À la recherche de l’underground

22 décembre 2017


Semaine « Résistances afro-américaines » — texte inédit pour le site de Ballast

L’Underground Railroad — ou Chemin de fer clan­des­tin — était un réseau de routes, de points de ren­contre et de lieux sécu­ri­sés que les esclaves en fuite emprun­taient, par petits groupes, tra­qués, aux États-Unis afin de fran­chir la ligne de démar­ca­tion entre les États abo­li­tion­nistes du Nord et les États escla­va­gistes du Sud ou de gagner le Canada. C’est aus­si, depuis 2016, le nom d’une série télé­vi­sée amé­ri­caine en vingt épi­sodes, Underground, tour­née en Louisiane. Le col­lec­tif « pan­afro­ré­vo­lu­tion­naire » Cases Rebelles, créé en France six ans plus tôt, s’in­té­resse ici à la récu­pé­ra­tion des luttes d’émancipation noires amé­ri­caines. Une Histoire et une mémoire en héri­tage à même d’es­quisser « les contours d’un anar­chisme noir, urgent et vis­cé­ral ».


« Cela s’est pas­sé, selon les per­sonnes les mieux infor­mées, vers 1831. Un fugi­tif du nom de Tice Davids tra­ver­sa la rivière à Ripley (Ohio). […] Il s’était enfui de chez son maître dans le Kentucky, lequel le pour­sui­vait à la trace si bien que Tice Davids n’eut d’autre alter­na­tive, arri­vé au bord de la rivière, que de la tra­ver­ser à la nage. Son maître mit quelques ins­tants à cher­cher une embar­ca­tion, en ne per­dant pas son esclave de vue, qui s’agitait dans les eaux. Il le gar­da à por­tée de regard pen­dant toute la tra­ver­sée et bien­tôt son embar­ca­tion le rat­tra­pa. Il vit Tice Davids patau­ger dans l’eau jusqu’au rivage, puis ne le revit plus jamais. Il cher­cha par­tout, il deman­da tout autour de lui… Décontenancé et frus­tré, il retour­na dans le Kentucky. Incrédule, il don­na la seule expli­ca­tion pos­sible pour un homme sain d’esprit : Il a dû emprun­ter une route sou­ter­raine décla­ra-t-il en secouant la tête1. »

« Les êtres qui héritent de l’attentat escla­va­giste cultivent des liens intimes avec l’under­ground, qui des­sinent ça et là les contours d’un anar­chisme noir, urgent et viscéral. »

Selon la légende, c’est ain­si que fut bap­ti­sé le réseau qui aida des mil­liers d’esclaves à fuir l’institution escla­va­giste aux États-Unis. Underground comme « sou­ter­rain », mais aus­si « clan­des­tin ». Underground Railroad. Son his­toire fan­tas­tique a habi­té l’esprit de tout un peuple, mar­qué de façon indé­lé­bile du sceau de la supré­ma­tie blanche. À tra­vers des noms au pou­voir magique, comme celui d’Harriet Tubman, il repré­sente une part pré­cieuse des luttes d’émancipation noires amé­ricaines tout en entre­te­nant la flamme des rêves, face à la domi­na­tion raciale per­sis­tante, d’échapper. Pourtant, la figure révo­lu­tion­naire de Tubman est aujourd’hui mena­cée de deve­nir un emblème du capi­ta­lisme, impri­mée sur un billet : énième ten­ta­tive de récu­pé­ra­tion et de sabo­tage du mys­tère et de la com­plexi­té de l’Underground. En effet, le pou­voir blanc n’a eu de cesse, à coups de brouillages et de fal­si­fi­ca­tions, de neu­tra­li­ser les poten­tiels de cet héri­tage sub­ver­sif. Dans un tel contexte, que nous dit la toute récente série Underground ? Que veut-elle dire des luttes pas­sées, pré­sentes et futures ? Et pour­quoi nous semble-t-il impor­tant de nous res­sai­sir du tra­vail dense d’historiographie du mili­tant abo­li­tion­niste William Still, pilier du réseau ?

Celles et ceux qui héritent de l’attentat escla­va­giste cultivent des liens intimes avec l’under­ground, qui vont bien au-delà de la nos­tal­gie et n’ont rien à voir avec le mot dési­gnant une avant-garde « ten­dance » et bran­chée. Des liens qui des­sinent ça et là les contours d’un anar­chisme noir, urgent et vis­cé­ral. Nous ver­rons notam­ment com­ment la lit­té­ra­ture afro-amé­ri­caine porte ce conti­nuum de dési­rs de se sous­traire à un régime épui­sant de sur­veillance et d’agressions. Un régime d’injonction à la dis­cré­tion ou à la négri­tude spec­ta­cu­laire. Un régime qui empoi­sonne, traque, enferme et tue tou­jours la popu­la­tion noire. Mais où échap­per, aujourd’hui ? Où se mettre hors de por­tée, à l’ère d’Internet, des drones, de l’autopromotion glo­ba­li­sée et de la visi­bi­li­té posée comme un enjeu de lutte ? Où « Black Moses » (la Moïse noire) — telle qu’Harriet Tubman fut sur­nom­mée — mène­rait-elle son peuple, à l’ère des lyn­chages légaux fil­més et dif­fu­sés en boucle sur le Web ?

