Anna Gabriel : « Combattre la cartographie du pouvoir »


Entretien inédit pour le site de Ballast

Issue des milieux liber­taires et anti­fas­cistes, Anna Gabriel est aujourd’hui dépu­tée au par­le­ment cata­lan pour la for­ma­tion indé­pen­dan­tiste de gauche CUP (Candidature d’unité popu­laire), qui joue un rôle-clé dans le pro­ces­sus d’indépendance de la Catalogne. Nous avons par­lé de libé­ra­tion natio­nale, de muni­ci­pa­lisme et de pers­pec­tives éman­ci­pa­trices autour d’un café. 


Aux élec­tions auto­nomes cata­lanes de sep­tembre 2015, Junts pel Sí, alliance de plu­sieurs for­ma­tions indé­pen­dan­tistes, n’a pas eu de majo­ri­té abso­lue, fai­sant de la CUP, avec 8 % des suf­frages, le « fai­seur de roi ». Vous avez bataillé pen­dant trois mois pour évi­ter qu’Artur Mas ne rede­vienne le pré­sident du gou­ver­ne­ment cata­lan — avec suc­cès. Une façon de mettre la ques­tion sociale au centre des enjeux ?

Oui, mais pas seule­ment. Artur Mas était une per­sonne qui fai­sait encore le lien avec un pas­sé auto­no­miste d’un par­ti poli­tique, CiU (Convergència i Unió), qui a tou­jours ser­vi à la gou­ver­na­bi­li­té de l’État — que ce soit en tolé­rant le Parti popu­laire (PP) ou le Parti socia­liste (PSOE) au gou­ver­ne­ment. Je crois que dans la mémoire de beau­coup de gens, on se deman­dait si ce nou­vel indé­pen­dan­tisme affi­ché d’Artur Mas était hon­nête, ou si c’était une façon de sur­vivre poli­ti­que­ment. Il y avait aus­si la ques­tion de la cor­rup­tion. Son par­ti a été condam­né dans plu­sieurs scan­dales et il semble peu cré­dible que lui-même n’ait eu aucun lien avec cela. Lors des négo­cia­tions avec Junts pel Sí, on a mis plu­sieurs alternatives sur la table, mais on se retrou­vait face à une atti­tude de fer­me­ture totale. Après trois mois de dis­cus­sions très intenses, on a réus­si à obte­nir un autre candidat.

Face au refus de Junts pel Sí de se repor­ter sur un autre can­di­dat, vous avez lais­sé votre base déci­der de la marche à suivre — avec un résul­tat sur­pre­nant : 1 515 voix pour un gou­ver­ne­ment d’Artur Mas, 1 515 voix contre.

On conti­nue d’être une orga­ni­sa­tion « assem­bléaire » et ce type de déci­sions très impor­tantes est pris par la base. Une grande pres­sion média­tique repo­sait sur nous, tout à coup ; on était au centre de l’attention. Nous n’a­vions pas d’autres options que de débattre et de deman­der aux membres de choi­sir. On est arri­vés ain­si à une assem­blée de plus de 3 000 per­sonnes, très ten­dues et très fati­guées, pour obte­nir à la fin ce résul­tat — que nous avons qua­li­fié par la suite de « poésie poli­tique ». Avec ce coup de force, deux jours avant la fin de la période de for­ma­tion d’un gou­ver­ne­ment, Junts pel Sí a fait marche arrière et a pro­po­sé Carles Puigdemont en tant que pré­sident. Je pense que cela démontre qu’on peut aus­si faire de la poli­tique sans oublier que la sou­ve­rai­ne­té de notre orga­ni­sa­tion poli­tique repose sur les mili­tants. D’ailleurs, nous, les dépu­tés, n’avons pas voté ni don­né de consigne de vote : nous avons démon­tré que mal­gré la pres­sion, on peut res­ter fidèle à soi-même. Je pense que sur le plan poli­tique, c’est une expé­rience très intéressante.

