L’antispécisme ? une politique de l’émancipation


Texte inédit pour le site de Ballast

Pour accom­pa­gner la sor­tie de son der­nier ouvrage contre les végé­ta­riens et les véganes, le mili­tant éco­lo­giste Paul Ariès a lan­cé un appel dans les colonnes du Monde : pour « une jour­née avec 100 % de viandes » (« issu[e]s de sys­tèmes d’élevage res­pec­tueux des ani­maux et de l’environnement », bien sûr). Le texte, pré­pu­blié par le réseau No Vegan, est signé par un nombre consé­quent de mili­tants ou cadres du PCF, de la France insou­mise et d’Europe Écologie – Les Verts. Si les posi­tions de l’es­sayiste en matière de décrois­sance ou de socia­lisme du bien-vivre ne manquent assu­ré­ment pas d’in­té­rêt, on s’é­tonne de la vio­lence déployée, depuis 20 ans, par le rédac­teur en chef du men­suel Les Z’indigné(e)s dès lors qu’il est ques­tion d’an­tis­pé­cisme. Tour à tour accu­sés d’être bobos, néo­na­zis, idiots utiles du capi­ta­lisme ou par­ti­sans du jihad, celles et ceux qui refusent la consom­ma­tion de pro­duits d’o­ri­gine ani­male ou la tor­ture en labo­ra­toire se voient, en bloc, ain­si pré­sen­tés par l’in­té­res­sé à la télé­vi­sion publique : « Un bon ani­mal, pour un végane, c’est un ani­mal non-né ou un ani­mal mort, mais sans souf­frir. » Qu’est-ce donc, réel­le­ment, que l’an­tis­pé­cisme ? ☰ Par Elias Boisjean


1970. Nous sommes à Oxford, au nord de Londres. Un cli­ni­cien dis­tri­bue une bro­chure de sa confec­tion afin de dénon­cer, comme il le fait déjà par voie de presse, le trai­te­ment infli­gé aux ani­maux dans le cadre médi­cal. Son titre ? Speciesism. « Spécisme », en fran­çais. C’est ici la pre­mière occur­rence mon­diale du terme ; pour cause : le psy­cho­logue Richard D. Ryder en est l’inventeur. Qu’y lit-on ? Qu’il est acté, depuis Darwin, qu’il n’existe aucune dif­fé­rence de nature entre l’humain et les autres espèces ani­males : il n’y a qu’un « conti­nuum phy­sique1 », impli­quant un « conti­nuum moral ». Les ani­maux, pos­ses­seurs d’un sys­tème ner­veux, souffrent comme nous : rien ne sau­rait jus­ti­fier de les tor­tu­rer au nom des avan­cées scien­ti­fiques humaines, sauf à user d’un « argu­ment émo­tion­nel égoïste » et à faire preuve de spé­cisme. Tout comme l’idéologie raciste dis­cri­mine sys­té­mi­que­ment des indi­vi­dus appar­te­nant aux groupes domi­nés au nom de la « race », et l’idéologie sexiste au nom du « sexe », l’idéologie spé­ciste pro­meut la supré­ma­tie de l’Homo sapiens sur l’ensemble des espèces tout en hié­rar­chi­sant arbi­trai­re­ment celles-ci entre elles (en fonc­tion des pays, le chien se voit choyé ou embro­ché et la vache abat­tue ou sacra­li­sée). Les luttes révo­lu­tion­naires des années 1960 menées contre le racisme, le sexisme et la domi­na­tion de classe, pré­ci­se­ra Ryder, ont négli­gé les ani­maux. « Je détes­tais moi aus­si le racisme, le sexisme et le clas­sisme, mais pour­quoi s’ar­rê­ter là ? » Le concept ne sor­ti­ra de l’ombre que cinq ans plus tard, repris par le phi­lo­sophe aus­tra­lien Peter Singer dans les pages de son ouvrage, rapi­de­ment deve­nu un clas­sique, Animal Liberation.

La libération des animaux

« Sans l’é­lan contes­ta­taire à l’en­contre de l’im­pé­ria­lisme nord-amé­ri­cain et de la dis­cri­mi­na­tion frap­pant les Noirs, les femmes et les homo­sexuels, le mou­ve­ment ani­ma­liste, se sou­vien­dra Singer, n’au­rait pu prendre. »

Singer est alors végé­ta­rien2 depuis quatre ans et auteur d’un pre­mier essai, Démocratie et Désobéissance. Engagé en faveur de la léga­li­sa­tion de l’avortement et contre la guerre du Vietnam, il est depuis peu membre du Parti tra­vailliste de son pays. Contre « la tyran­nie que les humains exercent sur les autres espèces3 », le phi­lo­sophe oppose un « droit sem­blable à la vie ». Appartenir à une espèce ne peut être un cri­tère per­ti­nent pour juger de la qua­li­té d’une exis­tence et du droit qu’a un indi­vi­du, humain ou non-humain, à la mener ; une sou­ris, un fen­nec, une pie, une truite, un humain et un singe hur­leur ont la même légi­ti­mi­té à être sur cette pla­nète du sys­tème solaire. Il ne s’a­git donc en rien de trai­ter les ani­maux comme des humains (une bre­bis n’a que faire d’un tarif réduit à la biblio­thèque), mais de consi­dé­rer les inté­rêts et les souf­frances de chaque sujet de sa propre vie. Singer esquisse une his­toire de la supré­ma­tie humaine, sym­bo­li­que­ment inau­gu­rée par la Bible — on sait l’injonction « divine » faite aux grands pri­mates que nous sommes à domi­ner « les pois­sons de la mer, les oiseaux du ciel, les bes­tiaux, toutes les bêtes sau­vages4 » et à sou­mettre la Terre — puis aigui­sée par l’humanisme de la Renaissance, l’Homme s’af­fir­mant alors comme « la mesure de toute chose5 ».

