Bernard Friot : « La gauche est inaudible parce qu’elle ne politise pas le travail » [2/2]


Entretien inédit pour le site de Ballast

Mettre fin à la pro­prié­té lucra­tive (entendre tirer pro­fit de son patri­moine), abo­lir le mar­ché de l’emploi et sala­rier l’en­semble des citoyens de leur majo­ri­té à leur mort : la pro­po­si­tion, chif­frée et détaillée, est claire. Mais com­ment la mettre en place ? Autrement dit : com­ment accé­der au pou­voir ? C’est, dans ce second volet, l’une des ques­tions que nous tenions à abor­der avec Bernard Friot. Le sala­riat a mau­vaise presse, dans le camp anti­ca­pi­ta­liste, et l’ur­gence éco­lo­gique oblige à pen­ser toute trans­for­ma­tion sociale à l’aune de celle-ci : ce sont là d’autres ques­tions, aux­quelles l’é­co­no­miste et socio­logue com­mu­niste n’a pas man­qué de nous répondre…


[lire le pre­mier volet]


Entre l’économie et la poli­tique, vous pas­sez faci­le­ment d’une caté­go­rie à l’autre. Le « salaire à la qua­li­fi­ca­tion » — ou « salaire à vie » — est-il une mesure éco­no­mique ou politique ?

Je suis de plus en plus ten­té de répondre : poli­tique. Pourquoi la gauche est-elle actuel­le­ment inau­dible ? Parce qu’elle ne poli­tise pas le tra­vail. Elle campe sur une espèce de tech­no­lo­gie fis­cale — « réduire les inéga­li­tés en fai­sant payer les riches » — ou sur une « défense des ser­vices publics » qui s’adresse aux tra­vailleurs comme consom­ma­teurs et non pas comme tra­vailleurs ! Or ce qui fait mal aux tripes chez les per­sonnes, c’est le tra­vail. Être plus égaux, dis­po­ser de ser­vices publics, bien sûr, mais pour quoi faire ? Si c’est pour pro­duire la même merde, si c’est pour être aus­si en dif­fi­cul­té vis-à-vis de son tra­vail… La ques­tion du manque de sou­ve­rai­ne­té sur le tra­vail est au cœur de la dif­fi­cul­té de la conflic­tua­li­té sociale actuelle. Or, conqué­rir cette sou­ve­rai­ne­té c’est sor­tir nos vies du chan­tage du capi­tal dans ses deux dimen­sions : le chan­tage à la dette d’investissement et le chan­tage à l’emploi. Sortir du chan­tage à la dette en sup­pri­mant le cré­dit et en sub­ven­tion­nant l’investissement grâce à une socia­li­sa­tion de la valeur par une coti­sa­tion éco­no­mique se sub­sti­tuant au pro­fit capi­ta­liste — comme nous l’avons fait pour construire l’outil de soins dans les années 1960. C’est la condi­tion pour que l’outil de tra­vail soit libé­ré des griffes du capi­tal. Sortir du chan­tage à l’emploi en fai­sant de la qua­li­fi­ca­tion (et donc du salaire) un attri­but de la per­sonne et non pas du poste de tra­vail — comme nous l’avons fait pour la fonc­tion publique, pour les sala­riés à sta­tut ou pour les retrai­tés. Cela se dit très sim­ple­ment : le salaire doit deve­nir un droit poli­tique ; chaque adulte doit être doté d’un salaire de sa majo­ri­té poli­tique à sa mort, ce salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle qui s’est popu­la­ri­sé comme « salaire à vie ».

« Les stra­té­gies de prise du pou­voir d’État comme préa­lable à la prise du pou­voir éco­no­mique ont mené à des impasses, tout comme les alter­na­tives ici et main­te­nant. »

Au lieu de quoi la gauche parle de sécu­ri­ser les par­cours pro­fes­sion­nels, de sécu­ri­ser les reve­nus, de mettre en place un ser­vice public de l’emploi per­for­mant qui puisse accom­pa­gner les périodes de tran­si­tions et for­mer en per­ma­nence, etc. Bref, rien qui ne sup­prime le mar­ché du tra­vail. Comment s’étonner que de tels mots d’ordre ne mobi­lisent pas ? Alors que « salaire à vie », ça prend pour des rai­sons poli­tiques ! Monte en effet, sur­tout chez les jeunes, le sen­ti­ment dif­fus que nous devrions être recon­nus comme pro­duc­teurs en tant que per­sonnes, sans avoir l’obligation de pas­ser par des mar­chés (du tra­vail ou des biens et ser­vices) sur les­quels nous n’avons aucune prise… Ce sen­ti­ment n’est pas for­cé­ment expri­mé en des termes poli­ti­que­ment clairs — d’où la ten­ta­tion de « reve­nu de base », une ten­ta­tion qui montre a contra­rio toute l’irresponsabilité d’une gauche inca­pable de popu­la­ri­ser le salaire comme droit poli­tique ! Oui, il est urgent de poli­ti­ser le tra­vail et de le mettre au cœur du poli­tique : pas plus que « le tra­vail », « la valeur » n’existe. Il y a un tra­vail et une valeur capi­ta­listes dont les ins­ti­tu­tions cen­trales sont la pro­prié­té lucrative1 de l’outil et le mar­ché du tra­vail, et un tra­vail et une valeur com­mu­nistes qui fondent la sou­ve­rai­ne­té des tra­vailleurs sur leur pro­prié­té de l’outil et sur le salaire comme droit poli­tique. Le salaire à vie, c’est un droit poli­tique pour don­ner du pou­voir économique.