[Romare Bearden]

« L’icône la plus malléable de l’Amérique » ?

En 2016, suite à une cam­pagne active du groupe Women on 20’s, l’administration Obama annon­çait que Harriet Tubman rem­pla­ce­rait sur les billets de 20 dol­lars le pré­sident Andrew Jackson, géno­ci­daire et escla­va­giste notoire. C’était un peu l’apothéose, dans l’appropriation publique et récur­rente de celle que l’historien Milton C. Sernett a qua­li­fié d’« icône la plus mal­léable d’Amérique2 ». À l’âge du Black Lives Matter et de l’inutilité consom­mée de Barack Obama (pour qui en aurait atten­du quelque chose), cette consé­cra­tion était lar­ge­ment dépla­cée. Tubman est née esclave en 1822 dans le Maryland et s’est échap­pée en 1849. Après avoir atteint Philadelphie et la liber­té, elle a rejoint l’Underground Railroad. Celle qui était aus­si appe­lée « la Moïse de son peuple » a effec­tué une tren­taine de mis­sions per­met­tant à près de soixante-dix esclaves de trou­ver la liber­té. Pendant la guerre de Sécession, elle a ser­vi l’Armée de l’Union comme éclai­reuse, espionne ou encore infir­mière. Elle a mili­té éga­le­ment acti­ve­ment pour les droits des femmes, notam­ment celui de voter. Il est éthi­que­ment inac­cep­table d’associer à l’argent et au capi­ta­lisme celle qui a com­bat­tu l’entreprise à la base de la toute-puis­sance éco­no­mique amé­ri­caine : l’esclavage. C’est une dis­tor­sion mal­hon­nête et dan­ge­reuse de son héritage.

« Le pro­blème n’é­tait pas que nous n’ayons pas été esti­més à notre juste valeur, mais qu’on nous ait fixé une valeur. Nous avions un prix. Chaque moment d’es­ti­ma­tion est un moment de dégra­da­tion3» Fred Moten

Il est de sur­croît révi­sion­niste d’en faire une « vraie héroïne amé­ri­caine » aux côtés de Pères fon­da­teurs bien sou­vent escla­va­gistes ou mol­le­ment abo­li­tion­nistes. Du reste, Andrew Jackson ne va pas dis­pa­raître du billet : il sera au ver­so, scel­lant ain­si l’alliance impro­bable entre le pro­prié­taire d’es­claves et l’émancipatrice. Si Harriet Tubman est si vul­né­rable à la mythi­fi­ca­tion, ce n’est pas parce qu’elle serait intrin­sè­que­ment « mal­léable » : il n’a sur­tout jamais été ques­tion de lais­ser libre une figure aus­si com­plexe et sub­ver­sive, c’est-à-dire à la por­tée poli­tique des noir·es. Et ce tra­vail a com­men­cé dès son enterrement.

En 2008, Hillary Clinton, can­di­date mal­heu­reuse face à Obama dans la course à l’investiture démo­crate, inven­tait cette fausse cita­tion lors d’un dis­cours pro­non­cé devant la conven­tion du Parti : « Si vous enten­dez les chiens, conti­nuez. Si dans les bois vous aper­ce­vez les torches, conti­nuez. S’il y a des cris der­rière vous, conti­nuez. Ne vous arrê­tez jamais. Continuez. Si vous vou­lez goû­ter à la liber­té, conti­nuez4. » Dans cette même course à l’investiture, Robin Morgan, figure du fémi­nisme radi­cal blanc de la fin des années 1960, som­mait ain­si les femmes qui rechi­gnaient à sou­te­nir Clinton : « Quand on lui deman­dait com­ment elle avait réus­si à sau­ver des cen­taines d’Afro-américain·es réduit·es en escla­vage pen­dant la guerre de Sécession par le biais de l’Underground Railroad, elle répon­dait amè­re­ment : J’aurais pu en sau­ver des mil­liers — si seule­ment ils avaient su qu’ils étaient esclaves.5 » Cette cita­tion, deve­nue virale, est aus­si fausse. D’un mater­na­lisme abject, elle prend sa source, comme l’explique l’historien W. Caleb McDaniel6, dans la pro­pa­gande escla­va­giste du consen­te­ment tacite des esclaves à leur ser­vi­tude. Ici, comme sou­vent, Tubman est ins­tru­men­ta­li­sée pour juger d’autres noir·es, voire la com­mu­nau­té dans son ensemble. D’ailleurs, c’est aus­si le pro­jet du billet bran­di à la face de toute la pau­vre­té afro-américaine.