On a l’impression que depuis cette élec­tion, le pro­ces­sus enclen­ché depuis quelques années est un peu encombré…

« On conti­nue d’être une orga­ni­sa­tion « assem­bléaire » et ce type de déci­sions très impor­tantes est pris par la base. »

Je crois que c’est sur­tout dû au fait que Junts pel Sí avait un pro­gramme poli­tique qui était pen­sé pour gagner. Leur feuille de route était : rem­por­ter la vic­toire avec une majo­ri­té abso­lue, puis, pen­dant 18 mois, com­men­cer à construire les struc­tures d’un État, avant de décla­rer l’indépendance de façon uni­la­té­rale. Comme si tout allait être aus­si facile ! Comme si faire une décla­ra­tion d’indépendance à l’État espa­gnol — pas un État qui a des fon­de­ments démo­cra­tiques, non, on parle de l’État espa­gnol — allait être facile ! C’est sûr qu’il y avait, à ce moment-là, une vraie dyna­mique en faveur de l’indépendance, mais il nous sem­blait clair que la vic­toire allait être vrai­ment dif­fi­cile à obte­nir. Et plus encore avec un résul­tat comme celui des élec­tions de 2015. C’est vrai qu’il y a eu, après ces élec­tions, une majo­ri­té de dépu­tés indé­pen­dan­tistes, mais les par­tis indé­pen­dan­tistes n’avaient pas eu plus de 50 % des suf­frages. En même temps, on savait qu’il n’allait pas y avoir la pos­si­bi­li­té de négo­cier avec l’État espa­gnol ; la seule option pour nous était de remettre l’idée d’un réfé­ren­dum au centre de l’agenda politique.

Avec suc­cès ?

Junts pel Sí a accep­té notre ini­tia­tive, et main­te­nant, nous mili­tons pour que ce réfé­ren­dum se déroule au plus tard en sep­tembre. Le pro­blème, c’est que l’État espa­gnol refuse caté­go­ri­que­ment. Cela implique donc de le convo­quer et de le tenir contre son gré sachant qu’il n’hésitera pas à enga­ger des pour­suites judi­ciaires contre les per­sonnes impli­quées. Il faut s’at­tendre à ces consé­quences, et être prêts à payer ce prix. Nous, on le sait et on est prêts.

Quelles suites judi­ciaires la tenue d’un réfé­ren­dum pour­rait-elle avoir pour les poli­ti­ciens impliqués ?

On ne le sait pas réel­le­ment. Tous les conseillers du gou­ver­ne­ment, ain­si que la pré­si­dente et le bureau du Parlement cata­lan, ont reçu une injonc­tion de la Cour consti­tu­tion­nelle les mena­çant de sanc­tions pénales. Ces sanc­tions pénales peuvent aller de l’interdiction d’exercer des fonc­tions d’élu à des amendes ou des peines de prison.

Quel rôle une for­ma­tion anti­ca­pi­ta­liste comme la CUP peut-elle jouer dans un pro­ces­sus qui implique autant la social-démo­cra­tie que la droite catalanes ?

Celui de la contra­dic­tion per­ma­nente. On ne dit pas que Junts pel Sí repré­sente la droite, même s’il est vrai qu’une par­tie de la pla­te­forme a un pas­sé très lié aux inté­rêts de l’État et qu’ils ont sou­vent défen­du des poli­tiques qui sont très éloi­gnées des nôtres. Mais dans le par­le­ment cata­lan, il y a le Parti popu­laire, qui est la vraie droite — anti­dé­mo­cra­tique et raciste ; un Parti socia­liste dont on sait depuis long­temps que mal­gré son nom, il ne sert en rien les inté­rêts de la classe ouvrière ; et Ciutadans, très cen­tra­liste et très libé­ral. Et puis il y a les des­cen­dants de l’ancien Parti com­mu­niste, qui ne sont pas de droite, mais qui ne nous aident pas par rap­port à la ques­tion du réfé­ren­dum. Voilà le pano­ra­ma poli­tique cata­lan. Plutôt que d’être liés à la droite cata­lane, nous sommes liés à la démo­cra­tie. On aime­rait pou­voir faire ce type d’alliance avec des for­ma­tions qui ne soient pas liées à la cor­rup­tion, au libé­ra­lisme éco­no­mique, mais mal­heu­reu­se­ment nous sommes obli­gés de faire des alliances là où c’est pos­sible, tout simplement.