Mais com­ment com­bi­ner la prise de pou­voir éco­no­mique que vous appe­lez de vos vœux avec la prise de pou­voir politique ?

Vous tou­chez là un point sur lequel j’ai encore beau­coup à tra­vailler… Et je ne suis mani­fes­te­ment pas le seul car les stra­té­gies clas­siques de prise du pou­voir d’État comme préa­lable à la prise du pou­voir éco­no­mique ont mené à des impasses, tout comme, symé­tri­que­ment, celles de la géné­ra­li­sa­tion, à l’échelle natio­nale, d’alternatives « ici et main­te­nant » mul­ti­pliées. Ce que je retiens de mon tra­vail de recherche sur la Sécurité sociale et sur le salaire, ce sont deux choses. La pre­mière est que la démo­cra­tie éco­no­mique est au cœur de la démo­cra­tie poli­tique pour plu­sieurs rai­sons : la classe révo­lu­tion­naire ne peut se construire que dans la maî­trise de la valeur, le pou­voir poli­tique ne peut pas être démo­cra­tique tant que la pro­duc­tion est le mono­pole de la bour­geoi­sie, capable de ce fait de prendre en otage la socié­té. La citoyen­ne­té s’éduque, s’enrichit et n’est effec­tive que dans la res­pon­sa­bi­li­té éco­no­mique. La seconde est que la lutte de classes per­met d’imposer la créa­tion et la péren­ni­té d’institutions du tra­vail macro­so­ciales au ser­vice d’une pro­duc­tion soit capi­ta­liste, soit com­mu­niste : dans le pre­mier cas, la socia­li­sa­tion de la valeur par cen­tra­li­sa­tion du pro­fit, le mar­ché du tra­vail et le cré­dit, et donc la pro­prié­té lucra­tive de l’outil ; dans le second, la socia­li­sa­tion de la valeur par la coti­sa­tion, la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle et le droit poli­tique au salaire, la sub­ven­tion de l’investissement et donc la pro­prié­té non lucra­tive de l’outil de travail.

Le remorqueur, Fernand Léger]

Vous avez dit une fois être « pour un dépé­ris­se­ment de l’État ». Mais aus­si : « Je ne me méfie pas de l’État parce que je ne suis pas irres­pon­sable. » Pouvez-vous cla­ri­fier votre position ?

Elle n’est pas très claire, comme vous le voyez… D’autant que mes recherches sur le salaire ne me donnent pas de com­pé­tence par­ti­cu­lière en science poli­tique ou en socio­lo­gie des orga­ni­sa­tions… Je suis pour une forme d’autogestion de l’État, sous deux dimen­sions. D’une part, les fonc­tion­naires sont beau­coup trop « au ser­vice de l’État » — une for­mule qui masque qu’ils sont en réa­li­té au ser­vice du gou­ver­ne­ment en place. Le pré­ten­du « ser­vice de l’État » est invo­qué pour ne pas s’opposer au new public mana­ge­ment, pour obéir à des ordres ou appli­quer des pro­cé­dures non conformes à la déon­to­lo­gie de ser­vice public, alors même que le sta­tut de la fonc­tion publique a été conquis pour don­ner aux tra­vailleurs des ser­vices publics de quoi s’y oppo­ser col­lec­ti­ve­ment. Nous retrou­vons, ici encore, le lan­ci­nant pro­blème de l’absence d’organisation col­lec­tive en vue de la maî­trise du tra­vail concret. D’autre part, il est sou­hai­table que des fonc­tions éta­tiques soient assu­rées par les inté­res­sés eux-mêmes : de 1947 à 1967, ce sont des tra­vailleurs élus qui ont exer­cé le pou­voir dans les conseils d’administration du régime géné­ral, ce qui a mis en rage la bour­geoi­sie qui n’a eu de cesse de confier ce pou­voir aux dépu­tés, au gou­ver­ne­ment et aux hauts fonc­tion­naires — la tri­lo­gie consti­tu­tive du gou­ver­ne­ment capi­ta­liste de l’État contre les travailleurs.