[Romare Bearden]

Pour Women on 20’s (dont le slo­gan est : « La place d’une femme est sur un billet » !), pour Clinton ou Morgan, embar­quer Harriet Tubman dans le fémi­nisme blanc capi­ta­liste pro­cède d’un refus inten­tion­nel de toute inter­sec­tion­na­li­té : Tubman était une femme noire, han­die7, pauvre, etc. En ligne, on trouve même des textes qui louent son conser­va­tisme, puisqu’elle était répu­bli­caine, pro­fon­dé­ment croyante et por­tait une arme… On glisse bien enten­du ici en ter­ri­toire de trol­ling et d’in­ter­pré­ta­tions ana­chro­niques outran­cières. Du point de vue des faits, nombre d’historiens effec­tuent — quelque peu en vain — un tra­vail régu­lier de rec­ti­fi­ca­tion face aux nom­breuses contre­vé­ri­tés qui cir­culent. Mais à l’heure du mème8 et du copier-col­ler, est-il pos­sible de faire entendre que Tubman n’a jamais sau­vé trois cents esclaves (mais près de soixante-dix) ? Sa vie réelle n’est-elle pas assez excep­tion­nelle pour qu’on fasse le choix du spec­ta­cu­laire et de la fal­si­fi­ca­tion ? Tubman est ain­si volon­tai­re­ment iso­lée par cette sur­en­chère. Les repré­sen­ta­tions tron­quées confortent éga­le­ment le mythe de la « super­wo­man »9, de la femme noire forte. La diver­si­té des résis­tances, l’énergie du réseau Underground Railroad, le cou­rage qu’il fal­lait aux esclaves pour fuir, tout cela est effa­cé par une nar­ra­tion de lea­der­ship et de flam­boyance « lar­ger than life10 ».

« Il s’agit de désa­mor­cer un héri­tage révo­lu­tion­naire de mou­ve­ments clan­des­tins oppo­sés à l’État. »

Cette défor­ma­tion de l’individue et de ses choix poli­tiques faci­lite l’appropriation dépo­li­ti­sante et uni­ver­sa­li­sante dont sont vic­times de nom­breuses figures noires, « mal­léables » quelle que soit leur radi­ca­li­té. Cette entre­prise obs­ti­née est une forme de négro­pho­bie des plus vicieuses, qui a pour objet, au final, de nous éloi­gner de notre propre his­toire par un éclai­rage éblouis­sant, nous empê­chant de nous en sai­sir poli­ti­que­ment. Il s’agit de désa­mor­cer un héri­tage révo­lu­tion­naire de mou­ve­ments clan­des­tins oppo­sés à l’État : à la place, on nous pro­pose une authen­tique héroïne amé­ri­caine, pion­nière, conqué­rante, fusil à la main, trô­nant sur un billet pen­dant qu’on refuse obs­ti­né­ment d’accorder des répa­ra­tions à ses descendant·es.

De l’Underground à la lumière

Mais on n’en avait pas fini avec le feu des pro­jec­teurs. Une série télé­vi­sée sur l’Underground Railroad fut annon­cée en 2016. Dans un tel contexte de récu­pé­ra­tion, on était en droit d’avoir autant de curio­si­té que de craintes. En inter­view, Misha Green et Joe Pokaksi, créa­teurs de la série, racontent :

Misha Green : « Ma sœur m’a dit Tu devrais faire une série sur l’Underground Railroad. Et moi, j’ai dit Tu sais ce qui ferait un bon titre ? Underground. J’ai com­men­cé à faire quelques recherches et je me suis dis, c’est un cha­pitre énorme et épique de l’his­toire amé­ri­caine et j’ai­me­rais m’y atta­quer avec l’aide d’une autre per­sonne, et la pre­mière per­sonne à laquelle j’ai pen­sé, c’est Joe. C’était juste après la fin de Heroes, donc je suis allée le voir et lui ai dit, on devrait faire une série sur l’Underground Railroad. »

Joe Pokaksi : « Et je me disais, oh, quel­qu’un a déjà dû le faire, parce que c’est une his­toire tel­le­ment cool. Et depuis j’étais genre, oh, quelqu’un doit déjà l’avoir fait, parce que c’est une his­toire si cool. Et on était éton­nés que per­sonne ne l’ait fait. On a creu­sé et on a trou­vé que la réa­li­té était encore plus incroyable qu’aucune fic­tion ait jamais lue11. »

[Romare Bearden]

Diffusée sur la chaîne WGN America12, la série com­mence avec l’é­va­sion d’un groupe d’es­claves d’une plan­ta­tion de Macon, en Géorgie, à la fin des années 1850. Malgré les décla­ra­tions ambi­guës de ses créa­teurs (une femme noire et un homme blanc), leur tra­vail n’a rien de pion­nier : outre les docu­men­taires, plu­sieurs pro­duc­tions existent, comme la série A Woman cal­led Moses (1978) ou le télé­film Race to Freedom (1994). Mais, ras­su­rez-vous, on est tou­jours dans la fan­tai­sie, niveau his­to­rique : Orson Welles, nar­ra­teur de la série, s’enthousiasme (encore) sur les trois cents esclaves libéré·es par la Moïse noire et, dans le télé­film, celle-ci va jusqu’en Ohio libé­rer des esclaves… Pour ce qui est des stra­té­gies de dis­pa­ri­tion et d’évasion, la série sor­tie en 2016 est plu­tôt inté­res­sante. Largement nour­rie de slaves nar­ra­tives (« récits d’es­claves ») et de l’historiographie sur l’Underground Railroad, elle montre à maintes reprises, et avec force détails, com­ment dis­si­mu­la­tion et confi­ne­ment ont pu sau­ver les corps noirs : dans une caisse, au coin d’une pièce, sous une branche, dans un panier, sous terre, dans un tun­nel ou véri­ta­ble­ment enter­ré. Elle montre aus­si com­ment tout ce qui s’organise dans un monde paral­lèle aux maîtres, quelle qu’en soit l’envergure — une éva­sion col­lec­tive, une clé cachée, du lan­gage codé, la bêtise feinte — par­ti­cipe de l’under­ground.