Singer sera lu, ample­ment, et contes­té, tout autant, au sein du très hété­ro­clite mou­ve­ment ani­ma­liste inter­na­tio­nal. Pas plus qu’il ne serait per­ti­nent de cir­cons­crire la pen­sée anti­ca­pi­ta­liste à la seule œuvre de Marx, on ne peut tenir l’en­semble des pro­pos, par­fois contro­ver­sés6, du phi­lo­sophe uti­li­ta­riste7 pour repré­sen­ta­tifs de la pen­sée anti­spé­ciste, fon­ciè­re­ment tra­ver­sée de conflits et de contra­dic­tions. Sans l’é­lan contes­ta­taire à l’en­contre de l’im­pé­ria­lisme nord-amé­ri­cain et de la dis­cri­mi­na­tion frap­pant les Noirs, les femmes et les homo­sexuels, le mou­ve­ment ani­ma­liste, se sou­vien­dra Singer, n’au­rait pu prendre8. Un an après la paru­tion d’Animal Liberation nais­sait offi­ciel­le­ment le Front de libé­ra­tion ani­male, bien­tôt actif dans une qua­ran­taine de pays : l’heure n’est plus à la « pro­tec­tion » des ani­maux mais à l’« abo­li­tion » de l’« exploi­ta­tion » dont ils sont les vic­times. Le Front, à rebours de Singer, prô­ne­ra au besoin la « vio­lence » : sabo­tage, des­truc­tion de pla­te­formes de chasse ou de centres de pêche, incen­die de bou­che­ries, plas­ti­quage de labo­ra­toires, lettres pié­gées adres­sées à des indus­triels de la fourrure…

Kevin Horan

Animaux ou écologie : un faux dilemme

Paul Ariès n’en démord pas : les anti­spé­cistes sont « des anti-éco­los achar­nés9 ». Même son de cloche chez le socio­logue Bruno Latour, jurant que « les anti­spé­cistes com­battent l’écologie poli­tique10 ». Qu’est-ce à dire ? Les Cahiers anti­spé­cistes, organe his­to­rique, en France, de la théo­rie ani­ma­liste, n’ont jamais fait mys­tère de leur cri­tique de l’écologie. Du moins d’une cer­taine éco­lo­gie, et c’est là toute la nuance et donc l’en­jeu. « L’unité de base de l’é­co­lo­gisme est l’es­pèce11 », avance l’un de ses membres fon­da­teurs : au nom de l’équilibre de l’ordre natu­rel, les ani­maux ne sont pas consi­dé­rés comme des sin­gu­la­ri­tés, des indi­vi­dua­li­tés irrem­pla­çables et por­teuses d’intérêts propres, mais comme des blocs — au même titre que les plantes (dénuées, en l’état des connais­sances scien­ti­fiques, de sub­jec­ti­vi­té souf­frante). Le phi­lo­sophe état­su­nien Tom Regan, auteur du clas­sique Les Droits des ani­maux, enté­rine : « La phi­lo­so­phie éco­lo­giste ne prend pas au sérieux les indi­vi­dus ani­maux. Ce qui lui importe, c’est une sorte de tout mal défi­ni — qu’elle nomme la com­mu­nau­té bio­tique, ou l’é­co­sys­tème, ou autre­ment12. » Et l’on entend, à cette aune, pour­quoi les chas­seurs fran­çais, tout en cri­blant les forêts de plu­sieurs mil­liers de tonnes de plomb (et en abat­tant une bonne dizaine d’hu­mains, en moyenne, par an), peuvent sans iro­nie aucune s’avancer comme « les pre­miers éco­lo­gistes » de la nation.

« L’élevage est une ques­tion éco­lo­gique cru­ciale (au regard des dégâts envi­ron­ne­men­taux de pre­mier ordre qu’il pro­voque) et la dégra­da­tion des éco­sys­tèmes (eaux, forêts, sols) mal­mène les condi­tions de vie des ani­maux sauvages. »

Mais il faut toute la mau­vaise foi pam­phlé­taire de Paul Ariès pour s’en tenir à cet unique ver­sant cri­tique. Peter Singer affirme ain­si qu’être végé­ta­rien per­met d’établir « une nou­velle rela­tion aux ali­ments, aux plantes et à la nature13 », et que le refus de consom­mer des cadavres l’a rap­pro­ché « de la terre et des sai­sons ». Le cofon­da­teur des Cahiers anti­spé­cistes en appelle quant à lui à « un éco­lo­gisme non natu­ra­liste14 » : « L’écologie pour­rait très bien être la bonne ges­tion de la mai­son com­mune, la Terre, dans l’in­té­rêt de tous ses habi­tants […]. » Et ces mêmes Cahiers d’as­su­rer qu’il existe « une réelle proxi­mi­té entre la ques­tion éco­lo­gique et la ques­tion ani­male15 » : l’élevage est une ques­tion éco­lo­gique cru­ciale (au regard des dégâts envi­ron­ne­men­taux de pre­mier ordre qu’il pro­voque16), et la dégra­da­tion des éco­sys­tèmes (eaux, forêts, sols) mal­mène les condi­tions de vie des ani­maux sau­vages. On ne peut pas, pour­suivent les auteurs, « man­quer d’œuvrer à leur conver­gence » : toutes les espèces dépendent de cette pla­nète à pro­té­ger. D’où leur invi­ta­tion à « une éco­lo­gie sen­si­bi­liste, et non plus stric­te­ment huma­niste », entendre une éco­lo­gie poli­tique sou­cieuse de l’ensemble des espèces sen­tientes et sen­sibles17.