« Les ins­ti­tu­tions du poli­tique sont abso­lu­ment néces­saires — donc je ne peux pas faire l’impasse sur ce qu’on appelle l’État. »

Cela dit, les ins­ti­tu­tions du poli­tique sont abso­lu­ment néces­saires — donc je ne peux pas faire l’impasse sur ce qu’on appelle l’État. Je ne suis pas pour le chan­ge­ment des mots, plu­tôt de leur signi­fi­ca­tion. L’État est néces­saire pour que la valeur ne soit pas confiée aux seules ins­ti­tu­tions de la valeur que seront les entre­prises, les caisses de salaire ou d’investissement, les jurys et le ser­vice public de qua­li­fi­ca­tion, les syn­di­cats, les col­lec­ti­vi­tés pro­prié­taires de l’outil de tra­vail. La déci­sion sur ce qu’on pro­duit, où on le pro­duit et la façon dont on le pro­duit ne peut pas être lais­sée à la seule déci­sion de ces ins­ti­tu­tions. De même qu’on ne confie pas l’armée aux seuls mili­taires, il n’est pas rai­son­nable de confier le tra­vail aux seuls tra­vailleurs : ils peuvent être par exemple pris dans une espèce d’hubris2 tech­no­lo­gique qui fait qu’ils pour­sui­vront une pro­duc­tion non dési­rable… Il faut donc, à côté des ins­ti­tu­tions de la valeur, des ins­ti­tu­tions spé­ci­fiques du poli­tique qui puissent impo­ser des déci­sions prises selon des cri­tères qui mettent la valeur à distance.

Vous voyez dans le sala­riat la classe révo­lu­tion­naire en construc­tion. Comment le com­prendre, au regard de la méfiance his­to­rique des anti­ca­pi­ta­listes à l’en­droit, pré­ci­sé­ment, du sala­riat ?

C’est effec­ti­ve­ment une pro­po­si­tion dif­fi­cile à com­prendre pour des mili­tants qui, iden­ti­fiant le salaire au prix de la force de tra­vail, la situa­tion de sala­rié au contrat de tra­vail et le contrat de tra­vail à la subor­di­na­tion, militent pour l’abolition du sala­riat. Or ces trois pro­po­si­tions sont aveugles sur le fait que la classe ouvrière est une classe pour soi3, en capa­ci­té d’instituer des alter­na­tives à la pra­tique capi­ta­liste de la valeur. Elles sont le témoi­gnage du vol de l’histoire popu­laire, com­po­sante déci­sive de l’hégémonie de la bour­geoi­sie capi­ta­liste. Une pre­mière conquête sala­riale au début du XXe siècle est celle de l’emploi. Claude Didry a par­fai­te­ment montré4 que le Code du tra­vail de 1910, en inter­di­sant la sous-trai­tance et en créant le contrat de tra­vail, a tout à la fois obli­gé les capi­ta­listes à être direc­te­ment employeurs, donc à s’exposer comme exploi­teurs dans un conflit direct avec les tra­vailleurs, et ouvert la voie à une ins­ti­tu­tion du tra­vail non capi­ta­liste. C’est dans le cadre de ce contrat de tra­vail qu’a été impo­sé, contre un patro­nat qui l’a tou­jours récu­sé, le salaire à la qua­li­fi­ca­tion de la conven­tion col­lec­tive qui est le contraire du prix de la force de tra­vail. Mais bien mieux encore, le conflit sur le sta­tut de la fonc­tion publique, les natio­na­li­sa­tions et la créa­tion du régime géné­ral de Sécurité sociale ont per­mis, en 1946, d’instituer mas­si­ve­ment le salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle, par dépas­se­ment du salaire à la qua­li­fi­ca­tion du poste qui défi­nit l’emploi de la conven­tion col­lec­tive dans le sec­teur pri­vé. Ce salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle qua­li­fie les per­sonnes elles-mêmes, c’est-à-dire les pose dans leur capa­ci­té à pro­duire de la valeur indé­pen­dam­ment de leur sou­mis­sion au mar­ché du travail.

Les constructeurs, Fernand Léger]

Le salaire est sou­vent ana­ly­sé comme un des rouages du sys­tème capitaliste…

… Alors que, tel qu’il s’institue en France au XXe siècle, je le vois comme étant au cœur du com­mu­nisme ! Une lec­ture posi­ti­viste5 de Marx qui, à juste titre, défi­nit la rému­né­ra­tion capi­ta­liste comme le prix de la force de tra­vail et la désigne comme du salaire, en déduit que, tant que nous ne sommes pas dans le « demain » com­mu­niste, le salaire est par nature capi­ta­liste, et donc le prix de la force de tra­vail… Comme façon de natu­ra­li­ser une ins­ti­tu­tion capi­ta­liste, de la sor­tir de l’histoire et de nier l’histoire popu­laire, on ne fait pas mieux ! Quand on sait que tout l’effort syn­di­cal du XXe siècle a été de conqué­rir, contre le prix de la force de tra­vail, le salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle ! Si on n’est pas conscient du fait que des mil­lions de per­sonnes ont un salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle, et qu’il s’agit là de pré­mices d’un nou­veau sta­tut, com­mu­niste, du pro­duc­teur, dont il s’agit de pour­suivre l’institution en géné­ra­li­sant à tous les plus de 18 ans le droit poli­tique au salaire, cette base va s’effriter — après qu’on ait lais­sé tom­ber les pos­tiers, puis les sala­riés d’EDF/GDF, les che­mi­nots étaient tout seuls l’an der­nier, et main­te­nant vient le tour des retrai­tés et des fonctionnaires…