« Comme si l’esprit cri­tique devait res­ter under­ground et qu’il fal­lait conti­nuer à racon­ter n’importe quoi au grand public. »

Mais comme le lais­sait craindre les pro­pos tra­duits plus haut, la série Underground est aus­si et sur­tout une pro­duc­tion obsé­dée par le poten­tiel de res­sorts dra­ma­tiques et spec­ta­cu­laires dans la situa­tion d’esclavage — cette « his­toire si cool »… Le résul­tat, fai­sant l’économie de la sub­ti­li­té et de la vrai­sem­blance ciné­ma­to­gra­phique, est à la hau­teur de l’absence d’interrogation éthique que tra­hit cette sor­tie. Quant à la nar­ra­tion, « cli­pesque » et satu­rée du lieu com­mun de noir·es qui courent, elle est d’un clas­si­cisme effa­rant, aggra­vée par une bande-son raco­leuse : Kanye West ou La Femme à plein volume, signe de l’influence néfaste du réa­li­sa­teur Baz Luhrmann. La réa­li­té de l’Underground Railroad en tant que réseau infor­mel et com­plexe ne peut donc pas vrai­ment prendre sa place ; mais est-ce vrai­ment le sujet ? À la croi­sée de mul­tiples genres dont il devrait se tenir radi­ca­le­ment éloi­gné, Underground verse aus­si sou­vent dans le wes­tern le plus conser­va­teur : on tire moult coups de feu, il y a des bagarres, du sexe, des bandes menées par des figures cha­ris­ma­tiques, un chas­seur de prime soli­taire, une angé­lique héroïne blanche, etc. Forme et codes du wes­tern conviennent à mer­veille puisque, dans sa ver­sion clas­sique, c’est le genre ciné­ma­to­gra­phique popu­laire, raciste et men­son­ger par excel­lence. Et il a lar­ge­ment par­ti­ci­pé à façon­ner le récit natio­nal étatsunien.

Et Misha Green et Joe Pokaski adorent les arran­ge­ments avec l’Histoire. La pré­sence de Patty Cannon en est la preuve : cette célé­bri­té du « Reverse Underground Railroad » (le kid­nap­ping dans le Nord de noir·es libres et d’esclaves fugi­tifs pour leur revente dans le Sud) fut arrê­tée, jugée et exé­cu­tée quand Tubman n’était qu’une enfant. Mais, dans la série, elle est bien vivante et rêve de cap­tu­rer l’icône de l’Underground Railroad. Cet exemple n’est pas le seul. Que dire encore du fait que les pre­miers épi­sodes incluent des scènes où des Blancs (un maître et un abo­li­tion­niste) se font fouet­ter par des noirs ? Qu’est-ce que cette inver­sion irres­pon­sable et mal­saine dit du pro­jet de la série ? Faut-il alors se satis­faire d’Underground, sous pré­texte que l’exis­tence de la série est pré­fé­rable à l’ab­sence de toute repré­sen­ta­tion ? On trouve en ligne peu d’articles à son pro­pos, et ils ne sont, qui plus est, jamais cri­tiques. Sur le site Black Perspectives de l’AAIHS (African American Intellectual History Society), que nous appré­cions habi­tuel­le­ment, on trouve un texte assez plat, qui intime aux uni­ver­si­taires de pro­mou­voir la série et de réser­ver les ana­lyses appro­fon­dies au cercle des spé­cia­listes. Comme si l’esprit cri­tique devait res­ter under­ground et qu’il fal­lait conti­nuer à racon­ter n’importe quoi au grand public.

[Romare Bearden]

William Still : une historiographie underground

« The right hand was not to know what the left hand was doing. » (« Que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite. ») Mathieu 6:3

Pourtant, une his­toire de l’Underground Railroad aus­si dense, mys­té­rieuse et tumul­tueuse que celle du réseau lui-même a été écrite par celui que l’on nomme — à tort — le père de l’Undergound Railroad : William Still. Présent au début de la série — en ver­sion roman­cée, bien sûr —, il est vite évin­cé par des per­son­nages plus arché­ty­paux. Ce mili­tant actif consi­gnait des infor­ma­tions sur les évadé·es, les membres du réseau, leurs acti­vi­tés : une tâche par­ti­cu­liè­re­ment ris­quée pour lui autant que pour toutes les per­sonnes impli­quées. Pendant un temps, il pro­té­geait d’ailleurs ses registres en les cachant « chaque nuit dans la tombe d’un cime­tière13 ». Né libre en 1821, membre de la Société contre l’es­cla­vage de Philadelphie, Still est deve­nu vers 1840 une figure cen­trale du réseau « sou­ter­rain ». Il aida jus­qu’à soixante esclaves par mois et sa propre mai­son était une « sta­tion » (lieu de refuge). Philadelphie était à l’é­poque un foyer his­to­rique de résis­tance abo­li­tion­niste. Dans cette grande ville de Pennsylvannie, à la fron­tière avec le Maryland, escla­va­giste, la syner­gie entre deux com­mu­nau­tés, les noirs libres et les Quakers — abo­li­tion­nistes convain­cus depuis le milieu du XVIIIe siècle — don­ne­ra nais­sance à l’Underground Railroad.