Narcisse humaniste

L’article a paru en 1996 dans un jour­nal ita­lien : l’an­thro­po­logue Claude Lévi-Strauss assure que le temps vien­dra où l’on regar­de­ra sans doute l’é­le­vage, la vente et la consom­ma­tion d’a­ni­maux tués comme on regar­dait, écœu­rés, les pra­tiques can­ni­bales18. Deux décen­nies plus tôt, il écri­vait, dans Anthropologie struc­tu­rale deux, que l’homme occi­den­tal avait ouvert « un cycle mau­dit » en oubliant sa condi­tion pre­mière d’être vivant, en éla­bo­rant la fable de la digni­té exclu­sive de notre espèce et en s’oc­troyant le droit de sépa­rer aus­si net­te­ment celle-ci de l’a­ni­mal. Cette gra­da­tion ins­tau­rée entre gran­deur et bas­sesse, cette fron­tière inven­tée et mise à notre dis­po­si­tion pour inven­to­rier, trier, hié­rar­chi­ser, ne res­tait qu’à la dépla­cer au besoin, à la tenir pour mou­vante, puis à « écar­ter des hommes d’autres hommes », à « reven­di­quer au pro­fit de mino­ri­tés tou­jours plus res­treintes le pri­vi­lège d’un huma­nisme cor­rom­pu aus­si­tôt né ». Paul Ariès, hor­ri­fié, s’é­rige en inlas­sable tra­queur des « sabo­teurs de l’humanisme19 » — ceux-là mêmes qui, en refu­sant d’é­gor­ger des poules, d’ap­plau­dir aux spec­tacles de cor­ri­da ou de por­ter du cuir, « éteignent les lumières dans la tête de nos enfants20 » ou tra­vaillent à l’ins­tau­ra­tion du mariage zoo­phile aux côtés des couples homo­sexuels21. En ce qu’il pose « l’homme pour fin et valeur suprême22 », l’humanisme fait en effet l’objet de vives cri­tiques au sein du mou­ve­ment anti­spé­ciste. Critiques tou­te­fois non systématiques.

William T. Hornaday

Le phi­lo­sophe Patrice Rouget, auteur de La Violence de l’humanisme, écrit ain­si : « De la même façon [que Dieu] a besoin de nous pour confir­mer sa nature sublime, nous avons besoin de l’animal pour cer­ti­fier et garan­tir notre supé­rio­ri­té onto­lo­gique, cer­ti­tude qui, sans lui, aurait toute chance de deve­nir vacillante23[…]. » En d’autres termes, l’espèce humaine, en vue de jus­ti­fier le rang qu’elle s’est choi­si — « une aris­to­cra­tie méta­phy­sique des­ti­née à régner sur le monde » — et, par voie de consé­quence, de légi­ti­mer « la plus ter­ri­fiante machi­ne­rie de des­truc­tion jamais inven­tée », l’abattoir, s’est bâti une « fic­tion », celle de son arra­che­ment à la nature. Pour l’es­sayiste Aymeric Caron, en revanche, l’antispécisme est « un nou­vel huma­nisme24 » puisqu’il s’inscrit dans une logique glo­bale his­to­rique, celle de « la défense des plus faibles, des oppri­més, des humi­liés » : il s’agit seule­ment d’élargir « notre sphère de consi­dé­ra­tion morale » et, par là même, d’honorer l’un des attri­buts de l’Homo sapiens : au contraire du jaguar ou de l’ours, celui-ci peut choi­sir sa pra­tique ali­men­taire, puisque la chair ani­male ne lui est en rien néces­saire d’un point de vue phy­sio­lo­gique et nutri­tion­nel, et déployer des juge­ments moraux indi­vi­duels et col­lec­tifs, donc politiques.

Non, Hitler n’était pas végétarien (et quand bien même)

« Un récit ima­gi­naire que Paul Ariès se plaît, étran­ge­ment, à transmettre. »

Cette modeste réin­tro­duc­tion de l’es­pèce humaine au sein du monde vivant passe pour un mépris, voire une haine, de l’es­pèce en ques­tion. Ce grief, des plus com­muns, béné­fi­cie de toute la force du nombre pour éta­ler sa sot­tise : l’antispécisme se désa­voue pour­tant sitôt qu’il nie à l’hu­main, comme au lapin ou à la truie, la digni­té qui lui revient. Tout à ses déman­geai­sons impré­ca­toires, Paul Ariès ajoute le nazisme à la misan­thro­pie : non contents de vou­loir « rabais­ser l’homme25 » par leur « pen­sée ter­ro­riste » et « ignoble » et « cri­mi­nelle », de pro­mou­voir le « jihad », d’as­pi­rer à nous trans­for­mer en « maté­riel humain » et d’œu­vrer à « l’infanticide des bébés », les défen­seurs des ani­maux se plaisent à frayer avec l’extrême droite ! Son der­nier brû­lot, sub­ti­le­ment titré Lettre ouverte aux man­geurs de viandes qui sou­haitent le res­ter sans culpa­bi­li­ser, consacre l’une de ses sous-par­ties à bros­ser le por­trait idéo­lo­gique du mou­ve­ment anti­spé­ciste, sur pas moins de cinq pages ; les mots défilent, ligne après ligne : « aryen », « race blanche », « néo­sa­ta­nistes », « fas­cistes », « Goebbels », « Hitler », « Himmler26 »… Le pro­cès, qui aurait fait rou­gir jus­qu’à Moscou, n’est pas nou­veau : en l’an 2000, l’au­teur s’ap­puyait sur « l’ex­cellent ouvrage de Luc Ferry27 » (l’an­cien ministre de Raffarin n’ap­pe­lait pas encore, en bon « huma­niste », à tirer sur les gilets jaunes) pour ren­voyer l’an­tis­pé­cisme au nazisme (et, pêle-mêle, à la glo­ba­li­sa­tion mar­chande et au techno-capitalisme).