Mais on a par­fois l’impression que vous gros­sis­sez le trait lorsque vous comp­ta­bi­li­sez envi­ron 17 mil­lions de per­sonnes qui ont « peu ou prou, un salaire à vie » ! Parmi celles-là, pre­nons un exemple concret : les pro­fes­sions libé­rales de san­té touchent donc déjà un salaire à vie ?

« Mon milieu pro­fes­sion­nel écrit beau­coup trop l’histoire de l’impuissance popu­laire, alors que notre bou­lot est au contraire d’écrire l’histoire de la puis­sance populaire. »

Si vous addi­tion­nez les fonc­tion­naires, les sala­riés à sta­tut, la moi­tié des retrai­tés (ceux dont la pen­sion, supé­rieure au Smic, est proche de leur der­nier salaire d’activité) et les sala­riés de branches dans les­quelles a été conquis un droit à la car­rière, c’est-à-dire l’embauche sur un poste au moins aus­si qua­li­fié en cas de muta­tion ou de chan­ge­ment d’entreprise, vous consta­tez que le tiers des plus de 18 ans per­çoivent un salaire direc­te­ment (fonc­tion publique, sta­tuts, retrai­tés) ou indi­rec­te­ment (sala­riés de la métal­lur­gie, de la chi­mie ou de la banque, branches avec un droit à la car­rière) lié à leur per­sonne. Et il faut y ajou­ter, effec­ti­ve­ment, les libé­raux de san­té de sec­teur 1, certes payés à l’acte — une situa­tion qu’il fau­dra dépas­ser —, qui per­çoivent le salaire socia­li­sé de l’assurance mala­die, un salaire lié à leur qua­li­fi­ca­tion et qui leur est garan­ti pra­ti­que­ment dès l’ouverture de leur cabi­net du fait de la sol­va­bi­li­sa­tion de leur patien­tèle : aucune pro­fes­sion indé­pen­dante ne connaît cette libé­ra­tion vis-à-vis de la per­for­mance mar­chande ! Que le tiers des plus de 18 ans soient peu ou prou libé­ré du chan­tage à l’emploi est une immense conquête qui fait l’objet d’une haine de classe totale de la part de la bour­geoi­sie et qui ne peut être conso­li­dée qu’en géné­ra­li­sant à tous les adultes le salaire comme droit poli­tique. Le sala­riat désigne non pas des tra­vailleurs dépen­dant du capi­tal mais des tra­vailleurs en train de s’en libé­rer grâce au sta­tut de la fonc­tion publique, au salaire socia­li­sé du régime géné­ral de Sécurité sociale, aux autres ins­ti­tu­tions du salaire.

45 % du salaire total est aujourd’hui socia­li­sé pour la pro­tec­tion sociale6. Vous en dédui­sez qu’il y a un déjà-là, avec de vraies bases pour une pra­tique com­mu­niste de la valeur. On vous reproche de voir les choses de manière un peu optimiste…

Je « gros­sis le trait », je « vois les choses de manière un peu opti­miste » ! Permettez-moi de remar­quer com­bien ces énon­cés témoignent de la sous-esti­ma­tion des conquis de la classe révo­lu­tion­naire ! Et encore, vous êtes moins dubi­ta­tif que nombre d’« éco­no­mistes atter­rés » ou de res­pon­sables syn­di­caux et poli­tiques qui nient car­ré­ment la nou­veau­té révo­lu­tion­naire des conquis de 1946 et des décen­nies qui ont sui­vi ! La classe diri­geante veille à ce que le récit offi­ciel soit celui de nos défaites. Le vol de l’histoire popu­laire est un des lieux cen­traux de son hégé­mo­nie car il entre­tient les domi­nés dans l’impuissance. Je connais la res­pon­sa­bi­li­té de mon milieu pro­fes­sion­nel : il écrit beau­coup trop l’histoire de l’impuissance popu­laire, alors que notre bou­lot est au contraire d’écrire l’histoire de la puis­sance popu­laire. Faute de quoi, les mobi­li­sa­tions hésitent entre les deux écueils du défai­tisme et du volontarisme.

La partie de campagne, Fernand Léger]

Imaginons main­te­nant une socié­té où le salaire à vie serait en place. Sans mar­ché du tra­vail, qui va faire le « tri » entre les bons et mau­vais producteurs ?

