­nais­sons plei­ne­ment que dif­fé­rents groupes d’animaux sau­vages ont une grande varié­té d’intérêts dis­tincts et sou­vent concur­rents. L’objectif de la sou­ve­rai­ne­té, consiste cepen­dant à atti­rer l’attention sur cer­tains types de menaces. La sou­ve­rai­ne­té offre une pro­tec­tion contre des menaces par­ti­cu­lières envers l’intérêt col­lec­tif. Certaines sont des pro­tec­tions néga­tives — contre l’invasion, l’asservissement, le vol de res­sources par des per­sonnes exté­rieures. La plu­part des ani­maux sau­vages ont inté­rêt à être pro­té­gés de l’expansion humaine et de la des­truc­tion éco­lo­gique. Donc même si dif­fé­rents types de com­mu­nau­tés ani­males pour­raient par­ta­ger une région éco­lo­gique, et que nombre de leurs inté­rêts soient diver­gents, leurs inté­rêts se recoupent néan­moins for­te­ment dans cet aspect essentiel.

(Pentti Sammallahti)

La sou­ve­rai­ne­té défend aus­si des inté­rêts plus posi­tifs, comme les droits col­lec­tifs à l’autodétermination. Toutes les com­mu­nau­tés d’animaux sau­vages n’ont pas un inté­rêt à l’autodétermination col­lec­tive, mais il y en a beau­coup — les élé­phants, les hyènes, les loups, les baleines et d’innombrables autres — qui forment des socié­tés très com­plexes enga­gées dans des prises de déci­sions col­lec­tives. Ces ani­maux devraient être recon­nus comme dis­po­sant de droits sou­ve­rains à l’autodétermination, les pro­té­geant de la colo­ni­sa­tion et de la « ges­tion » par les humains. Ces ani­maux par­tagent des habi­tats avec d’autres qui pour­raient ne pas avoir le même inté­rêt à l’autodétermination, et pour­raient même béné­fi­cier d’une « ges­tion » par les humains qui s’engagent à prendre leurs inté­rêts au sérieux. En pra­tique cepen­dant, il semble peu pro­bable que les humains puissent inter­ve­nir dans la vie des rats des champs ou des sala­mandres sans per­tur­ber les éco­sys­tèmes dont dépendent les ani­maux auto­dé­ter­mi­nés. Notre argu­ment concer­nant la sou­ve­rai­ne­té des ani­maux sau­vages est donc des­ti­né à mettre l’accent sur deux reven­di­ca­tions clés : pre­miè­re­ment les ani­maux sau­vages ont le droit à la terre, aux res­sources et aux éco­sys­tèmes dont ils ont besoin pour vivre. C’est un inté­rêt qu’ils par­tagent tous — mal­gré l’infinie varié­té d’animaux sau­vages et de leurs inté­rêts —, et qui est mieux pris en compte en réser­vant des ter­ri­toires où les humains ne sont pas sou­ve­rains. Deuxièmement, de nom­breux ani­maux sau­vages ont un inté­rêt col­lec­tif à l’autodétermination : cela doit contraindre cer­taines déci­sions concer­nant l’intervention humaine ou la ges­tion de leurs communautés.

Si les mou­ve­ments ani­ma­listes parlent beau­coup des ani­maux domes­tiques, et dans une cer­taine mesure des ani­maux sau­vages, ils semblent moins bavards sur les ani­maux limi­naires [pigeons, rats, renards, chauve-sou­ris, etc., ndlr], qui sont d’ailleurs les moins pro­té­gés juri­di­que­ment et moralement…

« Ce chan­ge­ment de pers­pec­tive en est à ses bal­bu­tie­ments, mais les urba­nistes, les archi­tectes, les pay­sa­gistes et les ges­tion­naires de la faune recon­naissent peu à peu que nous habi­tons des com­mu­nau­tés multi-espèces. »