Sitôt au pou­voir, en 1933, Hitler inter­dit en réa­li­té les socié­tés végé­ta­riennes, incar­cère leurs diri­geants et fait fer­mer le prin­ci­pal maga­zine végé­ta­rien de Francfort. En guise d’amour des bêtes, le diri­geant nazi qua­li­fiait de « gorets », de « sales chiens », de « vers de terre » et d’« ani­maux28 » ses adver­saires poli­tiques — et s’il aimait les ber­gers (alle­mands, s’entend), c’était pour mieux trai­ter les boxers de « dégé­né­rés » et per­mettre au Troisième Reich de mettre à mort les ber­gers blancs de façon sys­té­ma­tique, jugés « por­teurs de diverses tares » et impropres « aux stan­dards de la race29 ». L’historien Charles Patterson rap­porte que des « chiens juifs » (sic) furent abat­tus et qu’un tau­reau, parce qu’à son tour décré­té « juif » par les auto­ri­tés muni­ci­pales, fut inter­dit de repro­duc­tion. Il arri­vait éga­le­ment que des membres de la Schutzstaffel, afin de prou­ver leur force et se mon­trer à la hau­teur des « merveilleuse[s] bête[s] de proie libre[s] » louées par le Führer, dussent étran­gler sous les yeux de leur supé­rieur le chiot qu’ils éle­vaient. Hitler, que son fouet ne quit­tait pas, confia qu’il aimait pro­fon­dé­ment son chien parce que lui seul lui « obéis­sait ». Et s’il limi­tait sa consom­ma­tion de viande, c’était pour apai­ser son « esto­mac ner­veux », ses indi­ges­tions et ses fla­tu­lences — reste que le lea­der fas­ciste en man­geait régu­liè­re­ment et que sa cui­si­nière, Dione Lucas, fit savoir que les pigeon­neaux far­cis étaient son « grand favo­ri ». Le mythe d’un Hitler végé­ta­rien est, selon l’historien Robert Payne, une pure construc­tion de pro­pa­gande : « Son ascé­tisme était une fic­tion inven­tée par Goebbels pour faire croire au don total de sa per­sonne ». L’« anti­spé­cisme avant l’heure » du nazisme : un récit ima­gi­naire que Paul Ariès se plaît, étran­ge­ment, à transmettre.

Rob Bahou

Bien plutôt : une assise libertaire

Refuser l’exploitation ani­male, affirme l’es­sai Les Animaux ne sont pas comes­tibles, est « par essence30 » liber­taire. S’il n’existe à l’é­vi­dence aucun consen­sus31, les théo­ri­ciens et sym­pa­thi­sants anar­chistes n’en ont pas moins pris en charge la ques­tion bien davan­tage que leurs confrères mar­xistes, refroi­dis, qui sait, par les raille­ries des pères du Manifeste du par­ti com­mu­niste à l’endroit de ces bour­geois réfor­mistes sou­cieux du sort des bêtes32… Il n’est qu’à son­ger à Tolstoï (consi­dé­rant que les repas à base d’a­ni­maux ont valeur d’« assas­si­nat33 »), à la com­mu­nau­té végé­ta­lienne « Terre libé­rée » (fon­dée par le ser­ru­rier Louis Rimbault en 1924 afin de sor­tir du capi­ta­lisme et d’af­fran­chir « tout ce qui vit, tout ce qui est sen­sible et souffre de l’in­jus­tice34 ») ou, de nos jours, aux fon­da­teurs des asso­cia­tions fran­çaises L214 et 269 Libération ani­male pour prendre la mesure de cet ancrage his­to­rique. Cela, Paul Ariès ne l’ignore pas. Problème : le tour de passe-passe consis­tant à trans­for­mer des anar­chistes en ama­teurs de la Waffen-SS relève du tour de force. Solution : Ariès use, dans son der­nier ouvrage, d’un unique argu­ment d’autorité et, par trop ban­cal qu’il se trouve être, lui fait dire ce qu’il ne dit pas. Les liber­taires anti­spé­cistes, avance-t-il, tra­hissent le mou­ve­ment d’émancipation qu’ils croient hono­rer ; preuve en est un livre, celui du phi­lo­sophe anar­chiste Daniel Colson ! Citons Ariès : « [Colson] démontre que le mou­ve­ment de libé­ra­tion ani­male s’oppose qua­si­ment sur tous les points aux idéaux liber­taires35. » Citons Colson, mais direc­te­ment à la source : trois points excep­tés36, « l’an­tis­pé­cisme fait écho à de nom­breux aspects de la pen­sée liber­taire [] [et] ouvre effec­ti­ve­ment la pos­si­bi­li­té de pen­ser autre­ment le monde qui est le nôtre et donc d’in­ven­ter des rap­ports radi­ca­le­ment nou­veaux37 ». Ajoutons que Paul Ariès se garde bien de men­tion­ner ce que Colson nomme les « pré­ro­ga­tives absurdes et oppres­sives de l’humanisme » : une cri­tique de l’humanisme que l’antispécisme, déplore Colson, n’entreprend pas assez vigoureusement !