« Son tra­vail actif de docu­men­ta­tion était prag­ma­tique ; il fal­lait lut­ter contre la dis­lo­ca­tion impi­toyable des familles noires par l’esclavage. »

À l’intérieur du réseau, consti­tué au début du XIXe siècle et actif jus­qu’en 1865 — date de la fin de la guerre de Sécession —, les membres com­mu­ni­quaient à l’aide d’un lan­gage codé. Les esclaves fugi­tifs étaient des « pas­sa­gers », « car­gai­son », « colis » et « fret ». Ils étaient aidés dans leur fuite par des « chefs de gare » situés dans des ter­mi­naux (villes) où ils trou­vaient un refuge tem­po­raire dans des sta­tions ou des gares (mai­sons), avant de repar­tir. Le détour et la dis­si­mu­la­tion se mani­fes­taient éga­le­ment à tra­vers des chants reli­gieux, dont les paroles rece­laient un sens indé­ce­lable pour le maître ; elles pou­vaient four­nir des indices sur une éva­sion immi­nente, ou encore évo­quer une carte pour un iti­né­raire de fuite. Ainsi, dans les paroles du negro spi­ri­tual « Swing Low, Sweet Chariot », par exemple, la rivière Jourdain évo­quait la rivière Ohio, au nord de laquelle les esclaves trou­vaient la liber­té, guidé·es par les chefs de gare du réseau : « I loo­ked over Jordan and what did I see ? A band of angels coming after me. » (« J’ai regar­dé au-delà de la rivière Jourdain et qu’ai-je vu ? Des anges arri­vaient vers moi. ») Dans son his­to­rio­gra­phie, Still s’est appli­qué à réper­to­rier et à consi­gner les noms, ori­gines, carac­té­ris­tiques et par­ti­cu­la­ri­tés phy­siques des fugi­tives et fugi­tifs aidé·es par le réseau et arrivé·es en ter­ri­toire libre. Il conser­vait même des affiches offrant des récom­penses : il y voyait des sources d’in­for­ma­tions essen­tielles sur l’ap­pa­rence, l’i­den­ti­té des fugi­tifs. Son tra­vail actif de docu­men­ta­tion était prag­ma­tique ; il fal­lait lut­ter contre la dis­lo­ca­tion impi­toyable des familles noires par l’esclavage. Les éva­sions qui exi­geaient de la dis­cré­tion et des chan­ge­ments d’identité ame­naient aus­si leur lot de sépa­ra­tions bru­tales et irrémédiables.

Still avait été per­son­nel­le­ment frap­pé lorsqu’il s’était retrou­vé face à un homme nom­mé Peter, qui recher­chait sa mère et le reste de sa famille. En l’écoutant, Still, stu­pé­fait, com­prit que l’homme était son frère aîné, l’un des deux enfants que sa mère avait dû aban­don­ner en fuyant elle-même presque qua­rante années aupa­ra­vant. En 1972, après l’abolition, William Still publie donc The Underground Railroad, à par­tir de lettres, témoi­gnages, extraits d’ar­ticles de jour­naux, qu’il avait sau­ve­gar­dés au fil des années. Il manque seule­ment une par­tie de ses registres, détruits à un moment par­ti­cu­liè­re­ment ris­qué, de peur qu’ils ne soient uti­li­sés contre d’anciens esclaves. Au total, l’ou­vrage contient l’his­toire de six-cent-qua­rante-neuf esclaves qui ont pu rejoindre les États du Nord et le Canada. Il lègue une œuvre de répa­ra­tion capi­tale et, aujourd’­hui encore, des gens se servent de son tra­vail pour essayer de retra­cer leur généa­lo­gie, et se reconnecter.

[Romare Bearden]

Rêveries souterraines

« Il endui­sit de colle toutes les parois ter­reuses de la grotte et les recou­vrit de billets verts ; quand il eut fini, les murs flam­boyaient d’un feu vert-jaune. Oui, cette pièce serait son repaire ; entre lui et le monde qui l’a­vait stig­ma­ti­sé, décré­té cou­pable, il y aurait ce sym­bole iro­nique. Il n’a­vait pas volé l’argent ; il l’a­vait sim­ple­ment ramas­sé, exac­te­ment comme on ramasse du bois mort dans une forêt. Et c’é­tait main­te­nant ain­si que lui appa­rais­sait le monde de des­sus terre : comme une forêt sau­vage, qu’emplissait la mort14. » Richard Wright