(DR)

La CUP se reven­dique du « municipalisme »…

Oui, nous appe­lons cela « muni­ci­pa­lisme de libé­ra­tion ». Il s’agit sur­tout d’aller au-delà d’une vue cen­trée sur les ins­ti­tu­tions. Notre objec­tif est d’être pré­sents dans les quar­tiers, les vil­lages, les villes, d’y tra­vailler avec les expres­sions orga­ni­sées de la socié­té civile, et, peut-être, d’accéder aux ins­ti­tu­tions. Nous essayons de faire émer­ger des alter­na­tives réelles au niveau local. Nous tra­vaillons beau­coup en faveur des casals [sorte de centres sociaux auto­gé­rés, ndlr] dans les villes, nous tra­vaillons aus­si avec les orga­ni­sa­tions étu­diantes, les orga­ni­sa­tions fémi­nistes, nous sou­te­nons les coopé­ra­tives… Pour nous, les muni­ci­pa­li­tés ne sont pas la pre­mière étape pour accé­der à la poli­tique « sérieuse », non, elles repré­sentent l’enjeu principal.

… Pourtant, en 2012, vous avez déci­dé de par­ti­ci­per, pour la pre­mière fois, à des élec­tions au niveau catalan.

C’est en 2009 que nous avons eu le débat pour la pre­mière fois. Ceux qui étaient contre une par­ti­ci­pa­tion à des élec­tions au niveau cata­lan — dont je fai­sais par­tie — argu­men­taient que notre pro­jet muni­ci­pa­liste n’était pas encore assez bien ancré. Nous avions, à ce moment-là, vingt-sept élus au niveau muni­ci­pal et nous étions d’avis qu’ils nous fal­lait encore tra­vailler beau­coup plus à ce niveau, conso­li­der cette base, pour ne pas oublier cette idée de géné­rer des alter­na­tives réelles au niveau local, une fois fran­chi le pas vers le niveau natio­nal [cata­lan, ndlr]. En 2012, la situa­tion poli­tique en Catalogne était autre et il était néces­saire, pour nous, qu’y par­ti­cipe une force anti­ca­pi­ta­liste, fémi­niste, avec des ten­dances liber­taires, issue des mou­ve­ments alter­mon­dia­listes. Il nous fal­lait mon­trer que c’était aus­si ça l’indépendantisme, et qu’on pou­vait le sépa­rer stric­te­ment des ques­tions identitaires.

La ques­tion de la par­ti­ci­pa­tion à des élec­tions à un autre niveau que muni­ci­pal était donc plus une ques­tion stra­té­gique qu’une ques­tion de principe ?

« Ça nous fait très peur, cette idée de pou­voir deve­nir une cari­ca­ture de ce que nous défendons. »

Peut-être que pour cer­tains c’est une ques­tion de prin­cipe, mais c’est avant tout un débat stra­té­gique que nous avons eu, oui. On avait vu beau­coup de décep­tion par rap­port à ce qu’a­vait été le Parti com­mu­niste, pour don­ner un exemple. Il avait une force extra­or­di­naire pen­dant le fran­quisme, une capa­ci­té d’organisation et de résis­tance tout en construi­sant des alter­na­tives réelles aus­si ! Et tout à coup, quand la démo­cra­tie est arri­vée, il a inves­ti les ins­ti­tu­tions et beau­coup de choses ont chan­gé. Ça nous fait très peur, cette idée de pou­voir deve­nir une cari­ca­ture de ce que nous défen­dons. Comment pré­ve­nir ça ? Il n’y a pas de solu­tion magique, mais je pense qu’en ayant une base locale très conso­li­dée, qui com­prend que l’objectif prin­ci­pal est de construire des alter­na­tives depuis le bas, nous sommes mieux pré­pa­rés à évi­ter ce genre de dérives.

Quelle stra­té­gie poli­tique la CUP pour­suit-elle au niveau municipal ?