Premièrement, le mar­ché du tra­vail n’est pas une bonne ins­ti­tu­tion de régu­la­tion : on ne peut pas dire que les employeurs sélec­tionnent les meilleurs, loin de là, ni que l’extériorité du tra­vail à nos vies soit per­for­mante quand on observe par exemple l’incroyable gâchis du chô­mage, des petits bou­lots, des com­pé­tences sous-uti­li­sées et des tra­vaux inutiles !

Il le fait mal, mais c’est lui qui le fait actuellement !

Il faut jus­te­ment aban­don­ner le mar­ché du tra­vail parce qu’il nous aliène en posant le tra­vail comme étran­ger à nos per­sonnes. Cette remarque vaut aus­si pour ceux qui, tra­vailleurs indé­pen­dants, voient leur recon­nais­sance comme tra­vailleurs dépendre de leur per­for­mance sur un mar­ché des biens et ser­vices qu’ils ne maî­trisent pas plus que les employés ne maî­trisent le mar­ché du tra­vail. Il s’agit d’opérer un chan­ge­ment de régime de la res­pon­sa­bi­li­té. Le capi­ta­lisme nous exalte comme consom­ma­teurs mais nous irres­pon­sa­bi­lise sur l’essentiel, la pro­duc­tion de la valeur, tout en nous sus­pec­tant en per­ma­nence de ne pas être à notre place, de ne pas faire ce qu’il faut et en nous sanc­tion­nant par un refus d’embauche, par le mana­ge­ment, par le licen­cie­ment… Notre res­pon­sa­bi­li­té se résume à l’amélioration de notre employa­bi­li­té et l’école nous apprend à être res­pon­sables de notre seule orien­ta­tion : choi­sir la bonne filière, deve­nir com­pé­ti­tifs sur le mar­ché du tra­vail. L’enjeu de la construc­tion du com­mu­nisme, c’est-à-dire de la res­pon­sa­bi­li­té des tra­vailleurs sur la pro­duc­tion, est que nous deve­nions pro­prié­taires de nos outils de tra­vail et en capa­ci­té de déci­der de l’investissement, de ce qui va être pro­duit, des col­lec­tifs de pro­duc­tion, des accords inter­na­tio­naux néces­saires. Avec la conscience que la pro­duc­tion de la valeur est de notre seule res­pon­sa­bi­li­té : si nous ne sommes pas à la hau­teur, il n’y aura pas assez à se par­ta­ger, les défis ter­ri­to­riaux ou éco­lo­giques ne seront pas affron­tés. Voilà un res­sort de moti­va­tion très solide, sur­tout si dès l’école les savoirs sont trans­mis non plus en vue de la com­pé­ti­tion sur le mar­ché du tra­vail mais pour don­ner à cha­cun le sens de son impor­tance dans la res­pon­sa­bi­li­té col­lec­tive de la pro­duc­tion, et si tout au long de la vie un ser­vice public de la qua­li­fi­ca­tion offre tant aux indi­vi­dus qu’aux col­lec­tifs de quoi mieux assu­mer cette responsabilité.

Mais com­ment ne pas tom­ber dans une espèce de rela­ti­visme qui consi­dé­re­rait que tout le monde est pro­duc­teur de valeur quoiqu’il fasse, même s’il ne le fait pas bien ? Dit autre­ment : quelles ins­ti­tu­tions pour la régu­la­tion de la qua­li­té du travail ?

« Le capi­ta­lisme ne se défi­nit pas d’abord par le mar­ché, mais par l’accumulation de capi­tal grâce à l’extorsion de sur­va­leur aux tra­vailleurs réduits à l’état de forces de travail. »

À 18 ans, tout le monde aura le pre­mier niveau de qua­li­fi­ca­tion du salaire à vie et sera assu­ré de la pro­prié­té d’usage de son outil de tra­vail : tout le monde sera posé en capa­ci­té de res­pon­sa­bi­li­té sur la valeur et outillé pour l’exercer. Première pos­si­bi­li­té, la per­sonne veut mon­ter sa boîte : il fau­dra que son pro­jet soit accep­té pour obte­nir des sub­ven­tions, trou­ver des par­te­naires — donc le pro­jet sera aus­si exa­mi­né par des four­nis­seurs, des clients. Puis il fau­dra consti­tuer un mar­ché suf­fi­sant sinon elle fer­me­ra bou­tique : elle aura tou­jours son salaire mais ne pour­ra plus payer les four­nis­seurs. Il y aura bien une sanc­tion, sauf que celle-ci ne sera plus l’absurde double peine d’aujourd’hui, où l’échec pro­fes­sion­nel est dou­blé de la mort sociale. Les per­sonnes conser­ve­ront leur qua­li­fi­ca­tion et donc leur salaire, elles n’auront aucune dette à rem­bour­ser, leur inves­tis­se­ment ayant été sub­ven­tion­né. Deuxième pos­si­bi­li­té, la per­sonne ne sou­haite pas mon­ter sa boîte mais entrer dans un col­lec­tif exis­tant. Encore faut-il qu’elle soit accep­tée, car elle peut être refu­sée : elle conti­nue­ra alors sa quête du lieu où pou­voir expri­mer sa qua­li­fi­ca­tion. Dans ces col­lec­tifs, le contrat de tra­vail ne men­tion­ne­ra pas le salaire puisqu’il sera défi­ni par la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle, mais il pour­rait men­tion­ner des horaires, le type de tâches à faire, les res­pon­sa­bi­li­tés à assu­mer dans la ges­tion de l’entreprise, etc. Ce ne sera pas du tout une socié­té sans obli­ga­tion ni sanc­tion, ça n’existe pas.