Après la défaite du Sud et l’abolition for­melle de l’esclavage, la domi­na­tion raciale prit d’autres formes, per­sis­tant jusqu’à nos jours. La pré­gnance du topos15 réel et sym­bo­lique de l’under­ground dans les formes d’expression afro-amé­ri­caine des­sine depuis une filia­tion fas­ci­nante des cultures de résis­tance, des slaves nar­ra­tives aux récits modernes d’échappée et de révolte contre la supré­ma­tie blanche. Richard Wright en est l’un des por­teurs. Dans Big Boy Leaves Home, paru en 1938, le jeune héros se terre dans un four creu­sé dans le sol pour échap­per au lyn­chage, autre­ment inévi­table. De sa cachette, il entend la meute s’emparer du com­pa­gnon avec qui il devait fuir. Le four est l’espace tran­si­tion­nel dans lequel l’enfant devien­dra l’adulte qu’il doit être pour sur­vivre. La sus­pen­sion qu’est l’under­ground per­met aus­si de prendre la mesure de la vio­lence constante de l’oppression raciale à laquelle les per­son­nages sont expo­sés en temps normal.

« Il dit cette invi­si­bi­li­té para­doxale dans la socié­té blanche, résul­tante de la ten­sion entre l’hypervisibilité de la mas­cu­li­ni­té noire et l’effacement opé­ré par le racisme. »

Dans The Man Who Lived Underground16, Fred Daniels, injus­te­ment accu­sé du meurtre d’une femme blanche, trouve refuge dans les égouts de la ville pour échap­per cette fois au lyn­chage des forces légales. Ironiquement, du monde sou­ter­rain, Daniel sur­plombe le monde de la sur­face dont il per­çoit toute la fac­ti­ci­té, la vacui­té. Mais dans cette échap­pée solo, il oublie­ra jusqu’à son nom et le pou­voir blanc aura quand même sa peau. L’under­ground a donc ses limites. Peut-on s’extraire seul de la situa­tion d’op­pres­sion ? A‑t-on le droit d’y aban­don­ner celles et ceux qu’on aime ? Ces ques­tions fon­da­men­tales font certes écho aux dilemmes de Wright, exi­lé à Paris à par­tir de 1946, mais aus­si et sur­tout à ceux des esclaves qui étaient bien sou­vent contraints, comme la mère de William Still, d’abandonner des êtres aimés dans la fuite. Avec The Outsider, publié en 1953, Wright pousse cette réflexion jusqu’aux limites de la morale. À la faveur d’un acci­dent de métro, Cross Damon usurpe l’identité d’un mort ; il fuit ses res­pon­sa­bi­li­tés, ses dettes et aban­donne sa femme, ses enfants, sa maî­tresse enceinte, pour tout recom­men­cer. La fuite est cou­pable. Le sys­tème l’est plus encore. Est-il alors indé­cent de rêver de renaître ? Le clas­sique Invisible Man de Ralph Ellison, ins­pi­ré de The Man Who Lived Underground, fait de la cave un espace de répit. Le nar­ra­teur retrace sa vie de sa jeu­nesse dans le Sud à son arri­vée à Harlem. Il réa­lise avoir tou­jours été assi­gné à une exis­tence fan­to­ma­tique, la dis­pa­ri­tion phy­sique s’étant pro­duite fina­le­ment bien avant la fuite sous terre. Il dit cette invi­si­bi­li­té para­doxale dans la socié­té blanche, résul­tante de la ten­sion entre l’hypervisibilité de la mas­cu­li­ni­té noire et l’effacement opé­ré par le racisme. Mais le livre montre aus­si com­ment la ten­ta­tion de la fuite peut répondre au manque de pers­pec­tives poli­tiques col­lec­tives. Critique du Parti com­mu­niste et de son anti­ra­cisme de façade, mais aus­si des mouve­ments natio­na­listes noirs, le nar­ra­teur se retrouve dans les « limbes », for­cé de (ré)inventer la forme que pren­dra sa lutte et son existence.

Cette forme, on peut pen­ser qu’Assata Shakur l’a trou­vée. Son auto­bio­gra­phie est pro­fon­dé­ment tra­vaillée par une réflexion sur le monde de la sur­face et celui d’en-dessous, com­ment ils se croisent, et com­ment on s’é­chappe17. L’ancienne membre du Black Panther Party et de la Black Liberation Army se défi­nit elle-même comme une esclave en fuite18. Avant de dis­pa­raître dans la clan­des­ti­ni­té, elle par­ti­ci­pait à ce qu’elle nomme le « rail­road », un réseau de sou­tien pour épau­ler ses sœurs et frères d’armes fuyant la police. Jazz, le sixième roman de Toni Morrison, trace une autre échap­pée au fémi­nin, fic­tion­nelle celle-là, à tra­vers le per­son­nage de Wild : il vit dans une grotte, en rup­ture avec le reste du monde, après la guerre de Sécession. En 2016, le roman­cier Colson Whitehead, avec l’uchro­nie Underground Railroad, ten­tait de bou­cler la boucle en repré­sen­tant un véri­table che­min de fer sou­ter­rain emprun­té par la jeune Cora. Là, le tra­jet joue un rôle de dévoi­le­ment, la pro­gres­sion du train à tra­vers le pays écor­nant le mythe du Progrès et d’une vision téléo­lo­gique de l’Histoire. Tout en mon­trant la vio­lence consti­tu­tive de l’es­cla­vage, il en sou­ligne les consé­quences contemporaines.