En ce moment, par exemple, nous sommes en train de déve­lop­per et de mener une stra­té­gie dite « de récu­pé­ra­tion des sou­ve­rai­ne­tés ». On applique cette idée à beau­coup de domaines, en se deman­dant notam­ment quel type de ges­tion on veut par rap­port à l’eau ou à la san­té publique. On est de plus en plus confron­té à une logique d’externalisation ou de pri­va­ti­sa­tion dans ces domaines, et cela empêche que les gens puissent déci­der des choses qui ont des réper­cus­sions sur leur vie de tous les jours. On espère ain­si donner du conte­nu à cette « sou­ve­rai­ne­té ». C’est un mot sou­vent uti­li­sé, mais il est dif­fi­cile de par­ler de sou­ve­rai­ne­té quand il n’y a pas les struc­tures éco­no­miques et sociales qui per­mettent de décider.

Pour bien des liber­taires, l’idée de l’État-nation est un concept intrin­sè­que­ment lié au natio­na­lisme, à l’exclusion et aux conflits entre États. Comment pen­ser l’émancipation tout en pen­sant en termes de nations ?

Si l’on se penche sur l’histoire de la Catalogne, on constate que ces aspi­ra­tions indé­pen­dan­tistes n’ont rien à voir avec ce type d’imaginaire. Il faut aus­si faire l’effort de déco­lo­ni­ser ses pen­sées : ne pas accep­ter ces aspi­ra­tions, c’est aus­si accep­ter ce qui existe déjà, c’est-à-dire l’État espa­gnol — qui est, lui, la pire des construc­tions. L’absence d’un pro­jet alter­na­tif équi­vaut à res­ter dans ce qui existe. Je n’ar­rive pas à com­prendre com­ment dans une vue anti­ca­pi­ta­liste ou liber­taire des choses, on ne puisse pas voir l’opportunité révo­lu­tion­naire que nous posons sur la table. La République cata­lane sera-t-elle démo­cra­tique, éga­li­taire, fémi­niste ? Nous ne le savons pas. En revanche, nous savons que tout cela est impos­sible au sein de l’État espagnol.

(DR)

Pourtant, le pay­sage poli­tique espa­gnol a beau­coup chan­gé ces der­nières années, avec, à la clé, peut-être une vraie pers­pec­tive de changement…

Podemos, puisque c’est de cela qu’on parle, nous disait : « Attendez que nous gagnions les élec­tions, que nous soyons au gou­ver­ne­ment, et vous l’aurez, votre réfé­ren­dum ! » Même si nous n’avions pas for­cé­ment envie d’attendre encore, nous leur disions que nous serions heu­reux qu’ils réus­sissent. Non seule­ment ils n’ont pas réus­si à gagner, mais avec la force qu’ils repré­sentent aujourd’hui, il est abso­lu­ment impossible de réus­sir à modi­fier la Constitution espa­gnole. Nous disons donc à Podemos : « Si vous défen­dez le droit des peuples à déci­der de leur sort, il faut que vous tra­vailliez avec nous. » Il ne s’agit pas des inté­rêts de la CUP, il s’agit de la grande majo­ri­té du peuple cata­lan qui veut déci­der de son ave­nir. Nous croyons aus­si que nous pou­vons, de par notre lutte, contri­buer à dyna­mi­ter les bases de cet État espa­gnol impos­sible à changer.

Historiquement, les luttes de « libé­ra­tion natio­nale » se sont qua­si­ment tou­jours faites à tra­vers une alliance entre les classes ouvrières et la bour­geoi­sie natio­nale, et aux dépens du trai­te­ment de la ques­tion sociale…

Pour nous, il n’y a pas de hié­rar­chie entre la ques­tion natio­nale et la ques­tion sociale. Nous tra­vaillons tous les jours en faveur de la jus­tice sociale. Très sou­vent, au Parlement, nous ne sou­te­nons pas les pro­po­si­tions du gou­ver­ne­ment, que ce soit lié aux ques­tions d’éducation, de san­té, ou d’autre chose. Parfois, nous res­tons iso­lés, par exemple lorsque nous deman­dons la natio­na­li­sa­tion des infra­struc­tures ou lorsque nous fai­sons des pro­po­si­tions des­ti­nées à com­battre la cor­rup­tion. Nous consi­dé­rons que ce pro­ces­sus d’autodétermination est une rup­ture avec l’État, mais qu’il peut aus­si l’être avec le sys­tème éco­no­mique. Nous tra­vaillons pour réus­sir à convaincre beau­coup de gens que l’indépendance ne signi­fie pas seule­ment chan­ger de dra­peau ou de langue offi­cielle. Non, c’est un pro­ces­sus de démo­cra­ti­sa­tion, sur­tout à un moment où dans l’Union euro­péenne, il n’y a pas tel­le­ment d’options pro­gres­sistes. La Catalogne pour­rait deve­nir une sorte d’exemple à suivre au niveau européen.