« C’est que tout va ensemble »

« L’antispécisme, tel que conçu par son inven­teur, a éty­mo­lo­gi­que­ment par­tie liée avec le refus du racisme, du sexisme et de la domi­na­tion de classe. »

On ne compte plus les par­ti­sans du libre-échange ou du loca­lisme iden­ti­taire dans les rangs de l’é­co­lo­gie ; la cause ani­male ne s’en tire pas mieux, sur­tout lors­qu’elle se concentre sur le seul « choix de consom­ma­tion » indi­vi­duel et ver­tueux. Pourtant, l’an­tis­pé­cisme, tel que conçu par son inven­teur, a éty­mo­lo­gi­que­ment par­tie liée avec le refus du racisme, du sexisme et de la domi­na­tion de classe. Mais s’il aura fal­lu attendre 1970 pour la pro­duc­tion de ce concept, ce qu’il recouvre remonte à autre­ment plus loin. Le géo­graphe Élisée Reclus, liber­taire et com­mu­nard, écri­vait ain­si en 1884 : « Si nous devions réa­li­ser le bon­heur de tous ceux qui portent figure humaine et des­ti­ner à la mort tous nos sem­blables qui portent museau et ne dif­fèrent de nous que par un angle facial moins ouvert, nous n’au­rions cer­tai­ne­ment pas réa­li­sé notre idéal. Pour ma part, j’embrasse aus­si les ani­maux dans mon affec­tion de soli­da­ri­té socia­liste38. » Si la pen­sée ani­ma­liste plonge ses racines dans l’Antiquité39 (ain­si des Métamorphoses qua­li­fiant de « crime40 » la consom­ma­tion de chairs ani­males), c’est là, pro­ba­ble­ment, par cette pro­po­si­tion de Reclus, l’acte de nais­sance théo­rique d’une poli­tique d’émancipation pleine et entière. Deux ans plus tard, Louise Michel avan­çait dans ses Mémoires : « Au fond de ma révolte contre les forts, je trouve du plus loin qu’il me sou­vienne l’horreur des tor­tures infli­gées aux bêtes41. » Et la com­mu­narde, anar­chiste et anti­co­lo­nia­liste, de pré­ci­ser : les gre­nouilles muti­lées par les pay­sans, les oies à qui l’on cloue les pattes, les che­vaux par nos soins épui­sés, les vieux chiens jetés au fond d’un trou. « C’est que tout va ensemble, depuis l’oiseau dont on écrase la cou­vée jusqu’aux nids humains déci­més par la guerre. […] Et le cœur de la bête est comme le cœur humain, son cer­veau est comme le cer­veau humain, sus­cep­tible de sen­tir et de com­prendre. »

Ces deux adverbes, « ensemble » et « comme », pré­fi­gurent la notion d’an­tis­pé­cisme et fixent les contours de la tâche qui incombe aux mou­ve­ments sociaux : tenir l’un et l’autre, sai­sir l’unité enve­lop­pante de la dyna­mique d’af­fran­chis­se­ment. Un siècle plus tard, l’es­sayiste afro-fémi­niste Angela Davis, par deux fois can­di­date com­mu­niste à la vice-pré­si­dence des États-Unis, creu­sait à son tour ce sillon : « D’ordinaire, je ne men­tionne pas que je suis végane. Mais ça a évo­lué. Je pense que c’est le bon moment pour en par­ler car c’est l’une des com­po­santes de la pers­pec­tive révo­lu­tion­naire. Comment pou­vons-nous, non seule­ment, inven­ter des rela­tions plus com­pa­tis­santes avec les êtres humains, mais aus­si déve­lop­per des rela­tions de com­pas­sion avec les autres créa­tures avec qui nous par­ta­geons cette pla­nète ? […] La majo­ri­té des gens ne songe pas au fait qu’elle mange des ani­maux. Quand elle mange un steak ou du pou­let, elle ne pense pas à l’im­mense souf­france endu­rée par ces ani­maux uni­que­ment pour qu’ils deviennent des pro­duits ali­men­taires voués à la consom­ma­tion humaine42. »

Richard Bailey | Getty Images

Qui, deman­dait en 1989 le phi­lo­sophe Jacques Derrida, aurait « quelque chance de deve­nir un chef d’État, et d’accéder ain­si à la tête, en se décla­rant publi­que­ment, et donc exem­plai­re­ment, végé­ta­rien43 » ? C’est ce qu’il nomme le « car­no­phal­lo­go­cen­trisme ». Disons-le plus sim­ple­ment : la viri­li­té passe par la consom­ma­tion de viande — et le slo­gan « Real men eat meat44 » ne dit pas autre chose. De l’al­liance entre les luttes pour le droit de vote des femmes et l’a­bo­li­tion de la vivi­sec­tion, for­mée par les suf­fra­gettes au début du XXe siècle, à la marche com­mune, en 1990, d’é­co­fé­mi­nistes et de membres de l’or­ga­ni­sa­tion Féministes pour les droits des ani­maux, « beau­coup de fémi­nistes ont noté que l’op­pres­sion des femmes et l’ex­ploi­ta­tion des ani­maux s’in­ter­pé­nètrent45 ». Femmes objec­ti­fiées, réduites à leur chair, à leurs ins­tincts ou à un sta­tut de pro­prié­té ; femmes rabais­sées au motif d’un « ordre natu­rel » que le lan­gage domi­nant va struc­tu­rant : Carol J. Adams, auteure en 1990 de Politique sexuelle de la viande, avance que la recon­nais­sance de la digni­té ani­male n’a­moin­drit en rien l’es­pèce humaine mais contri­bue bien davan­tage à défaire le patriar­cat46.