[Romare Bearden]

« Damn I wish the gover­ne­ment didn’t have my real name. » (« Merde, si seule­ment le gou­ver­ne­ment n’avait pas mon vrai nom. ») Sadat X, « The Time is run­ning out », Brand Nubian, 1998

Du free jazz au hip-hop, les musiques noires sont lar­ge­ment tra­ver­sées par le concept et son uto­pie19 : noms d’album, de groupe, champs lexi­caux, etc. Nous n’avons pas l’espace ici pour décor­ti­quer le sujet mais arrê­tons-nous sur le fas­ci­nant col­lec­tif Underground Resistance. Il est né à la fin des années 1980 à Detroit, plus grande ville du Michigan et, à l’époque de l’Underground Railroad, der­nier arrêt avant la fron­tière pour le Canada. Ce col­lec­tif pion­nier de la tech­no a ten­té de faire une musique poli­tique et ins­pi­rante pour la jeu­nesse noire, tout en res­tant à dis­tance de l’industrie musi­cale, la mar­chan­di­sa­tion, la sta­ri­fi­ca­tion et la négri­tude spec­ta­cu­laire. Seule la musique devait res­ter et « Mad » Mike Banks, pilier et cofon­da­teur, refuse jusqu’à aujourd’hui de mon­trer son visage. Underground Resistance, c’est une révo­lu­tion sonique, jaillie d’une ville pro­fon­dé­ment noire qu’on a maintes fois essayé d’enterrer vivante.

L’underground, la cale et l’anarchie ?

« Ce qui est en jeu, c’est le mou­ve­ment fugi­tif dans et hors du cadre, des bar­reaux, ou de n’im­porte quelle logique sociale impo­sée de l’extérieure — un mou­ve­ment d’é­va­sion, le mou­ve­ment fur­tif de ce qui est volé — mou­ve­ment inhé­rent à tous les espaces clos — dont on peut dire qu’il brise tous les enclos. Ce mou­ve­ment fugi­tif est de la vie volée, et son rap­port à la loi ne se réduit ni à une simple inter­dic­tion, ni à une simple trans­gres­sion. Une par­tie de ce qui peut être atteint dans cette zone inac­ces­sible, où ceux qui sont par­ti­cu­liè­re­ment vul­né­rables ont été relé­gués, cette zone qu’ils occupent mais ne peuvent pas (et refusent de) pos­sé­der, c’est une idée de la loi fugi­tive du mou­ve­ment qui rend la vie sociale noire ingou­ver­nable20. » Fred Moten

Aujourd’hui, les États-Unis enferment en masse. Le pays four­nit inlas­sa­ble­ment des vidéos de lyn­chages légaux de ses sujets noirs à l’ogre Internet. Il montre de nom­breux stig­mates de radi­ca­li­sa­tion fas­ciste. Mais l’Amérique noire réagit, s’organise dans une diver­si­té de mou­ve­ments qui clament, dans des espaces vir­tuels autant que réels, la valeur des vies noires. L’Amérique noire, sculp­tée par le feu urgent d’un régime d’oppression inin­ter­rom­pu, apporte inlas­sa­ble­ment au patri­moine de la pen­sée sub­ver­sive, née du chaos de la cale. Car ne nous y trom­pons pas : c’est là le pre­mier under­ground. Et c’est là qu’il faut se tenir, selon des pen­seurs pré­cieux comme Frank Wilderson III, Saidiya Hartman ou Jared Sexton.

Qu’est-ce que ça signifie ?

« Plus tôt l’Amérique noire en par­ti­cu­lier com­men­ce­ra à com­prendre notre posi­tion en tant qu’­élé­ment intrin­sè­que­ment anar­chique des États-Unis, plus nous serons en mesure de nous orga­ni­ser avec réa­lisme. Au-delà de l’appellation incor­recte de chaos, les élé­ments qui nous rendent tels sont les outils mêmes que nous devrions uti­li­ser pour réa­li­ser notre libé­ra­tion. Cette mai­son en feu ne peut pas être réfor­mée pour nous inclure conve­na­ble­ment, pas plus que nous devrions vou­loir par­ta­ger une mort dou­lou­reuse en péris­sant dans les flammes. Une socié­té meilleure doit être écrite de nos déter­mi­na­tions inalié­nables, et cela n’ar­ri­ve­ra que lorsque nous nous ren­drons compte que nous tenons la plume21. » William C. Anderson et Zoe Samudzi