Vous dites en sub­stance qu’il pour­rait y avoir un mar­ché des biens qui soit non capi­ta­liste. Vous faites donc une dis­tinc­tion entre des formes d’économie de mar­ché et le capitalisme ?

Absolument. Car le capi­ta­lisme ne se défi­nit pas d’abord par le mar­ché, sauf dans le fait qu’il fait de la force de tra­vail une mar­chan­dise. Il se défi­nit par l’accumulation de capi­tal grâce à l’extorsion de sur­va­leur aux tra­vailleurs réduits à l’état de forces de tra­vail. Il n’y a pas de vali­da­tion des biens et ser­vices par le mar­ché dans le capi­ta­lisme, contrai­re­ment à ce que laisse entendre le féti­chisme de la mar­chan­dise. Il nous fait croire qu’au bout du compte, c’est le consom­ma­teur qui valide alors que n’arrivent sur le mar­ché que des pro­duits qui ont été sélec­tion­nés et cali­brés en amont du mar­ché selon les règles de la ren­ta­bi­li­té du capi­tal. Prenons un exemple simple : se nour­rir. La publi­ci­té et l’organisation capi­ta­liste du tra­vail nous incitent à ne pas faire, sinon de façon très som­maire, la cui­sine (acti­vi­té consi­dé­rée comme dépas­sée) et donc à ache­ter de la nour­ri­ture indus­trielle. Certes, il y a un conflit entre Auchan et Carrefour, entre Lactalis et Bongrain pour savoir lequel va pro­duire et dis­tri­buer cette nour­ri­ture. Mais qu’elle soit pro­duite et dis­tri­buée par telle ou telle entre­prise capi­ta­liste ne chan­ge­ra rien au type de pro­duit consom­mé, puisqu’il aura été pro­duit uni­que­ment selon les règles — iden­tiques pour tous les pro­duc­teurs — de valo­ri­sa­tion du capi­tal. Il y a des tas d’innovations refu­sées par les entre­prises car jugées non ren­tables. Au contraire, cer­taines sont accep­tées car elles per­mettent de faire une dif­fé­rence entre les pro­duits, bien que pré­sen­tant un carac­tère nova­teur com­plè­te­ment illu­soire. C’est le cal­cul éco­no­mique en amont du mar­ché qui est déci­sif : les biens qui arrivent sur le mar­ché ont déjà été vali­dés par les action­naires et les prê­teurs. Il faut que nous res­tau­rions le pri­mat de l’utilité sociale, ce qui sup­pose que les biens et ser­vices ne soient plus pro­duits pour mettre en valeur du capi­tal. Et dans une telle logique, à côté de la gra­tui­té de biens et ser­vices non mar­chands, le mar­ché pour­ra être un très bon ins­tru­ment d’allocation des ressources.

Étude pour les disques dans la ville, Fernand Léger]

L’articulation du salaire à vie avec les contraintes éco­lo­giques reste à ima­gi­ner. Qu’est-ce qui va rete­nir les éven­tuelles pul­sions consu­mé­ristes de per­sonnes dis­po­sant d’un salaire suf­fi­sant pour vivre et pour consom­mer, de manière poten­tiel­le­ment nocive sur le plan environnemental ?

En dehors des biens de néces­si­té, que le capi­ta­lisme est d’ailleurs loin de four­nir tou­jours cor­rec­te­ment, comme en témoignent l’aide ali­men­taire, la pau­vre­té des trans­ports de proxi­mi­té et la médio­cri­té de tant de loge­ments, la consom­ma­tion est le lot de conso­la­tion qu’il offre à des tra­vailleurs à qui il dénie toute res­pon­sa­bi­li­té sur le tra­vail. J’avais été très frap­pé par une pub dans le métro à pro­pos d’un de ces inutiles ser­vices de livrai­son de nour­ri­ture à domi­cile dont le slo­gan était : « C’est bon de com­man­der. » Alors que la popu­la­tion ne com­mande abso­lu­ment rien sur l’essentiel… À par­tir du moment où nous sommes res­pon­sables du tra­vail, de la pro­duc­tion, nous n’avons plus besoin des coli­fi­chets d’une consom­ma­tion inat­ten­tive à ses effets tant anthro­po­lo­giques qu’écologiques. Je suis abso­lu­ment convain­cu que ce besoin de consom­ma­tion que vous dénon­cez est une carac­té­ris­tique du capi­ta­lisme, non d’une pré­ten­due nature humaine. Je ne crois pas du tout au carac­tère iné­luc­table d’une pul­sion vers un tou­jours plus de consommation.