Au sein du mou­ve­ment indé­pen­dan­tiste cata­lan, nom­breux sont ceux qui défendent l’idée d’une Catalogne englo­bant les ter­ri­toires cata­la­no­phones sur le ter­ri­toire fran­çais. C’est une vue basée sur la ques­tion lin­guis­tique et des consi­dé­ra­tions his­to­riques… Comment défi­nis­sez-vous ce qu’est la Catalogne ?

« Malheureusement, par­fois dans les gauches, les éti­quettes — et par­fois les égos — nous empêchent de tra­vailler beau­coup plus ensemble. »

Il est vrai, qu’à la base, la défi­ni­tion du sujet poli­tique est prin­ci­pa­le­ment liée à la ques­tion lin­guis­tique, et aus­si his­to­rique. Mais nous ne vou­lons pas d’un indé­pen­dan­tisme qui regarde tou­jours en arrière. C’est un pro­jet du futur qui n’est pas lié à des ques­tions iden­ti­taires. C’est un pro­jet qui est sur­tout lié à la volon­té des gens et au poten­tiel révo­lu­tion­naire du sujet. C’est révo­lu­tion­naire de com­battre la car­to­gra­phie du pou­voir. Suis-je fémi­niste pour des ques­tions liées à l’his­toire, parce qu’on a brû­lé les sor­cières ? Oui, mais sur­tout pour des ques­tions liées au futur, parce que je vois le poten­tiel révo­lu­tion­naire de la ques­tion. C’est la même chose avec la ques­tion natio­nale en Catalogne.

Vous venez des mou­ve­ments liber­taires, his­to­ri­que­ment très forts en Catalogne — tout comme le mou­ve­ment indé­pen­dan­tiste. Ces mou­ve­ments n’ont pas tou­jours entre­te­nu de bonnes rela­tions. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Le mou­ve­ment anar­chiste en Catalogne, et je le dis avec beau­coup d’amour, en est encore aux années 1930, et pense encore à la révo­lu­tion de 1936 et à l’expérience abso­lu­ment bru­tale de la guerre civile. Parfois, il ne réus­sit pas à actua­li­ser son pro­jet poli­tique par rap­port à la situa­tion que nous vivons actuel­le­ment. Par ailleurs, je trouve qu’il est abso­lu­ment néces­saire de tra­vailler ensemble, parce que même si tu com­bats l’État en tant que construc­tion, tu peux défendre le droit à l’autodétermination. Ce n’est pas une contra­dic­tion. Malheureusement, par­fois dans les gauches, les éti­quettes — et par­fois les egos — nous empêchent de tra­vailler beau­coup plus ensemble. Mais il y a beau­coup plus d’exemples de coopé­ra­tion que de l’inverse et au sein de la CUP ; il y a beau­coup de per­sonnes se reven­di­quant du libertarisme.

Comment voyez-vous l’avenir du mou­ve­ment indépendantiste ?

Je crois qu’on ver­ra bien­tôt si nous avons la force de déso­béir à tout un État et je crois que cela va être déci­sif. Si nous réus­sis­sons, ça sera une très bonne nou­velle, non seule­ment pour la Catalogne, mais pour le monde entier : nous aurons réus­si à démon­trer que déso­béir col­lec­ti­ve­ment peut mener à un futur plus digne. Il y a éga­le­ment le risque de res­ter à l’intérieur du cadre posé par la loi, de deve­nir vic­times de la répres­sion, ou encore de ne rien chan­ger. Nous tra­vaillons pour rendre les gens conscients du fait que tout ce qui a été obte­nu par la classe ouvrière l’a été grâce à la lutte, sou­vent à la déso­béis­sance, et que beau­coup de gens en ont payé un prix très éle­vé. Tout cela ne sera pas facile, ce sera long.


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REBONDS

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