Qu’il naisse des impasses poli­tiques ou des pro­jets révo­lu­tion­naires, l’under­ground a tout d’une recon­nexion avec l’anarchisme intrin­sèque à la condi­tion noire aux États-Unis, l’intrinsèque ingou­ver­na­bi­li­té de la vie sociale noire. Parce que depuis la cale, les noir·es américain·es vivent sous un régime sco­pique oppres­sant, dégra­dant et mor­ti­fère. Parce qu’au sor­tir de la cale était l’Auction Block, un espace d’exposition et de vente. Comprendre ce qui s’est pas­sé dans la cale, s’y tenir, implique de faire avec l’under­ground et de faire le deuil des rêves d’intégration, de nor­ma­li­sa­tion. Il ne s’agit pas de pro­phé­ti­ser ici une grande révo­lu­tion noire qui sau­ve­ra l’Amérique mais de dire ceci : l’under­ground noir né de la cale habite et nour­rit inlas­sa­ble­ment les pen­sées sub­ver­sives et révo­lu­tion­naires au niveau mon­dial, qu’il s’agisse d’Ida B. Wells, Édouard Glissant, « Mad » Mike Banks ou Claudia Jones. Et cette pen­sée, née de réa­li­tés concrètes, de trau­ma­tismes, de sueur, de sang et de larmes, vient à son tour se nour­rir de l’action. Il ne s’agit pas d’idéaliser l’under­ground, d’en faire une uto­pie, mais il y a des impasses radi­cales dans le mili­tan­tisme qui se fixent comme objec­tif la visi­bi­li­té et la repré­sen­ta­tion. Tous·tes les noir·es ne veulent ni ne peuvent être visibles. Tous·tes les Beyoncé et les Obama du monde ne sau­ve­ront pas les noir·es.

[Romare Bearden]

« Ici les noir·es disent sou­vent On n’est pas visibles, y a tou­jours cette ques­tion mais c’est très noir fran­co­phone ; c’est qu’on ne sait pas habi­ter notre invi­si­bi­li­té22. » Nathalie Etoke

« […] l’éner­gie exi­gée pour être pré­sent, pour réagir, pour s’af­fir­mer s’ac­com­pagne d’une décep­tion vis­cé­rale : décep­tion dans la mesure où toute la visi­bi­li­té du monde ne chan­ge­ra pas la manière dont on est per­çu23. » Claudia Rankine

Avec l’énergie fié­vreuse de l’essai ciné­ma­to­gra­phique d’Arthur Jafa Les Rêves sont plus froids que la mort, avec Frank Wilderson ou Saidiya Hartman, il faut conti­nuer à pen­ser de la cale, de l’under­ground. Créer du répit et des voies d’évasion qui secoue­ront l’ordre — ne serait-ce que tem­po­rai­re­ment, ne serait-ce que par des absences et des dis­pa­ri­tions. À Philadelphie, centre névral­gique de l’Undergound Railroad, le 13 mai 1985, la police de l’État de Pennsylvanie bom­bar­dait les lieux de vie de l’organisation MOVE. Onze per­sonnes dont cinq enfants périrent dans les flammes et Ramona Africa, l’une des deux sur­vi­vantes, affirme que la police tirait sur ceux qui ten­taient de s’échapper. 61 mai­sons furent détruites et 250 per­sonnes res­tèrent sans domi­cile. Voilà sans doute un évé­ne­ment qui dit bien la haine sécu­laire du pou­voir blanc pour l’under­ground.


Illustrations de ban­nière et de vignette : Romare Bearden


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  1. Henrietta Buckmaster, Let My People Go : The Story of the Underground Railroad and the Growth of the Abolition Movement, 1992.[]
  2. Milton C. Sernett, Harriet Tubman : Myth, memo­ry and his­to­ry, 2007.[]
  3. « Black and blur : Fred Motten in conver­sa­tion with Arthur Jafa », CUNY Graduate Center, 11 décembre 2017.[]
  4. Convention natio­nale des Démocrates, Denver, 26 août 2008.[]
  5. Robin Morgan, « Good bye to all that #2 », 14 février 2008.[]
  6. Caleb McDaniel, « The Dangers of a Fake Tubman Quote », 22 mars 2016.[]
  7. Personne mise en situa­tion de han­di­cap par les struc­tures vali­distes de la socié­té.[]
  8. Un mème Internet est un élé­ment ou un phé­no­mène repris et décli­né en masse sur Internet.[]
  9. Voir Michelle Wallace, Black Macho and the Myth of the Superwoman, 1979.[]
  10. « Plus grand que nature ».[]
  11. « Under­ground Creators Misha Green and Joe Pokaski on Their Bold First Season », flavorwire.com, 11 mai 2016.[]
  12. Diffusée sur WGN America dès 2016, et éga­le­ment sur France Ô en 2017.[]
  13. Spencer Grew, dans le docu­men­taire Underground Railroad : The William Still Story, PBS, 2012.[]
  14. The Man Who Lived Underground, 1942. Traduction : Claude-Edmonde Magny.[]
  15. Motif récur­rent.[]
  16. Richard Wright, The Man Who Lived Underground, 1942.[]
  17. Elle obtient l’a­sile à Cuba, en 1984.[]
  18. « I am a 20th cen­tu­ry esca­ped slave », lettre d’Assata Shakur publiée le 30 décembre 2014.[]
  19. Voir James Braxton Peterson, The Hip-Hop Underground and African American Culture — Beneath the Surface, 2014.[]
  20. « The Case of Blackness », Criticism, volume 50, n° 2, été 2008.[]
  21. « The Anarchism of Blackness », Roar n° 5, Not This Time !, été 2017.[]
  22. « Corps, regards et repré­sen­ta­tions avec Nathalie Etoke », cases-rebelles.org, mai 2015.[]
  23. Citizen : an American lyric, 2014.[]

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