« La pos­si­bi­li­té du pogrom, assure ain­si le phi­lo­sophe Adorno dans Minima Moralia, com­mence dans le regard de l’animal. »

Il a fal­lu décrire les Native Americans comme autant d’ânes, de tigres et de chiens sans âme pour jus­ti­fier leur des­truc­tion ; il a fal­lu théo­ri­ser que les Africains étaient autre­ment proches du singe pour les réduire en escla­vage ; il a fal­lu assi­mi­ler les Juifs aux rats ou aux arai­gnées et les Tutsi aux cafards pour armer idéo­lo­gi­que­ment les wagons et les machettes géno­ci­daires. La pos­si­bi­li­té du pogrom, assure dès lors le phi­lo­sophe Adorno dans Minima Moralia, com­mence dans le regard de l’a­ni­mal47. L’histoire raciale et colo­niale s’é­crit dans l’ombre por­tée de la « bête ». Aph et Syl Ko, toutes deux afro-amé­ri­caines, ont publié en 2017 un essai consa­cré au « véga­nisme noir »48. Il ne s’a­git pas d’empiler les luttes éman­ci­pa­trices en agi­tant le man­tra de l’in­ter­sec­tion­na­li­té mais de sai­sir ce qui les relie sub­stan­tiel­le­ment : « Pour par­ler du racisme, il faut par­ler de la situa­tion des ani­maux. » Et pour le déman­te­ler, il faut dépas­ser l’op­po­si­tion binaire ins­ti­tuée entre huma­ni­té et ani­ma­li­té puisque le racisme s’est construit sur l’i­dée que cer­tains groupes avaient plus à voir avec les ani­maux qu’a­vec les Blancs. « La racine du racisme se trouve dans cette dis­tinc­tion49. » Et l’é­cri­vaine afro-amé­ri­caine Alice Walker, fémi­niste et membre du comi­té du Tribunal Russell sur la Palestine, de résu­mer : « Les ani­maux du monde ont leur propre rai­son d’exister. Ils n’ont pas été faits pour les humains, pas plus que les per­sonnes noires n’ont été faites pour les blanches, ni les femmes pour les hommes50. »

Briser les chaînes

On sait com­bien le for­disme contri­bua à broyer les ouvriers, réduits aux rythmes fré­né­tiques des machines et du pro­fit ; on sait moins qu’Henry Ford avait pui­sé son ins­pi­ra­tion, de son propre aveu, dans les abat­toirs de Chicago. En 2016, un jour­na­liste fran­çais s’in­tro­dui­sait sous une fausse iden­ti­té dans un abat­toir bre­ton durant plus d’un mois51. Un lieu fer­mé, caché, sous­trait au regard du public, à l’ins­tar des quelque 260 autres que compte le pays : le tabou de sang d’une socié­té cla­mant, chaque jour un peu plus, son hor­reur de la vio­lence. Le récit qu’il donne de cette expé­rience rap­pelle com­bien le sort des ani­maux, bien que plus tra­gique encore, est indis­so­ciable de celui des tra­vailleurs de ce maillon de l’a­gro-ali­men­taire. « On fait du 63 vaches à l’heure quand on est au taquet52 », lui confie un ouvrier d’une ving­taine d’an­nées, titu­laire d’un CAP de méca­ni­cien. Les uns se droguent pour tenir, les autres boivent. « Nous pas­sons à 100 veaux à l’heure ; un ani­mal toutes les qua­rante secondes ». Démence des chiffres : en France, trois mil­lions d’a­ni­maux ter­restres sont tués chaque jour, et plus de deux mil­lions subissent, chaque année, les sévices d’une science sans conscience. « On se dit que c’est dégueu­lasse et on conti­nue. Ce métier déshu­ma­nise tel­le­ment », confie un ouvrier d’un abat­toir de Limoges.

Ce n’est pour­tant pas en dimi­nuant les cadences indus­trielles, ni en dis­po­sant des camé­ras, que renaî­tra cette part d’être abo­lie : on ne tue jamais « éthi­que­ment », fût-ce « loca­le­ment » — un pis­to­let à pro­jec­tile cap­tif per­fo­rant, tout « décrois­sant » ou cer­ti­fié « bio » qu’il serait, pénètre encore jus­qu’au cer­veau un être en bas âge. Ce n’est pas en agran­dis­sant la sur­face des cages des cirques ni en per­fec­tion­nant les équi­pe­ments de gavage que l’on pour­ra croi­ser l’œil d’un ani­mal sans y voir notre échec, celui d’une socié­té inca­pable, en tout point, de se pen­ser sans écra­ser moins fort que soi. Faire dis­pa­raître la souf­france ne sera jamais tâche à notre por­tée ; ten­ter, du moins mal que l’on peut, de la réduire reste la moindre des choses : cet hori­zon est l’autre nom de l’a­bo­li­tion de l’exploitation.