Les ani­maux limi­naires passent à tra­vers les mailles du filet parce qu’ils ne rentrent pas par­fai­te­ment dans les dis­cours éco­lo­giques tra­di­tion­nels et dans ceux des droits des ani­maux. Beaucoup d’écologistes se sont concen­trés sur la pré­ser­va­tion du « carac­tère sau­vage » des ani­maux sau­vages, de sorte que les ani­maux limi­naires sont déjà com­pro­mis — ils sont vus comme inau­then­tiques ou souillés, ou sim­ple­ment inin­té­res­sant en rai­son de leur contact et de leur adap­ta­tion avec les humains et leurs habi­tats. En revanche, de nom­breux théo­ri­ciens des droits des ani­maux se sont pen­chés sur le cas des ani­maux domes­tiques, car ce sont les ani­maux que nous domi­nons, oppres­sons et tuons le plus, et qui ont le plus besoin de « libé­ra­tion » du contrôle humain. Donc les éco­lo­gistes veulent pré­ser­ver les ani­maux « sau­vages » de l’influence humaine, et les théo­ri­ciens des droits des ani­maux veulent libé­rer les ani­maux domes­tiques du contrôle humain. Aucune de ces pers­pec­tives ne laisse de place au fait que de nom­breux ani­maux non domes­tiques nous cherchent. Les ani­maux sont aus­si des agents, et par­fois ils sont atti­rés par les humains et les envi­ron­ne­ments humains pour les oppor­tu­ni­tés qu’ils y trouvent. Le sta­tut juri­dique et poli­tique de tels ani­maux limi­naires est très pré­caire, en par­tie parce qu’ils ne sont pas suf­fi­sam­ment « sau­vages » pour être pro­té­gés par les lois envi­ron­ne­men­tales, et ne sont pas assez contrô­lés pour être pro­té­gés par les lois sur la façon dont les humains devraient régir les ani­maux qu’ils uti­lisent. Cependant, il y a une prise de conscience crois­sante de l’importance des ani­maux limi­naires. Les champs de la géo­gra­phie ani­male, de l’ethnographie mul­ti-espèces et le tour­nant poli­tique dans la théo­rie des droits des ani­maux ont tous com­men­cé à se concen­trer sur les rela­tions humain/animal dans les « zones de contact ». Et il est de plus en plus recon­nu que non seule­ment les inter­ac­tions humain/animal sont inévi­tables et crois­santes, mais qu’au rythme où nous allons, seuls les ani­maux capables de s’adapter aux humains sont sus­cep­tibles de sur­vivre. Il est indis­pen­sable de par­ti­ci­per à l’éthique et à la gou­ver­nance de nos rela­tions avec ces ani­maux liminaires.

Vous remar­quez que ces ani­maux limi­naires sont ren­dus visibles quand ils nous causent des pro­blèmes (par leur nombre ou leur com­por­te­ment). Peut-on ima­gi­ner, dans l’a­ve­nir, que les rats ou les pigeons ne soient plus consi­dé­rés comme des « nui­sibles » mais des rési­dents de nos communautés ?

Nous voyons déjà du chan­ge­ment. Les poli­tiques de ges­tion de la faune évo­luent vers des stra­té­gies de coexis­tence comme alter­na­tive à la vio­lence et à l’éradication. Il y a aus­si une prise de conscience crois­sante que la pro­tec­tion des ani­maux et de leurs éco­sys­tèmes ne consiste pas seule­ment à conser­ver des terres sau­vages « là-bas », mais à créer et à pro­té­ger des espaces pour les ani­maux dans nos bâti­ments, jar­dins, quar­tiers et villes. Ce chan­ge­ment de pers­pec­tive en est à ses bal­bu­tie­ments, mais les urba­nistes, les archi­tectes, les pay­sa­gistes et les ges­tion­naires de la faune recon­naissent peu à peu que nous habi­tons des com­mu­nau­tés mul­ti-espèces, et que cela demande une concep­tion et des poli­tiques plus tolé­rantes, inclu­sives et créa­tives. Le terme « zoo­po­lis » avait d’ailleurs été inven­té par Jennifer Wolch pour dési­gner pré­ci­sé­ment cette prise de conscience crois­sante de l’importance des ani­maux limi­naires dans la ville.


Traduit de l’anglais par Jean Ganesh et Léonard Perrin
Photo de ban­nière : Martin Stranka
Photo de vignette : Angela Kaja Ferro


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  1. L’ONU l’ex­pli­quait déjà en 2006. Voir éga­le­ment http://www.fao.org/docrep/018/i3437e/i3437e.pdf.
  2. Animaux non domes­ti­qués mais vivants par­mi nous.
  3. Voir Will Kymlicka : « Nos pra­tiques impliquent une souf­france ani­male immense pour un béné­fice humain négli­geable », Libération, 7 juillet 2017.

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