La ques­tion se pose tout de même de savoir com­ment gérer une éven­tuelle « demande » envers des pro­duits impor­tés de très loin. Ou que faire si des gens sou­haitent voya­ger trois fois par an à l’autre bout du monde en pre­nant l’avion ?

« Tous les vols inté­rieurs, et nombre de vols conti­nen­taux, sont abso­lu­ment inutiles dès lors que les trains de nuit sont réta­blis et que les trains de jour offrent un confort de travail. »

Mais tous les vols inté­rieurs, et nombre de vols conti­nen­taux, sont abso­lu­ment inutiles dès lors que les trains de nuit sont réta­blis et que les trains de jour offrent un confort de tra­vail tel qu’on perd bien moins de temps de tra­vail en pre­nant le train plu­tôt que l’avion — ce qui est évident ! Et les coopé­ra­teurs de ScopTi ont fait la preuve avec 1336 qu’on peut pro­duire des thés et des tisanes d’excellente qua­li­té sans faire faire plu­sieurs fois le tour du monde aux intrants7. Je pense aus­si aux Jeans 1083, fai­sant réfé­rence au nombre de kilo­mètres maxi­mum par­cou­rus par eux au cours de leur pro­duc­tion. La logique capi­ta­liste impose une divi­sion inter­na­tio­nale du tra­vail infi­ni­ment supé­rieure à celle qui est néces­saire. Sortir la pro­duc­tion des griffes du capi­tal est donc la pre­mière condi­tion de chan­ge­ment des pra­tiques de consom­ma­tion. Par ailleurs, si l’on veut — et il le faut — jouer direc­te­ment sur ces pra­tiques, il s’agit non pas de culpa­bi­li­ser les consom­ma­teurs en fai­sant appel à la morale indi­vi­duelle, mais d’instituer à l’échelle macro­so­ciale d’autres rap­ports à la consom­ma­tion. Par exemple, en aug­men­tant les salaires non pas sous forme d’espèces, mais par la sol­va­bi­li­sa­tion d’accès à des pro­duits conven­tion­nés — comme nous l’avons fait pour l’assurance-maladie : un modèle qui a toute sa per­ti­nence même s’il est enta­ché par le main­tien du carac­tère capi­ta­liste de la pro­duc­tion de médicaments.

Modèle que vous sou­hai­tez étendre avec la pro­po­si­tion de Sécurité sociale de l’alimentation…

On peut en effet trans­for­mer une par­tie du salaire actuel sous une autre forme de mon­naie, en nature et non en espèces. Augmentons par exemple les salaires d’une coti­sa­tion de Sécurité sociale de l’alimentation d’un mon­tant de 120 mil­liards, com­pen­sée par 120 mil­liards de non ver­se­ment de divi­dendes ou de non rem­bour­se­ment de dettes d’investissement. 80 mil­liards cor­res­pon­draient à un com­plé­ment men­suel de la carte vitale, de sorte que chaque per­sonne dis­pose de 100 euros par mois pour des achats ali­men­taires. Ces 100 euros ne pour­ront être dépen­sés qu’auprès de pro­fes­sion­nels conven­tion­nés sur les cri­tères sui­vants : pro­duc­tion bio, paie­ment des tra­vailleurs à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle, finan­ce­ment de l’investissement sans appel au cré­dit (ban­caire ou du mar­ché des capi­taux), pro­prié­té de l’entreprise par les tra­vailleurs. Les 40 mil­liards res­tant seront uti­li­sés pour aug­men­ter la pro­duc­tion alter­na­tive à l’agro-business : achat de terres, sou­tien aux pay­sans sou­hai­tant pas­ser au bio, salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle et sub­ven­tion de l’investissement pour tous les alter­na­tifs actuels (dans la pro­duc­tion d’outils répa­rables, dans la pro­duc­tion de biens ali­men­taires bruts ou trans­for­més, dans la dis­tri­bu­tion et la res­tau­ra­tion). À ce niveau d’intervention (la moi­tié de la consom­ma­tion ali­men­taire), nous sommes en capa­ci­té d’engager une dyna­mique de sor­tie de la folie de l’agro-business. Et ce que je viens d’évoquer pour l’alimentation vaut bien sûr dans tous les domaines, à com­men­cer par le trans­port de proxi­mi­té, le loge­ment et l’énergie. Socialiser la valeur dans des coti­sa­tions inter­pro­fes­sion­nelles gérées par les tra­vailleurs comme l’a été le régime géné­ral de Sécurité sociale pen­dant vingt ans, sol­va­bi­li­ser l’accès à toute une série de biens et ser­vices qui res­te­raient à prix, et cela sans four­nir de mar­ché public à des groupes capi­ta­listes car ne seraient conven­tion­nés que des pro­duc­teurs et des dis­tri­bu­teurs non capi­ta­listes : nous avons là un for­mi­dable levier pour sor­tir la pro­duc­tion de la fuite en avant dans laquelle l’entraîne le capi­ta­lisme, si folle d’un point de vue éco­lo­gique, anthro­po­lo­gique et territorial.