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  1. « Speciesism Again : the ori­gi­nal lea­flet ? », Critical Society, n° 2, 2010. Ainsi que les trois cita­tions sui­vantes.[]
  2. Rappelons, s’il en est besoin : le végé­ta­rien ne consomme pas de viande ni de pois­son ; le végé­ta­lien ne consomme, en plus, aucun pro­duit d’o­ri­gine ani­male (lait, miel, œufs) ; le végane n’en consomme pas non plus et refuse d’u­ti­li­ser ou de cau­tion­ner des pro­duits ou des acti­vi­tés qui exploitent les ani­maux (cos­mé­tiques tes­tés sur ces der­niers, cuir, cor­ri­da, cirques, etc).[]
  3. Peter Singer, La Libération ani­male, Petite biblio­thèque Payot, 2012, p. 89 ; puis p. 92.[]
  4. Genèse 1.26.[]
  5. Selon le mot de Protagoras, cité par Platon dans le Théétète.[]
  6. Sur l’eu­tha­na­sie, l’a­vor­te­ment, la zoo­phi­lie ou le han­di­cap.[]
  7. Si Peter Singer et Tom Reagan cherchent l’un et l’autre à fon­der phi­lo­so­phi­que­ment le sta­tut éthique de l’animal, ils le font à par­tir de prin­cipes fon­da­men­taux très dif­fé­rents. Singer s’a­vance donc dans une pers­pec­tive « uti­li­ta­riste » : il consi­dère que la simple obser­va­tion de la sen­si­bi­li­té des ani­maux, du fait qu’ils ont l’expérience du plai­sir et de la souf­france, implique qu’ils ont des inté­rêts objec­tifs à ce que leur exis­tence prenne telle ou telle forme, et que ces inté­rêts doivent, dès lors, être pris en compte au même titre que ceux de n’importe qui (leurs plai­sirs maxi­mi­sés et leurs souf­frances mini­mi­sées). Tom Regan, lui, ne cherche pas à fon­der notre obli­ga­tion morale envers les ani­maux sur une carac­té­ris­tique empi­rique (comme la sen­si­bi­li­té) mais sur une valeur inhé­rente de digni­té, qui doit leur être recon­nue conven­tion­nel­le­ment et doit induire la recon­nais­sance de droits : celui de ne pas être tué, notam­ment, mais éga­le­ment exploi­té.[]
  8. Voir Les Animaux aus­si ont des droits, col­lec­tif, Seuil, 2013, p. 17.[]
  9. Paul Ariès, Lettre ouverte aux man­geurs de viandes qui sou­haitent le res­ter sans culpa­bi­li­ser, Larousse, 2018, p. 89.[]
  10. Bruno Latour, « Qui a la parole ? Anti- ou mul­ti- spé­cistes ? », Le Monde, 1er mars 2018.[]
  11. David Olivier, « Contribution au débat à la mai­son de l’écologie », inter­ven­tion à la Maison de l’Écologie le 20 octobre 1998, Cahiers anti­spé­cistes, n °17, avril 1999.[]
  12. Cahiers anti­spé­cistes, n° 2, jan­vier 1992.[]
  13. Peter Singer, La Libération ani­maleop. cit., p. 328 ; puis p. 329.[]
  14. David Olivier, « Contribution au débat à la mai­son de l’é­co­lo­gie », art. cit.[]
  15. Estiva Reus et Antoine Comiti, « Abolir la viande », Cahiers anti­spé­cistes, n° 29, février 2008.[]
  16. Voir, par exemple, le rap­port du Giec 2018. « La pro­duc­tion agroa­li­men­taire, consom­ma­trice d’eau, source de défo­res­ta­tion, est un fac­teur majeur de réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Et sans un recul net de la consom­ma­tion de viande, son impact sur l’en­vi­ron­ne­ment pour­rait croître jus­qu’à 90 % d’i­ci la moi­tié du siècle », Sciences et Avenir|AFP, 13 octobre 2018.[]
  17. Encore peu dis­cu­tée dans l’es­pace fran­co­phone, la notion de « wel­fare bio­lo­gy » est tra­vaillée dans le champ de recherche anti­spé­ciste anglo­phone : elle entend inté­grer les sciences du bien-être ani­mal, l’é­co­lo­gie et la zoo­lo­gie.[]
  18. « Un jour vien­dra où l’idée que, pour se nour­rir, les hommes du pas­sé éle­vaient et mas­sa­craient des êtres vivants et expo­saient com­plai­sam­ment leur chair en lam­beaux dans des vitrines, ins­pi­re­ra sans doute la même répul­sion qu’aux voya­geurs du XVIe ou du XVIIe siècle, les repas can­ni­bales des sau­vages amé­ri­cains, océa­niens ou afri­cains. » Claude Lévi-Strauss, Nous sommes tous des can­ni­bales, Seuil, 2013, p. 221.[]
  19. Sous-titre à son ouvrage Libération ani­male ou nou­veaux ter­ro­ristes ?, Éditions Golias, 2000.[]
  20. Ibid., p. 187.[]
  21. Paul Ariès écrit ain­si : « Peut-on trans­mettre aux géné­ra­tions futures le couple homo­sexuel comme équi­valent au couple hété­ro­sexuel ? Sera-t-il pos­sible de dire aux enfants de mater­nelle lorsque vous serez grands vous pour­rez choi­sir entre la vie à deux avec un indi­vi­du de sexe oppo­sé, de même sexe ou pour­quoi pas (à suivre cer­tains anti­spé­cistes) avec un ani­mal ? » Le Retour du Diable — Sata­nisme, exor­cisme, extrême droite, Éditions Golias, 1997, p. 90.[]
  22. Définition de l’hu­ma­nisme selon le Dictionnaire de l’Académie fran­çaise.[]
  23. Patrice Rouget, La Violence de l’hu­ma­nisme, Calmann-Lévy, 2014, p. 57. Puis p. 49 et p. 152.[]
  24. Aymeric Caron, Antispéciste, Don Quichotte, 2016, p. 265. Puis p. 229 et p. 235.[]
  25. Paul Ariès, Libération ani­male ou nou­veaux ter­ro­ristes ?, Éditions Golias, 2000, p. 8. ; puis p. 9., p. 8., Ibid., p. 10., p. 21., p. 8.[]
  26. Paul Ariès, Lettre ouverte aux man­geurs de viandes qui sou­haitent le res­ter sans culpa­bi­li­ser, op. cit., pp. 20–24.[]
  27. Paul Ariès, Libération ani­male ou nou­veaux ter­ro­ristes ?, op. cit., p. 13.[]
  28. Toutes les cita­tions du pré­sent para­graphe sont extraites du cha­pitre 5 d’Un éter­nel Treblinka, Calmann-Lévy, 2015.[]
  29. Laurence Patijaud, Le Berger blanc suisse, thèse n° 129, École natio­nale vété­ri­naire de Lyon, 2004, pp. 25–26.[]
  30. Martin Page, Les Animaux ne sont pas comes­tibles, Robert Laffont, 2017, p. 30.[]
  31. Le 52e congrès de la Fédération anar­chiste a, par exemple, publié la motion sui­vante en 1995 : « Le congrès décide qu’aucune publi­ci­té favo­rable aux thèses anti­spé­cistes ne peut être faite par la FA, que ce soit par le biais des struc­tures fédé­rales ([jour­nal Le Monde liber­taire, librai­rie Publico à Paris, Radio liber­taire, Éditions du Monde Libertaire]) ou par le biais de la pro­pa­gande par­ti­cu­lière des groupes. » Cette motion impli­que­ra, en 2012, la sup­pres­sion d’une émis­sion de Radio liber­taire au motif qu’un invi­té se récla­mait de l’an­tis­pé­cisme.[]
  32. « Une par­tie de la bour­geoi­sie cherche à por­ter remède aux ano­ma­lies sociales, afin de conso­li­der la socié­té bour­geoise. Dans cette caté­go­rie, se rangent les éco­no­mistes, les phi­lan­thropes, les huma­ni­taires, les gens qui s’oc­cupent d’a­mé­lio­rer le sort de la classe ouvrière, d’or­ga­ni­ser la bien­fai­sance, de pro­té­ger les ani­maux, de fon­der des socié­tés de tem­pé­rance, bref, les réfor­ma­teurs en chambre de tout aca­bit. Et l’on est allé jus­qu’à éla­bo­rer ce socia­lisme bour­geois en sys­tèmes com­plets… »[]
  33. Tolstoï, Plaisirs cruels, Charpentier, 1895, p. 124.[]
  34. Louis Rimbault, « Le pro­blème de la viande », Le Néo-natu­rien, n° 9, décembre-jan­vier 1923.[]
  35. Paul Ariès, Lettre ouverte aux man­geurs de viandes qui sou­haitent le res­ter sans culpa­bi­li­ser, op. cit., p. 20.[]
  36. L’anarchisme tra­vaille à une éman­ci­pa­tion sans repré­sen­ta­tion, conduite par les inté­res­sés eux-mêmes ; l’a­nar­chisme ne relève pas de la pen­sée uti­li­ta­riste ; l’an­tis­pé­cisme s’ac­croche encore, aux yeux de l’au­teur, à l’hu­ma­nisme.[]
  37. Daniel Colson, Petit lexique phi­lo­so­phique de l’a­nar­chisme, Le livre de poche, 2001, pp. 34 et 37 ; puis p. 38.[]
  38. Lettre à À Richard Heath, 1884.[]
  39. Voir Renan Larue, Le Végétarisme et ses enne­mis, Puf, 2015.[]
  40. « Hélas ! quel crime n’est ce pas d’en­glou­tir des entrailles dans ses entrailles, d’en­grais­ser son corps avide avec un corps dont on s’est gor­gé et d’en­tre­te­nir en soi la vie par la mort d’un autre être vivant ! Quoi donc ? au milieu de tant de richesses que pro­duit la terre, la meilleure des mères, tu ne trouves de plai­sir qu’à broyer d’une dent cruelle les affreux débris de tes vic­times, dont tu as rem­pli ta bouche, à la façon des Cyclopes ? Tu ne peux, sans détruire un autre être, apai­ser les appé­tits déré­glés de ton esto­mac vorace ? » Ovide, Les Métamorphoses, tome III, livre XV, Les Belles lettres, CUF, 1962.[]
  41. Louise Michel, Mémoires, Maspero, 1979, p. 91. ; puis p. 97.[]
  42. « On Revolution : A Conversation Between Grace Lee Boggs and Angela Davis », mars 2012, uni­ver­si­té de Californie (Berkeley).[]
  43. « Il faut bien man­ger ou le cal­cul du sujet », entre­tien avec Jean-Luc Nancy, Cahiers Confrontation, n° 20, hiver 1989.[]
  44. « Les vrais hommes mangent de la viande. »[]
  45. Carol J. Adams, « Anima, ani­mus, ani­mal », Cahiers anti­spé­cistes, n° 3, avril 1992.[]
  46. Ibid.[]
  47. « L’éventualité des pogroms est chose déci­dée au moment où le regard d’un ani­mal bles­sé à mort ren­contre un homme. L’obstination avec laquelle celui-ci pousse repousse ce regard — Après tout, ce n’est qu’un ani­mal — réap­pa­raît irré­sis­ti­ble­ment dans les cruau­tés com­mises sur les hommes dont les auteurs doivent constam­ment se confir­mer à eux-mêmes que ce n’est qu’un ani­mal, car même devant un ani­mal, ils ne pou­vaient le croire entiè­re­ment. » (tra­duc­tion de l’an­glais) Theodor W. Adorno, Minima Moralia, § 68, Verso, 2005, p. 105.[]
  48. Aph et Syl Ko, Aphro-ism. Essays on Pop Culture, Feminism, and Black Veganism from Two Sisters, Lantern Books, 2017.[]
  49. « A Seat at the table with Syl Ko : A dis­cus­sion on Black Veganism », The McGill Daily, 16 jan­vier 2018.[]
  50. Préface à The Dreaded Comparison, Human and Animal Slavery, Mirror Books/I D E A, 1996.[]
  51. Geoffrey Le Guilcher, Steak Machine, Éditions la Goutte d’Or, 2017.[]
  52. Ibid., p. 31. ; puis p. 36.[]

REBONDS

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Elias Boisjean

Coauteur de Cause animale, luttes sociales (avec Roméo Bondon) au Passager clandestin et coéditeur de La Révolution communaliste aux éditions Libertalia.

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