Quatre cyclistes, Fernand Léger]

On est loin des démarches indi­vi­duelles du « consomm’acteur », non ?

Je me suis long­temps conten­té de récu­ser toute cette thé­ma­tique de la « consomm’action », car c’est vrai que c’est par la pro­duc­tion qu’on peut sor­tir du capi­ta­lisme. Mais aujourd’hui j’ai chan­gé radi­ca­le­ment mon mode de consom­ma­tion. Pourquoi ? Parce que la façon dont on consomme est à la mesure de la façon dont on pro­duit. Quelqu’un qui accepte de consom­mer n’importe quoi accepte de pro­duire n’importe quoi. Dans le mépris de nom­breux mili­tants pour le chan­ge­ment de la consom­ma­tion, il y a de l’indifférence à ce qu’ils pro­duisent. Je conteste cette atti­tude contra­dic­toire de tous ceux qui se moquent de l’action par la consom­ma­tion mais qui ne s’auto-organisent pas col­lec­ti­ve­ment dans leur entre­prise pour chan­ger radi­ca­le­ment la pro­duc­tion. Une cer­taine éthique de la consom­ma­tion est inté­res­sante si elle est mise en cohé­rence avec une éthique de la pro­duc­tion. La conquête du salaire à la qua­li­fi­ca­tion per­son­nelle et de la copro­prié­té d’usage de l’outil de tra­vail est évi­dem­ment au ser­vice d’une pro­duc­tion autre, mais ne pour­ra adve­nir que sur la base de l’auto-organisation des tra­vailleurs pour une autre pro­duc­tion, dès aujourd’hui. C’est pour­quoi la pro­po­si­tion de Sécurités sociales sec­to­rielles me semble très féconde car elles four­ni­ront un outil macro-éco­no­mique de mise en œuvre, entre­prise par entre­prise, d’un tra­vail libé­ré du capital.


Photographies de ban­nière et de vignette : Stéphane Burlot | Ballast.


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  1. Une pro­prié­té lucra­tive rému­nère le droit de pro­prié­té (et non le tra­vail), par l’exploitation d’un bien non uti­li­sé par son pro­prié­taire.
  2. Démesure.
  3. Marx est le pre­mier a faire une dis­tinc­tion entre les concepts de classe en soi et de classe pour soi. La pre­mière est une classe sociale qui existe de fait, objec­ti­ve­ment, mais dont les membres n’ont pas néces­sai­re­ment conscience d’ap­par­te­nir à la même classe. La classe pour soi, elle, est com­po­sée d’in­di­vi­dus ayant conscience de leur appar­te­nance com­mune et des inté­rêts qu’ils ont à défendre.
  4. Claude Didry, L’Institution du tra­vail, La Dispute, 2016.
  5. Système phi­lo­so­phique pen­sé par Auguste Comte qui, à par­tir d’une théo­rie de la connais­sance repo­sant sur la loi des trois « états », se carac­té­rise par le refus de toute spé­cu­la­tion méta­phy­sique et sur l’i­dée que seuls les faits d’ex­pé­rience et leurs rela­tions peuvent être objets de connais­sance cer­taine.
  6. Concrètement, près de 45 % de la masse des salaires est ver­sée sous forme de coti­sa­tions aux caisses de Sécurité sociale, de retraites, etc.
  7. En éco­no­mie, un intrant est un élé­ment entrant dans un pro­ces­sus de pro­duc­tion.

REBONDS

☰ Lire notre entre­tien avec Frédéric Lordon : « Rouler sur le capi­tal », novembre 2018
☰ Lire notre article « Le salaire à vie : qu’est-ce donc ? », Léonard Perrin, mars 2018
☰ Voir notre débat « Salaire à vie et reve­nu de base : Bernard Friot et Baptiste Mylondo », juillet 2016
☰ Lire notre entre­tien avec Bernard Friot : « Nous n’avons besoin ni d’employeurs, ni d’actionnaires pour pro­duire », sep­tembre 2015
☰ Lire notre entre­tien avec Alain Bihr : « Étatistes et liber­taires doivent créer un espace de coopé­ra­tion », mai 2015
☰ Lire notre article « Du pou­voir et de l’État », Daniel Bensaïd, avril 2015


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